Bureaucratie et « risque pénal » : deux maux indissociables

La responsabilité pénale des ministres n'entraîne-t-elle pas une paralysie de l'action ?
La responsabilité pénale des ministres n'entraîne-t-elle pas une paralysie de l'action ?

Après avoir fustigé le gouvernement pour son manque de réactivité à la fin du premier confinement de 2020, les commentateurs ont souvent pointé la peur, chez les ministres, du « risque pénal ». Avec la vaccination, c'est la toute-puissance de l'administration qui est condamnée. L'une découle en réalité de l'autre.

Le 21 octobre dernier, auditionné devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale chargée de juger l'action gouvernementale au cours de l'épidémie, Édouard Philippe a soulevé un problème essentiel. Admettant qu'il était « délicat » d'en parler, il a invité les députés à prendre en compte la difficulté de gérer une crise sanitaire « quand vous avez immédiatement le risque pénal sur le dos ». Ce joug de la menace judiciaire planant au-dessus des ministres était déjà au centre des discussions médiatiques depuis de nombreux mois. Invité de Ruth Elkrief en juin 2020 sur BFM TV, Philippe de Villiers a rendu compte d'une conversation téléphonique avec le président de la République. Emmanuel Macron lui aurait ainsi confié que l'ancien Premier ministre a tant tardé à lever le premier confinement parce qu'il « gérait son risque pénal ». Près de trois décennies plus tôt, Philippe Muray avait déjà dénoncé, en détournant une célèbre expression de Freud, « l'envie de pénal », à savoir la tentation de combler tout vide juridique par une législation toujours plus contraignante et normalisée.

Alors, la justice se verrait-elle davantage comme un pouvoir qu'u [...] Lire la suite