Brésil : ce sous-marin inauguré par Macron et Lula cache un vaste programme de "transfert de technologie"

Le "Tonelero", inauguré par Emmanuel Macron et Lula, est un sous-marin Scorpène de conception française de 71 mètres de long pour 1 870 tonnes.

SOUS-MARIN - Un travail d’équipe pour un très gros bébé. En visite au Brésil, Emmanuel Macron va participer à une cérémonie pas comme les autres ce mercredi 27 mars. Aux côtés du président brésilien Lula, il va inaugurer le Tonelero, un sous-marin Scorpène de conception française.

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L’engin, qui doit son nom à la bataille navale de Tonelero, remportée par le Brésil en 1851 face à l’Argentine rivale, est le troisième des quatre Scorpène à propulsion conventionnelle construit dans le cadre d’un partenariat entre les deux pays. Avant lui, il y a eu l’Humaita, lancé en janvier dernier, et le Riachuelo, en service depuis septembre 2022. Le dernier, l’Angostura, doit être lancé en 2025.

On parle ici de bâtiments de 1 870 tonnes pour 71 mètres de long, à propulsion diesel-électrique, qui peuvent tirer des torpilles lourdes F21 ou des missiles antinavires Exocet. Ces derniers sont également acquis auprès de l’industrie française de défense.

Défendre "l’Amazonie bleue"

La cérémonie présidée par les deux chefs d’État ce mercredi sur le chantier naval d’Itaguaí, au sud de Rio de Janeiro, n’est que la suite naturelle de la signature d’un vaste accord en décembre 2008 par Nicolas Sarkozy et… Lula, déjà. Il s’agit un partenariat stratégique inédit entre Paris et Brasilia qui doit aboutir à la construction par le Brésil de son premier sous-marin à propulsion nucléaire.

Fort de ses 8 500 kilomètres de côtes, le pays entend assurer la sécurité de ce qu’il nomme l’« Amazonie bleue », une immense zone économique exclusive par laquelle transite plus de 95 % de son commerce extérieur et d’où est extrait environ 95 % de son pétrole.

L’accord signé entre Lula et Sarkozy en 2008 prévoit un contrat de 6,7 milliards d’euros pour développer les capacités sous-marines du Brésil et son industrie. Baptisé Prosub, ce programme est présenté par l’industriel français Naval Group comme « le programme de transfert de technologie le plus complet jamais effectué ».

Le premier volet prévoyait donc la construction au Brésil par ICN – coentreprise entre l’entreprise brésilienne Novonor et Naval Group – des quatre sous-marins Scorpène. Un modèle que Naval Group a déjà vendu au Chili, à l’Inde et à la Malaisie. Des ingénieurs et techniciens brésiliens ont été formés à Cherbourg, tandis que Naval Group fournit les plans, certains équipements et une assistance technique.

Ce sous-marin inauguré par Macron et Lula cache un vaste « programme de transfert de technologie » ( Photo de Luiz Inacio Lula Da Silva et Emmanuel Macron le 26 mars 2024)
LUDOVIC MARIN / AFP Ce sous-marin inauguré par Macron et Lula cache un vaste « programme de transfert de technologie » ( Photo de Luiz Inacio Lula Da Silva et Emmanuel Macron le 26 mars 2024)

Le deuxième volet du partenariat visait à construire une nouvelle base navale et un chantier de construction de sous-marins à Itaguaí. Celui-ci a été inauguré en 2018. En outre, l’accord prévoit la vente de 50 hélicoptères Caracal, qui seront assemblés au Brésil.

Un sous-marin nucléaire, encore plus gros, en préparation

Enfin, le troisième volet, le plus ambitieux, doit donc permettre au Brésil de concevoir et construire son premier sous-marin nucléaire d’attaque, l’Álvaro Alberto, ce qui en ferait le premier pays à en disposer après les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Celui-ci sera plus imposant : 100 mètres de long pour 7 000 tonnes.

Naval Group fournit une assistance technique pour la conception du bâtiment, sauf pour sa partie nucléaire, la chaufferie étant conçue par les Brésiliens. Le projet accumule les retards, notamment en raison de difficultés budgétaires, et le sous-marin est dorénavant prévu en 2036-2037, selon la marine brésilienne.

Le dossier "sensible" de l’aide de la France sur le nucléaire

Brasilia cherche à convaincre Paris d’accroître ses transferts de technologies pour l’aider à intégrer le réacteur dans le sous-marin et de lui vendre des équipements liés à la propulsion nucléaire (turbine, générateur).

« Il y a des échanges sur la possibilité que la France coopère avec nous, y compris sur l’énergie nucléaire, le combustible nucléaire », selon la responsable Europe de la diplomatie brésilienne, Maria Luisa Escorel de Moraes, qui reconnaît qu’il s’agit d’un « dossier stratégique, sensible, délicat ».

Dans un rapport en juillet, des sénateurs français mettaient en avant « des problématiques » liées aux obligations de non-prolifération en cas de coopération plus poussée avec le Brésil ; ils appelaient toutefois à « étudier toutes les possibilités, alors que l’accord Aukus devrait donner lieu à la livraison à l’Australie de sous-marins à propulsion nucléaire par les États-Unis ».

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