Brest qualifié pour la Ligue des champions: la fierté des anciennes gloires du club

"C'est incroyable! Exceptionnel! Magnifique! Monumental!". Si vous cherchez un dictionnaire des superlatifs, il vous suffit de parler avec les anciens de la maison de la saison du Stade Brestois. Jamais Brest n'avait fini dans son histoire mieux que huitième au classement en 18 saisons de Ligue 1. Jamais il ne s'était qualifié pour une Coupe d'Europe. Mais le ticket pour la Ligue des champions est officiellement validé depuis mercredi 15 mai. Ces deux records et bien d'autres sont à ranger au grenier et les légendes du club s'en félicitent, à commencer par Yvon Le Roux.

L'ex-défenseur central finistérien, surnommé "le colosse de Plouvorn", est un pur produit du cru. Formé au club, il a disputé sept saisons professionnelles avec le Brest Armorique de 1977 à 1983. Ce qui lui ouvrira les portes de l'équipe de France jusqu'au titre de champion d'Europe en 1984. Pour celui qui est aujourd'hui ambassadeur du club, "ce qui rend la saison si forte, c'est que jamais on aurait imaginé ça. L’année dernière, on sauvait notre place en Ligue 1. C'est extraordinaire. Bien sûr qu'on est tous surpris de passer de la descente à la Ligue des champions".

Corentin Martins, Brestois de naissance et de maillot de 1989 à 1991, embraie: "C'est d'autant plus magnifique dans le sens où c'est mérité. Ils ont su durer dans la performance et les résultats, car les contenus des matchs étaient quasi tous bons. C'est logique qu'ils soient récompensés de leur niveau de jeu. Cela peut paraître bizarre car souvent les équipes bien classées sont les plus gros budgets. Il y en a parfois une qui vient bouger tout ça. Et cette année, c'est Brest", applaudit Martins qui a aussi été directeur sportif et sur le banc brestois pour trois intérims en 2008, 2012 et 2013.

"Cette saison de Brest, c'est tout ce qui est beau dans le foot"

Oscar Ewolo éclate de rire quand on lui demande de commenter la saison brestoise. "C'est incroyable, juste incroyable! Pour les amoureux du foot, pour Brest et la Bretagne, c'est juste un rêve", lâche l'ancien milieu de terrrain et capitaine du SB29 de 2009 à 2012. "C'est vrai que l'année où on remonte en Ligue 1 en 2010, on est restés un peu premiers du classement (de la 11e à la 13e journée) mais c'était l'euphorie de la montée. Ça n'a pas duré. On était dans la dynamique et après on a ralenti. Là, ce qu'ils font, ce n'est pas dans l'euphorie mais c'est le résultat d'un travail de fond qui a été fourni. On ne peut pas être quasiment toute l'année aussi haut au classement par hasard".

Pour Vincent Guérin, la saison de Brest est "tout ce qui est beau dans le football quand il y a encore cette aventure humaine qui existe". "Pour moi, émotionnellement c'est super. Je suis le premier supporteur du Stade Brestois. J'y ai fait mon début de carrière. Pour moi c'est l'insouciance, les débuts en pro avec beaucoup de sourires car on avait de bons résultats et ça m'a permis d'intégrer l'équipe de France espoirs, d'être champion d'Europe espoirs", se souvient le milieu de terrain du Brest Armorique de 1984 à 1988.

"Brest, c'est un club familial. On le voit avec le président, le staff technique avec des locaux qui connaissent bien le club et Éric Roy qui est venu s'intégrer là-dedans. Il n'y a pas des joueurs d'un calibre international mais il y a des joueurs qui ont progressé et qui forment une chaîne entre eux, main dans la main, qui ont une solidarité et qui arrivent à se dépasser car tout un contexte a été mis en place. C'est vraiment ce qu'on aime dans le foot, de retrouver des clubs qu'on attend pas du tout en haut de l'affiche. Être sur le podium ou dans les quatre comme çà tout au long de la saison, franchement chapeau."

