« Bliss Stories », un podcast sur la maternité dont le succès dépasse toutes les espérances

Clémentine Galey, ici sur la scène du Grand Rex, lors d’une des représentations du spectacle de son podcast « Bliss Stories ».
Clémentine Galey, ici sur la scène du Grand Rex, lors d’une des représentations du spectacle de son podcast « Bliss Stories ».

MÉDIAS - « Des femmes éclatent en larmes dans mes bras. Jamais je n’aurais pensé incarner ça. » Ces mots ne nous viennent pas de Madonna ni même de Mick Jagger, mais de Clémentine Galey, superstar d’un podcast indépendant autour de la maternité baptisé Bliss Stories.

La scène qu’elle vient de nous décrire peut paraître surréaliste, elle s’est pourtant produite à plusieurs reprises à l’issue des représentations du spectacle qu’elle a donné à travers toute la France pendant des mois - à guichets fermés - aux côtés d’une troupe d’invité.e.s qu’elle avait (pour la plupart) précédemment interviewées.

Ce jeudi 22 juin, l’expérience va plus loin. Le live du Grand Rex est projeté dans 180 salles de cinéma à 20 heures. Au programme : des rires, des pleurs, des témoignages déculpabilisant sur l’avortement et d’autres tout aussi concernant, comme la question des hémorroïdes après l’accouchement. Bliss Stories est un phénomène et la bande-annonce du film parle d’elle-même.

Si l’Olympia a affiché complet en moins de 24 heures, ce n’est pas étonnant. Lancé au mois d’avril 2018, Bliss Stories compte désormais plus de 210 épisodes. Il a dépassé la barre du million d’écoutes par mois, faisant de lui l’un des podcasts les plus écoutés de France. « C’est énorme, nous dit Clémentine Galey. J’en suis la première surprise. »

Parler maternité sans filtre

Lou Doillon, Constance Jablonski, Louane… Depuis son lancement, le nombre de célébrités à être passées par son micro s’allonge, mais ce sont surtout des anonymes qui y défilent pour raconter leurs récits de grossesse, d’accouchement, de post-partum ou de désir d’enfants.

Certains peuvent paraître « communs », d’autres moins. Il y a Andrea, maman de trois enfants et porteuse du VIH, mais aussi Bousso qui, atteinte du trouble de la bipolarité, a longtemps redouté de transmettre sa souffrance à son bébé. L’histoire d’Ali, un homme trans, est éclairante. Celle d’Aline, une personne asexuelle qui s’est lancée dans une grossesse « en solo », aussi.

Le but de Bliss Stories ? Parler de maternité sans tabou - il y est aussi question de stérilité ou d’IVG - et offrir un support d’informations diverses et variées dans lequel tout le monde peut piocher. Le tout, porté avec bienveillance et réconfort par la voix et l’empathie de son host. « Clémentine, c’est la Céline Dion de la maternité », nous a confié avec humour l’autrice et journaliste spécialiste des questions de parentalité Renée Greusard, qui comptait parmi les stand-uppeuses de la tournée.

La naissance de Bliss

Ancienne directrice de casting chez TF1, Clémentine Galey cherchait à donner un sens à sa vie professionnelle. Lorsque sa petite sœur tombe enceinte, c’est le déclic. La trentenaire se retrouve assiégée de questions, elle qui a vécu deux grossesses sans encombre. Elle constate que la benjamine est « complètement larguée », qu’elle a une information sur dix. Il y a une pénurie de transmission, estime-t-elle à ce moment.

« Les suivis gynécologiques à l’hôpital représentent la majorité des suivis de grossesse. Or, tu y croises des médecins, des sages-femmes et tout un panel de professionnels qui te filent des renseignements au compte goûte, déplore la spécialiste. Les futures mères se laissent balader et orienter par des protocoles qui ne leur conviennent pas. Ça fait des futures mères traumatisées. Ce n’est pas possible. »

Bliss Stories voit le jour en 2018. Un nom donné en référence à ce sentiment de béatitude « quand tu plonges tes yeux dans les yeux de ton enfant pour la première fois ».

Ce que reflète l’engouement

L’engouement est quasi-immédiat. Les audiences des premiers épisodes décollent. Clémentine croule sous les témoignages qui, par centaines, affluent dans sa boîte mail. « Je n’imaginais pas qu’il y avait une telle attente. C’était même de l’ordre de l’urgence », observe celle qui, à l’époque, était seule sur le créneau avant de voir arriver une flopée d’autres podcasts, comme La Matrescence ou Le quatrième semestre. Un an plus tard, elle lâche son job principal pour se consacrer à plein temps au projet.

Ce succès, « il reflète clairement l’idée que la transmission orale entre femmes s’est perdue dans nos contrées occidentales, commente la podcasteuse. Or, qu’est-ce qu’il y a de plus important que de se dire les choses qu’on traverse ? Surtout, quand ce sont des montagnes russes émotionnelles. »

Depuis, les annonceurs se pressent aux portes de Bliss Stories. Clémentine n’est plus seule, elle a plusieurs employés et collaborateurs pour l’épauler dans le montage, la création artistique, l’administratif, la pub et tous les autres domaines qui constituent un média. Les témoignages abondent. Aurélia Martin, son bras droit, les filtre méticuleusement. La recette d’un bon épisode : le sujet et sa narratrice. Mais l’un peut aller sans l’autre. « Certaines histoires ne te font pas forcément partir dans les tours, mais si on te la raconte avec panache, ça peut t’embarquer », estime Clémentine Galey.

« Un jour, une idée »

Le business autour du podcast, aussi, monte d’un cran. Elle a développé depuis 2021 deux produits payants : Bliss Bump (un programme audio de dix contenus, dont un épisode spécial consacré à la fausse couche) et Bliss Vanity (un kit contenant les accessoires indispensables pour une jeune maman et son intimité dans les premiers jours qui suivent l’accouchement).

Les derniers projets en date - la tournée et sa captation - sont le signe d’une effervescence croissante. « C’était fou de voir à quel point les scènes étaient toujours pleines », se souvient Renée Greusard, autrice des livres Enceinte tout est possible et Choisir d’être mère. « C’est pour ça qu’on rajoutait des dates à chaque fois », ajoute Clémentine Galey. À l’origine, seul un spectacle au Trianon, à Paris, avait été programmé, avant de voir s’ajouter Bordeaux, Lyon, Toulouse, Nantes, Lilles ou encore Bruxelles.

Aux côtés des deux femmes : Fiona Schmidt, Laurène Sindicic, Estelle Dautry & Victor Point, Anna Roy, Louise Chabat et Pauline Lavaud, des « rock stars sans qui tout ça n’aurait pas existé », abonde la tête pensante du podcast. Le carton est tel qu’elle n’exclut pas une deuxième saison.

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