Bâtard, urine et chou géant : la légende noire de Jésus

Süsskind von Trimberg (à droite), seul poète juif du recueil dit Codex Manesse, porte le couvre-chef imposé aux juifs par la loi dans l’Allemagne du Moyen Âge. Enluminure du XIVe siècle.  - Credit:© akg-images
Süsskind von Trimberg (à droite), seul poète juif du recueil dit Codex Manesse, porte le couvre-chef imposé aux juifs par la loi dans l’Allemagne du Moyen Âge. Enluminure du XIVe siècle. - Credit:© akg-images

« Que ton nom et ton souvenir soient effacés ! », tel est le sens du nom Yeshu. La plume est vengeresse, les anecdotes, choquantes, voire scabreuses : on est au Xe siècle, et les auteurs des différentes versions des Toledot Yeshu, le Livre des engendrements de Jésus, en ont manifestement assez de l'antijudaïsme chrétien. Alors ils compilent des écrits païens et juifs hostiles au Crucifié et à sa mère, les allégations de Celse, mais aussi des passages du Talmud, et élaborent la légende noire de Jésus, alias Yeshu. Le Nazaréen n'est bien sûr jamais nommé, et les aventures qu'on lui prête ressemblent étrangement à celles que l'on attribue au mage gnostique du Ier siècle Simon le Magicien.

Yeshu est donc un bâtard, un truqueur, un faux prophète. Selon les manuscrits – on en connaît au moins sept, que Jean-Pierre Osier a traduits dans L'Évangile du ghetto (Berg international, 1984) –, les versions de sa vie diffèrent. Mais, bien sûr, l'indignité commence dès sa conception. En effet, Marie est soit une femme violée par un voisin alors qu'elle est en état d'impureté menstruelle – et qui se retrouve seule à élever son fils après que son époux officiel s'est exilé à Babylone –, soit une épouse légère qui, séquestrée par son dévot de mari, s'enfuit avec un beau costaud, lequel lui fait plusieurs enfants, dont Yeshu. Celui-ci devra coincer les seins de sa mère dans une porte pour qu'elle lui en dise plus sur les conditions de sa naissance !

Turbulent et insolent

Non co [...] Lire la suite