"Brest c’est l’humilité, la simplicité, la convivialité"

L'équipe brestoise est une équipe portée par "le collectif qui vit de manière très simple. Une équipe de copains et si l'un d'entre-deux est en difficulté il y a toujours quelqu'un pour l'aider", relève Yvon Le Roux. Ewolo aime lui-aussi "cette solidarité, cette abnégation, ne jamais lâcher. C'est flagrant quand on la regarde jouer et c'est dans l'esprit du club. Et à force de gagner des matchs, ils ont construit une culture de la gagne et une culture du jeu. On voit que ça vit bien ensemble. Et là, on va faire la Coupe d'Europe, c'est merveilleux", éclate-t-il de rire à nouveau comme s'il n'y croyait pas encore.

"C'est aussi magnifique pour le public brestois. Je connais leurs attentes. Brest j'y suis né. J'y ai débuté", reprend Corentin Martins. "C'est un public qui aime le foot et il a été servi. Il attend que les joueurs mouillent le maillot, même si à Brest c'est facile de le mouiller avec la pluie qui tombe. Il attend des joueurs qui ne lâchent rien, donnent tout, et cette année ça a toujours été le cas". Oscar Ewolo poursuit: "C'est vrai qu'à Brest, c'est particulier la façon dont on porte le club. L'engouement, c'est plus qu'une ville, c'est tout le Finistère. Moi qui ai été à Lorient aussi, je suis devenu un vrai Breton. Il y a quelque chose de différent dans l'atmosphère là-bas qui m'a toujours marqué. Je ne saurais pas trop comment l'expliquer".

Yvon Le Roux se lance: "Brest c’est l’humilité, la simplicité, la convivialité. C’est toujours ce que j’ai aimé dans le football. Quand je viens au stade, c’est sentir les frites, les merguez, ça fait partie du sport. Je retrouve ici l’ambiance des années 80. On ne se prend pas la tête. On prend tout le bonheur que l’on peut prendre pour donner du plaisir aux gens. On sait que peut-être la saison prochaine ça sera très difficile. Je viens de passer devant le Pénalty (le bar des supporteurs situé à une dizaine de mètres du stade, ndlr). On discute avec les gens. Le foot c'est la convivialité avant tout. C'est du bonheur!"

"Même si on aime le Barça ou le Juve, ce sera Brest et rien d'autre"

Homme de foi, aujourd'hui pasteur évangéliste, Oscar Ewolo a le sens de la formule. Il voit même dans cette saison d'anthologie pour le club "un vrai clin d'oeil du Seigneur! J'ai encore des grands amis là-bas comme Bruno Grougi, Julien Lachuer (tous deux entraineurs adjoints) et Greg Lorenzi (directeur sportif) qui fait un très bon travail. Je suis infiniment reconnaissant au Seigneur. Il y a un proverbe qui dit «Celui qui sème avec larmes récolte avec champs d'allégresse»; Pour moi, tout est là. Ils sont là les champs d'allégresse car il y a eu beaucoup de semences et beaucoup de larmes. Brest est un grand club qui a connu des temps très difficiles et aujourd'hui il revient sur le devant de la scène. Il y a eu un travail de longue haleine, de plusieurs années. Le travail bien fait paie même si ça doit prendre du temps. Comme on dit, un beau jour la nuit finit par disparaître et le jour par apparaître. C'est ce qui se passe et c'est super beau. C'est juste (il cherche ses mots)... wow".

Et quand on lui demande s'il a hâte de prendre ses billets pour voir un Brest-Real Madrid ou Brest-Manchester City la saison prochaine, nouvel éclat de rire: "Mais grave! Tout le monde va supporter Brest. Et même si on aime bien le Barça ou la Juve, ce sera Brest et rien d'autre". Rendez-vous dans quelques mois. Et même s'il y a peu de chances que ce soit au stade Francis-Le-Blé, "pour l'instant profitons".

Article original publié sur RMC Sport