Avion bloqué dans la Marne : à l’aéroport de Vatry, un dispositif inédit pour auditionner les 300 passagers

L’Airbus A340 immobilisé à l’aéroport de Vatry, dans le nord-est de la France, en raison de soupçons de « trafic d’êtres humains ».
FRANCOIS NASCIMBENI / AFP L’Airbus A340 immobilisé à l’aéroport de Vatry, dans le nord-est de la France, en raison de soupçons de « trafic d’êtres humains ».

FAITS-DIVERS - D’abord transformé en zone de confinement, l’aéroport de Vitry prend des allures de tribunal. Les quelque 300 passagers de l’Airbus A340 Dubaï-Managua, arrêtés en France par les autorités pour des soupçons de traite d’êtres humains depuis trois jours, sont entendus par la justice française ce dimanche 24 décembre. Des audiences exceptionnelles, qui ont commencé à 9h devant un juge des libertés et de la détention (JLD), et doivent se poursuivre jusqu’au jour de Noël ce lundi 25 décembre.

Les 303 passagers, tous de nationalité indienne, sont confinés depuis jeudi soir au sein du hall d’accueil de l’aéroport, où ont été acheminés des lits de camp, des repas et des toilettes supplémentaires. Cependant, selon la loi la police aux frontières ne peut pas les retenir plus de quatre jours. Cette durée peut être prolongée par JLD de huit jours supplémentaires, puis encore doubler cette durée « à titre exceptionnelle ».

• Obtenir 8 jours supplémentaires pour enquêter

La Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) mène déjà une enquête depuis deux jours, suite à un « signalement anonyme », selon lequel des passagers étaient « susceptibles d’être victimes de traite des êtres humains » en bande organisée. Ainsi, ce samedi, l’identité des membres de l’équipage et des passagers ont été vérifiés et des premières questions leur ont été posées.

La juge des libertés et de la détention doit permettre de poursuivre ce travail : un dispositif « complètement inédit » a donc été mis en place en urgence, a indiqué François Procureur, bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Châlons-en-Champagne, auprès de BFMTV et France Info. Au total, quatre audiences ont été mises en place, qui mobilisent au moins sept avocats, quatre juges de libertés, quatre greffiers. Il a aussi fallu trouver des interprètes en hindi, qui seront finalement disponibles par téléphone.

Ces audiences sont organisées dans un bâtiment voisin de ce hall, autour duquel ont été installées des bâches blanches pour éviter les regards indiscrets, a constaté une journaliste de l’AFP.

• Demande d’asile et gardes à vues

Selon les informations communiquées par le parquet de Paris, deux gardes à vue commencées vendredi ont par ailleurs « été prolongées samedi soir, pour une durée maximale de 48 heures ». Cela doit permettre de vérifier si le rôle de ces deux personnes « a pu être différent de celui des autres dans ce transport, et dans quelles conditions et avec quel objectif », a-t-il ajouté sans donner plus de précisions.

Parmi ces passagers figurent 11 mineurs non accompagnés, selon le parquet. Leur âge « va d’un bébé de 21 mois à un adolescent de 17 ans ». Six d’entre eux ont exprimé le souhait de déposer une demande d’asile en France, a indiqué à l’AFP Me Aurore Opyrchal, mandatée par le barreau de Châlons-en-Champagne pour en représenter certains.

Selon une source proche du dossier cités par l’AFP, ces Indiens, probablement des travailleurs aux Emirats arabes unis, pourraient avoir planifié de se rendre en Amérique centrale afin de tenter ensuite d’entrer illégalement aux États-Unis ou au Canada.

• La compagnie aérienne prévoit de porter plainte

Ce samedi, les trente membres d’équipage, concernés soit par la liaison Dubaï-Vatry, soit par le trajet Vatry-Managua, ont été interrogés puis « autorisés à repartir librement », a assuré Liliana Bakayoko, l’avocate de la compagnie aérienne.

Cette dernière a également indiqué que Legend Airlines n’avait pas vendu les billets du vol directement aux passagers, mais à un client non-européen. La compagnie avait déjà effectué « quelques vols » pour le même client, également du Nicaragua aux Émirats arabes unis.

L’entreprise compte « se porter partie civile si des poursuites sont commencées par le ministère public, ou porter plainte » dans le cas contraire. D’après le site spécialisé Flightradar, Legend Airlines est une petite compagnie dont la flotte est composée de quatre avions, dont deux A340-313.

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