Le « bonus réparation », ou comment allonger la durée de vie des équipements électroniques

Plutôt que de jeter pour racheter, le fonds réparation bientôt mis en place par le gouvernement devra permettre de changer les habitudes des Français au sujet du matériel électronique.
CHARLY TRIBALLEAU / AFP Plutôt que de jeter pour racheter, le fonds réparation bientôt mis en place par le gouvernement devra permettre de changer les habitudes des Français au sujet du matériel électronique.

CONSOMMATION - De 10 euros pour une bouilloire ou un grille-pain à 45 euros pour un ordinateur : les Français peuvent désormais bénéficier d’un « bonus » pour faire réparer leurs appareils électriques et électroniques. Un coup de pouce encore inédit pour allonger la durée de vie des équipements et réduire les déchets.

Ce fonds réparation, prévu par la loi économie circulaire de début 2020, entre en vigueur ce jeudi 15 décembre, avec une première série d’appareils concernés, suivie d’autres catégories d’équipements à partir de 2024. Doté de 410 millions d’euros pour six ans, son financement est assuré par les industriels, via les éco-organismes chargés de gérer la fin de vie des appareils.

Lave-linge, smartphone ou machine à café

Les particuliers peuvent à présent se rendre chez l’un des 500 premiers réparateurs agréés (porteurs du label « QualiRépar »), et profiter d’une ristourne forfaitaire sur leur drone ou leur hotte en panne. « Ce bonus répond à une logique de pouvoir d’achat, pour réduire le coût de la réparation », explique Nathalie Yserd, directrice générale d’Ecosystem, qui gère ce fonds avec un autre éco-organisme, Ecologic.

Un dispositif détaillé par le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu lors de son annonce à la mi-novembre : « Il faudra s’adresser à un réparateur agréé, et le montant de l’aide sera directement déduit de la fracture […] C’est un enjeu crucial et qui permet de parler d’écologie de manière positive », observait le ministre sur franceinfo.

Parmi la trentaine de types d’appareils éligibles : machine à café à filtre, fer à repasser (10 euros), aspirateur, perceuse/visseuse, lecteur DVD, home cinéma, instrument de musique, vélo, trottinette (15 euros), console de jeux, enceinte (20 euros), cave à vin, lave-linge, réfrigérateur/congélateur, tablette, téléphone portable (25 euros), téléviseur, vidéoprojecteur (30 euros).

Après cette première salve de produits, l’année 2024 s’ouvrira aux friteuses, imprimantes, robots culinaires et autres fours à micro-ondes. En 2025, seront inclus climatiseurs mobiles, sèche-cheveux, ventilateurs… En revanche, les produits sous garantie (légale, commerciale, ou via une assurance) seront exclus.

« Tout ce qui contribue à accroître la durée de vie des produits profite à l’environnement, en évitant de reponctionner dans les ressources naturelles », ajoute Nathalie Yserd, abordant cependant « avec humilité » un dispositif « précurseur en Europe ». Aujourd’hui on estime à 10 millions le nombre de réparations réalisées chaque année en France, où circulent environ 1,5 milliard d’équipements électriques et électroniques. Avec cette nouvelle dynamique, l’objectif est maintenant d’accroître ce volume de réparations de 20 %.

Un label accordé trois ans aux réparateurs

« Tous les coups de pouce pouvant aider à la réparation sont favorables », souligne Alice Elfassi, responsable juridique de Zero Waste France, qui juge cependant ce montant « bien inférieur à ce qui était espéré ».

Même son de cloche pour l’ONG, avec les Amis de la Terre, qui a déposé devant le Conseil d’État un recours en annulation du décret de création du fonds. Les associations déplorent une réduction de moitié de l’enveloppe financière, au terme d’intenses discussions entre les parties : l’État a réduit de 20 % à 10 % le taux plancher de prise en charge des réparations.

Selon les deux éco-organismes, les forfaits devraient correspondre à environ 20 % du coût moyen de réparation. Cela suffira-t-il à convaincre le consommateur, d’abord motivé, selon une enquête de l’Ademe, par le prix, puis par le sérieux du réparateur ? « Le seuil psychologique au-dessus duquel il préférera racheter un objet neuf est estimé entre 25-30 %. L’objectif est donc de s’en approcher », souligne Nathalie Yserd.

Le nombre de réparateurs agréés doit aussi être étendu : 1 500 sont espérés à l’horizon 2023, et 10 000 pour 2027, avec tous les types représentés (indépendants, SAV fabricants, SAV distributeurs). Pour obtenir le label QualiRépar, accordé pour trois ans, tous devront avoir déposé leur candidature auprès d’un organisme certificateur (Bureau Veritas, SGS ou AFNOR), et répondu à un référentiel (compétences, transparence des prix…).

Et même si certains appareils ne sont pas dévissables, ou sont moulés d’une seule pièce, « des marques permettent toujours la réparation », note-t-elle. À ce titre, un « indice de réparabilité » est ainsi progressivement mis en place en France sur certains équipements, pour aider le consommateur dans son choix au moment de l’achat.

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