Bande de Gaza : une distribution d’aide alimentaire vire au cauchemar, au moins 110 morts selon le Hamas

Au moins 110 personnes ont été tuées et 760 blessés à l’aube à Gaza pendant le passage d’un convoi d’aide humanitaire. Mais les versions du Hamas et de l’armée israélienne divergent.

Ils étaient venus trouver de la nourriture, de quoi survivre à la guerre et la famine qui les guette, ils auront finalement trouvé la mort. Ce jeudi 29 février dans l’ouest de Gaza, une distribution d’aide alimentaire a tourné au carnage, entre tirs à balles réelles et mouvements de foule meurtriers.

Gaza : la Jordanie et la France mènent une impressionnante opération de largage d’aide humanitaire

Au moins 110 personnes ont été tuées et 760 blessées à l’aube, dans la principale ville de la bande de Gaza, selon le Hamas. Un triste nombre qui s’ajoute à celui déjà désastreux des 30 000 morts depuis le début de la guerre le 7 octobre, un seuil qui a été franchi ce jeudi. Voici ce que l’on sait de cette nouvelle hécatombe.

Une population affamée et désespérée

Pour remettre la situation dans son contexte, rappelons que la population palestinienne, sous le feu nourri israélien, a dû fuir le nord de la bande de Gaza pour se réfugier plus au sud, dont une grande partie à Rafah, point de passage de l’aide humanitaire depuis l’Égypte. Cette aide a été plusieurs fois empêchée de passer sur le territoire par l’armée israélienne, autorisant les camions au compte-gouttes et affamant les habitants.

De leur côté, les réfugiés tentent de survivre. Certains d’entre eux ont raconté à l’AFP avoir été forcés ces derniers jours à manger du fourrage animal ou à abattre des animaux de trait, pour se nourrir. Ainsi, lorsque les camions, au nombre de trente selon Tsahal, 18 selon des témoins cités par BBC News, sont arrivés au niveau de la rue al-Rashid, près du « rond-point de Naplouse », dans l’ouest de Gaza, ils se sont précipités vers eux.

Il s’est alors passé deux choses : le mouvement de foule a créé une bousculade dans laquelle plusieurs personnes sont mortes piétinées, et l’armée israélienne, effrayée par la foule, a commencé à tirer à balles réelles.

Tsahal évoque des mouvements de foule et des « tirs restreints »

Alors que le convoi, qui mesurait plusieurs centaines de mètres, « est entré dans le Nord, des milliers de personnes se sont précipitées sur les camions, ce qui a provoqué une bousculade dans laquelle des dizaines de Gazaouis ont été blessées et tués, certains d’entre eux renversés par des camions », a indiqué un responsable de l’armée israélienne, cité par l’AFP.

Gaza : ce que l’on sait du carnage dans une distribution d’aide alimentaire qui a fait au moins 107 morts (Image satellite du mouvement de foule créé par le passage du convoie humanitaire le 29 février 2024, diffusée par l’armée israélienne)
ALINE MANOUKIAN / AFP Gaza : ce que l’on sait du carnage dans une distribution d’aide alimentaire qui a fait au moins 107 morts (Image satellite du mouvement de foule créé par le passage du convoie humanitaire le 29 février 2024, diffusée par l’armée israélienne)

Malgré tout, toujours selon cette source, le convoi a continué son chemin. Des « dizaines » de civils auraient quand même foncé sur les camions, arrivant à proximité des forces israéliennes sur place qui ont tiré des « coups de semonce » avant « d’ouvrir le feu ». Pour le responsable ces tirs étaient « des tirs restreints (...), il ne s’agissait pas d’un événement massif de notre point de vue ».

Si de son côté, Tashal a fait état de « dizaines de morts et de blessés », bousculés ou piétinés par la foule qui a « encerclé les camions et pillé » les cargaisons, sans faire bilan des tirs, la version du Hamas et des victimes est toute autre.

Une version des faits contradictoire

Ashraf al-Qudra, porte-parole du ministère de la Santé dirigé par le Hamas à Gaza, a imputé la responsabilité aux forces israéliennes de ce qu’il a qualifié de « massacre », selon BBC News. L’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas a, elle aussi « condamné un massacre odieux commis par les forces d’occupation », accusant Israël de chercher à « vider le nord de Gaza de ses habitants ».

Selon un témoin de la scène, cité par le média britannique, la majeure partie des décès aurait plutôt été causée par les camions qui ne se sont pas arrêtés face à la foule et non pas par les tirs israéliens.

Le président américain Joe Biden a indiqué que son pays examinait les « versions contradictoires » de ce drame. Le Conseil de sécurité de l’ONU a annoncé qu’il se réunira à huis clos ce jeudi à 23H15 (heure de Paris) après ce carnage. Selon son porte-parole, le secrétaire général de l’organisation « condamne » ces événements.

« Les tirs par des militaires israéliens contre des civils tentant d’accéder à des denrées alimentaires sont injustifiables », a réagi le ministre français des Affaires étrangères, relevant que « cet événement tragique intervient alors que la situation humanitaire à Gaza relève de l’urgence absolue », avec « un nombre croissant et insupportable de civils palestiniens qui souffrent de faim et de maladie ».

À voir également sur Le HuffPost :

Des pâtisseries pour la Palestine, un moyen délicieux de montrer sa solidarité

La France dénonce une fois de plus la colonisation israélienne en Cisjordanie qui « doit cesser »

VIDÉO - "Je ne voyais pas devant moi et je n'arrivais pas à respirer" : un Gazaoui raconte comment un tir de roquette a détruit son quartier