Brexit: La stratégie de May attaquée de toutes parts

La stratégie de Brexit de la Première ministre britannique Theresa May a été attaquée de toutes parts lundi, accentuant le risque de voir son plan rejeté par le Parlement et de voir son pays acculé vers un Brexit dur et potentiellement chaotique. /Photo prise le 19 octobre 2018/REUTERS/Toby Melville

par Guy Faulconbridge et Gabriela Baczynska

LONDRES (Reuters) - La stratégie de Brexit de la Première ministre britannique Theresa May a été attaquée de toutes parts lundi, accentuant le risque de voir son plan de retrait de l'Union européenne rejeté par le Parlement et de voir le Royaume-Uni acculé vers un Brexit dur et potentiellement chaotique.

L'ex-ministre de l'Education Justine Greening a déclaré à la BBC que certains ministres, favorables au maintien dans l'UE, réfléchissaient à leur avenir - manière de dire qu'ils envisageaient de quitter le gouvernement.

Selon le Sunday Times, quatre ministres favorables au "remain" menaceraient de quitter le gouvernement sur la question du Brexit.

Justine Greening a jugé lundi matin sur la BBC que May n'aurait pas de majorité parlementaire sur un éventuel accord de retrait de l'UE.

"Je pense que ce sera le pire des mondes", a-t-elle dit à la BBC-radio. "Cela nous laissera avec moins d'influence, moins de marge de contrôle sur les règles que nous devrons suivre", a-t-elle estimé.

A moins de cinq mois du retrait prévu du Royaume-Uni de l'UE, le 29 mars 2019 en fin de soirée, les négociations patinent toujours sur la question de la frontière terrestre entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande, au cas où aucun accord ne serait trouvé.

Aucune réunion du gouvernement de Theresa May n'a jamais été prévue lundi, a déclaré une source gouvernementale britannique, démentant une information du quotidien The Independent.

UN NOUVEAU RÉFÉRENDUM ?

Sur son site internet, le journal a rapporté tard dimanche soir que la Première ministre avait dû abandonner l'idée de réunir son gouvernement lundi pour faire approuver un texte sur le Brexit.

Citant une source gouvernementale, le journal a ajouté que la Première ministre britannique avait décidé de ne pas réunir son gouvernement après s'être heurtée à des résistances au sein même de son cabinet ainsi qu'à Bruxelles.

Greening, qui a démissionné en janvier de ses fonctions de ministre de l'Education, préconise un nouveau référendum qui donnerait aux électeurs britanniques le choix entre trois possibilités: rester dans l'UE, sortir de l'UE dans le cadre des règles générales de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ou suivre le plan proposé par May pour quitter l'UE.

A Bruxelles, le négociateur en chef de l'Union européenne, Michel Barnier, a déclaré lundi aux ministres des Affaires étrangères des pays de l'UE qu'il attendait de Theresa May un signal montrant qu'elle pense avoir suffisamment de voix au Parlement pour faire adopter son projet d'accord.

Si aucun signal de ce type n'est donné d'ici mercredi soir, un sommet européen extraordinaire sur le Brexit ne pourra avoir lieu en novembre, dit-on de source informée. Dans le cas contraire, un tel sommet pourrait se tenir les 24 et 25 novembre.

"CONFUSION POLITIQUE"

"C'est une telle confusion politique en Grande-Bretagne que nous voyons mal comment elle (Theresa May) pourra faire adopter son projet", a dit un diplomate européen à Bruxelles.

A Londres, le porte-parole de May a une nouvelle fois dit s'attendre à ce que le gouvernement apporte son appui à la Première ministre.

Dans une tribune publiée dans le Telegraph, l'ancien ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, champion des partisans du Brexit, accuse quant à lui la Première ministre de préparer une "reddition totale" du Royaume-Uni.

Johnson juge le gouvernement incapable de négocier un moyen de mettre fin unilatéralement au filet de sécurité ("backstop") exigé par l'Union européenne pour empêcher le rétablissement d'une frontière physique entre la République d'Irlande et la province britannique d'Irlande du Nord.

Cette incapacité du gouvernement transformera selon Boris Johnson le Royaume-Uni en "colonie" et en "Etat vassal" de l'UE.

Le chef de la diplomatie irlandaise, Simon Coveney, a souligné lundi à Bruxelles que la semaine qui débute serait d'une très grande importance pour les négociations.

Les discussions entre Londres et Bruxelles continuant de bloquer sur la question de la frontière irlandaise, la tenue d'un conseil européen extraordinaire en novembre pour finaliser un accord sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, programmé dans moins de cinq mois, le 29 mars 2019 à 23h00 GMT, semble de moins en moins probable.

(Avec Philip Blenkisop, Elizabeth Piper et Shubham Kalia; Jean-Stéphane Brosse, Henri-Pierre André, Eric Faye et Guy Kerivel pour le service français)