Avoir des enfants ou pas ? Pour ces femmes qui hésitent, la trentaine est une période d’anxiété

Pour les femmes qui veulent devenir mères, la trentaine est souvent une décennie charnière. Mais pour celles qui ne savent pas si elles veulent des enfants, c’est aussi une période d’anxiété. Trois d’entre elles témoignent pour « Le HuffPost ».

«Je ne crois pas qu’un jour je vais me réveiller en me disant que je suis sûre de vouloir un enfant ou non », explique Alice, la trentaine
Tara Moore / Getty Images «Je ne crois pas qu’un jour je vais me réveiller en me disant que je suis sûre de vouloir un enfant ou non », explique Alice, la trentaine

PARENTALITÉ - Alice a 30 ans et jusqu’il y a quelques années, elle n’envisageait pas d’avoir des enfants. « À 13 ans, quand mes parents me parlaient de leurs futurs petits enfants, je leur disais “calmez-vous, ça n’arrivera jamais”, se souvient-elle. Aujourd’hui, ma position a un peu évolué mais je me pose beaucoup de questions. » Pour elle, la parentalité est un sujet d’incertitude marquée.

Elle n’est pas la seule à se poser la question. Envies contradictoires, anxiété climatique, contexte économique difficile… Nombreux sont celles et ceux qui ne savent pas quoi répondre quand on leur dit « Et les enfants, c’est pour quand ? ». Alors, entre incertitudes et peur des regrets futurs, le sujet peut devenir anxiogène. Particulièrement pour les femmes qui, dans leur trentaine, entendent souvent la même rengaine autour de l’« horloge biologique ». Trois d’entre elles ont confié leurs inquiétudes au HuffPost.

L’angoisse du dérèglement climatique

Quand Alice pense à d’éventuels enfants, elle ressent d’abord une anxiété liée à l’avenir. « La première chose qui me vient en tête, c’est que je suis hyperstressée par la situation politique et environnementale, par la manière dont le monde va évoluer. J’ai l’impression que ceux qui veulent avoir des enfants arrivent à mettre tout ça de côté, mais est-ce que tout le monde y arrive ? »

C’est aussi l’une des sources d’inquiétude de Patricia, 32 ans, qui raconte avoir eu un désir d’enfant très fort dès l’adolescence. Mais à l’âge adulte, le dérèglement climatique a commencé à beaucoup l’inquiéter. « Je me disais “ça sent le roussi, est-ce bien raisonnable de vouloir mettre un enfant dans un monde qui n’a pas les ressources suffisantes pour qu’il y vive sereinement ?” Je suis de tempérament anxieux, et assurer la survie et le bien-être d’une autre personne que moi dans des conditions difficiles, c’est compliqué. »

« Dans quel contexte je serai prête à accueillir un enfant ? »

Les conditions économiques (notamment la crise du logement) font aussi partie des questionnements immédiats des deux trentenaires. « Mon salaire actuel ne me permet pas d’avoir un appart avec une chambre en plus, par exemple. J’ai déjà du mal à finir mes mois dans le positif, avec quelqu’un à gérer en plus, ça serait un peu too much », explique Alice. Patricia abonde en son sens : « Je vois mes sœurs qui gagnent très bien leur vie et qui sont en stress financier parce que les enfants coûtent cher. Moi, je ne gagne pas énormément et je me dis qu’à mon échelle, la galère serait encore plus forte. »

Mais pour elle, ce n’est qu’une raison parmi d’autres. « On a beaucoup parlé des violences gynécologiques et obstétricales, j’ai écouté beaucoup de podcasts sur les accouchements et j’ai l’impression qu’une fois sur deux, ça se passe mal. La grossesse me fait très peur. »

Car si les points soulevés jusqu’ici sont sociétaux, les questionnements des personnes interrogées touchent aussi au quotidien de parent. « Je suis attachée à mon temps libre, j’aime bien dormir… J’ai peur de ne pas pouvoir changer de métier si j’en ai besoin, ou de déménager dans un endroit où j’ai envie parce qu’il n’y a pas d’école à proximité », explique Patricia.

Pour d’autres, c’est une question de santé mentale. C’est le cas de Sophie, 35 ans, qui explique : « Pendant longtemps, j’ai eu des TOCS et des soucis d’anxiété et j’ai très peur qu’une éventuelle maternité redéclenche ça. J’ai suivi une thérapie et j’ai créé un environnement autour de moi, dans lequel je me sens bien et heureuse. J’ai peur que ça redéclenche des dynamiques que je ne veux pas revoir, et que ça ruine mon expérience de la parentalité. »

La pression de l’âge

Pour toutes les interrogées, la trentaine est un âge « charnière » pour ces questionnements. « Si je pouvais avoir des enfants dans 20 ans, je ne m’inquiéterais pas du tout, explique Patricia. Mais l’idée d’horloge biologique me fait beaucoup stresser, en me disant que bientôt, je n’aurai plus le choix. Et le fait que tout le monde me dise que ça me va super bien d’avoir un enfant dans les bras, ça n’aide pas. J’ai peur de passer à côté de quelque chose. »

Un sentiment que Sophie, 35 ans, rejoint pleinement. « Quand j’étais célibataire, je me disais “on verra si ça arrive”. Mais depuis peu, je suis en couple et je vis cette pression de l’âge un peu plus fortement, ça se concrétise. Je me demande s’il faut que je me mette une pression et que je le fasse, ou si je peux encore attendre. » Alors que faire, quand on n’a toujours pas trouvé de réponse ? « J’ai commencé à me renseigner pour congeler mes ovocytes, explique Alice. Comme ça, si dans plusieurs années, j’ai une certitude et que je veux un enfant, en couple ou toute seule, je pourrai en avoir la possibilité. »

Les interrogées l’expliquent, sans sentiment « d’évidence » vis-à-vis de la parentalité, elles doivent mettre dans la balance leurs doutes et leur peur de « passer à côté de quelque chose ». « Là, je suis heureuse dans ma vie, mais je sais que je suis à un moment charnière, confie Sophie. J’ai peur d’être malheureuse si je ne le fais pas, mais je peux aussi être malheureuse si je le fais ». Alice, quant à elle, ne pense pas qu’elle trouvera un jour de réponse à la question. « Je ne crois pas qu’un jour je vais me réveiller en disant “je suis sûre que je veux avoir un enfant”. L’incertitude, elle vient surtout de la peur d’avoir des regrets plus tard. »

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