Beeri, Nir Oz, Kfar Aza... Attaqués par le Hamas, pourquoi les kibboutz sont aussi symboliques
Beeri, Nir Oz, Kfar Aza... Lors des attaques lancées par le Hamas ce samedi, des localités, connues sous le nom de kibboutz, proches de la frontière avec la bande de Gaza ont été victimes de violents assauts armés. Dans celui de Beeri, plus de 100 corps ont été retrouvés.
Ces communautés précédent la création de l'État d'Israël de 1948 et ont joué un rôle majeur dans son développement économique. Aujourd'hui, elles occupent toujours une place profondément symbolique dans l'histoire du pays.
Inspirés du socialisme
En hébreu, kibboutz signifie "ensemble" ou "assemblée". À leur création, ces communautés ont décidé que tous leurs biens, leurs ressources, leurs terres ou encore leurs ateliers seraient administrés de façon collective: en étant membre, on renonce à la propriété individuelle.
En outre, les dirigeants doivent être élus, les décisions discutées et prises collectivement et les besoins de chacun pris en charge par la communauté. Inspirés du socialisme, les kibboutz sont fondés sur les principes de la vie communautaire et coopérative, du partage équitable des tâches comme des richesses et de l'assistance mutuelle.
Dans certaines des premières communautés, les enfants étaient élevés par la collectivité et vivaient dans une maison où leurs parents leur rendaient visite. Tous les repas étaient pris dans le réfectoire et le sens de la communauté était fort.
"Il a souvent été décrit comme la forme la plus pure de communisme dans le monde occidental", explique au Washington Post David Leach, professeur à l'université de Victoria au Canada.
"Il ne s'agit pas d'un socialisme d'État. C'était comme une démocratie radicale dans laquelle tout le monde, y compris les femmes, avait le droit de vote", complète-t-il.
40% de la production agricole
Le premier kibboutz a été fondé en 1909 et porte le nom de Degania. L'objectif de cette implantation prend racine dans le mouvement sioniste, visant à la formation d'un État juif en terre d'Israël.
L'urgence est alors de rendre la terre fertile pour pouvoir s'y développer. Les nouveaux venus s'attellent donc à l'assèchement des marécages avoisinants à des fins d'agriculture et d'installation.
Les colons juifs à l'origine de ce mouvement voyaient dans les kibboutz un lieu de rencontre entre le sionisme et le marxisme, tout en défendant le plus souvent des valeurs laïques. Ces communautés, qui comptaient de 50 à 2.000 habitants, se sont développées dans des endroits tels que la frontière avec le Liban, le Jourdain et autour de la bande de Gaza.
À vocation essentiellement agricole au départ, les kibboutz assurent toujours près de 40% de la production agricole du pays aujourd'hui.
Progressive privatisation
Au fil du temps, la majorité des kibboutz a fini par s'industrialiser. Beeri, l'un des kibboutz attaqués au cours du week-end, tire l'essentiel de ses revenus de son imprimerie, fondée en 1950. L'usine de taille de diamants du kibboutz Degania réalise aujourd'hui un chiffre d'affaires de plusieurs millions de dollars par an.
À partir des années 1970, nombre d'entre eux sont privatisés, parallèlement au développement économique d'Israël. Les membres peuvent ainsi se constituer un patrimoine personnel avec leurs revenus.
Sur les 270 kibboutz existant, environ 60 ont maintenu leur fonctionnement historique, comme celui de Beeri, qui a conservé l'ancien modèle traditionnel coopératif. Ils gardent toutefois une symbolique importante dans le pays.