«Blanchité», «racisé», «racisme d'Etat» : M. Blanquer, ces concepts sont légitimes dans le débat public

Le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer, le 8 novembre 2017 à Paris

Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, veut porter plainte contre SUD Education 93, qui a évoqué un «racisme d'Etat», et juge «épouvantables» des mots comme «blanchité» et «racisé». Ils sont pourtant nécessaires au débat sur le racisme, répond la militante féministe et antiraciste Mélusine.

On avait accusé la sociologie de fournir des «excuses» aux criminels, ce sont aujourd’hui ses concepts qui sont pris pour cibles. Un effort minimal aurait pourtant suffi au ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, pour découvrir qu’en fait de «mots épouvantables», «blanchité» et «racisé» sont des termes scientifiques utilisés en France et ailleurs depuis plusieurs décennies. Ces concepts, consolidés au fil des ans, s’inscrivent dans des cadres théoriques partagés et font l’objet d’ouvrages et d’articles académiques nombreux. S’il est compréhensible que leur entrée dans l’espace du débat public provoque la surprise, leur condamnation lapidaire a de quoi inquiéter.

La seconde moitié du XXe siècle a vu la disqualification scientifique et politique de la croyance en l’existence de races humaines, aux différences physiologiques naturelles. Mais cette disqualification n’a en rien sonné la disparition du racisme, à la fois comme idéologie – identifiant et hiérarchisant des groupes humains selon des critères culturels, ethniques, linguistiques, géographiques – et comme système social produisant des discriminations et des inégalités entre ces groupes. S’il n’y a plus de races humaines, il y a toujours du racisme ; comme l’écrit la sociologue Colette Guillaumin : «c’est très exactement la réalité de la "race". Cela n’existe pas. Cela pourtant produit des morts.» C’est pour décrire et comprendre cette réalité – non pas biologique mais sociale – que la sociologie a élaboré des mots qui, évitant le piège de l’essentialisation, sont propres à la rendre dicible.

Une dynamique d’altérité et d’hostilité

Le mot «racisé» permet de nommer ce groupe social (...)

Lire la suite sur Liberation.fr

La crise des régimes parlementaires européens
Pour des états généraux de la pensée de l’islam
«Il faut plus d’intelligence artificielle, pas moins»
Pour une aide intelligente au développement : soutenir l'agroécologie
La crise des régimes parlementaires européens