Avion bloqué à Vatry : les passagers indiens coincés dans la Marne devraient repartir ce 25 décembre

Avion bloqué dans la Marne : les passagers coincés à l’aéroport de Vatry devraient repartir ce 25 janvier (Photo de l’Airbus A340 bloqué à l’aéroport de Vatry le 23 décembre)
FRANCOIS NASCIMBENI / AFP Avion bloqué dans la Marne : les passagers coincés à l’aéroport de Vatry devraient repartir ce 25 janvier (Photo de l’Airbus A340 bloqué à l’aéroport de Vatry le 23 décembre)

FAITS DIVERS - La fin de l’attente pour les passagers de l’avion bloqué à Vatry ? Les autorités espèrent obtenir ce lundi 25 décembre « au plus tard » les autorisations pour réacheminer en avion les 303 ressortissants indiens confinés depuis jeudi soir dans le terminal de l’aéroport de la Marne, sur fond de soupçons de traite d’êtres humains, autour desquels le flou demeure.

Le parquet de Paris a indiqué que la justice avait autorisé l’avion à repartir, une décision qui « permet d’envisager le réacheminement des passagers placés en zone d’attente » dans l’aéroport, a ensuite annoncé la préfecture dans un communiqué.

« Atteinte disproportionnée aux droits de la personne »

L’avion « devrait partir dans la journée », a indiqué la préfecture de la Marne à l’AFP. Il doit prendre la direction de Bombay (Inde), a précisé Liliana Bakayoko, l’avocate de la compagnie aérienne, Legend Airlines. « Nous avons obtenu ce matin l’autorisation de vol de la part des autorités indiennes mais nous sommes encore dans l’attente du créneau horaire. »

Deux des passagers ont été présentés à un juge en vue de leur mise en examen ce lundi. Ces deux hommes, nés en 2000 et 1984, avaient été placés en garde à vue vendredi, soupçonnés d’avoir joué un rôle dans ce qui pourrait être une filière d’immigration clandestine. Le parquet a demandé leur placement en détention provisoire.

Une information judiciaire pour aide à l’entrée et au séjour irrégulier d’étrangers sur le territoire en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs a été ouverte par la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco), a précisé le parquet de Paris.

Le départ des passagers ce lundi est d’autant plus probable que la justice a annulé dimanche, pour trois d’entre eux, la procédure de maintien depuis trois jours dans le hall de l’aéroport. Les douanes ont, dans la foulée, renoncé à la procédure pour les autres passagers.

Il apparaît notamment, selon une ordonnance d’une juge des libertés et de la détention (JLD) consultée par l’AFP, que les passagers ont été retenus par les forces de l’ordre pendant plusieurs heures « sans en connaître les motifs » en début de procédure et sans être informés de leurs droits « dans un délai raisonnable », ce qui constitue « une atteinte disproportionnée aux droits de la personne ».

« Très mécontents »

Mais les 301 passagers ne monteront vraisemblablement pas tous à bord, puisque les demandeurs d’asile, 12 dimanche en fin d’après-midi selon une source proche du dossier, devraient être transférés vers une autre zone d’attente. Parmi ces demandeurs d’asile figurent cinq des onze mineurs non-accompagnés (MNA) passagers du vol, a indiqué l’Association accompagnement éducatif de la Marne, nommée administratrice ad hoc de ces mineurs.

En outre, selon Liliana Bakayoko, « un certain nombre de personnes ne souhaitent pas partir vers l’Inde, ils sont très mécontents, ils souhaitent aller au Nicaragua », où les premiers Indiens auditionnés dimanche avaient dit vouloir se rendre pour du tourisme.

Mobilisation après un « signalement anonyme »

L’Airbus A340 de ces 303 Indiens, qui faisait la liaison entre Dubaï (Émirats arabes unis) et Managua, capitale du Nicaragua, s’était posé jeudi après-midi à Vatry, à 150 km de Paris, pour faire le plein. Mais cette simple escale technique s’est transformée en longue immobilisation après un « signalement anonyme » selon lequel des passagers étaient « susceptibles d’être victimes de traite des êtres humains » en bande organisée, avait indiqué le parquet de Paris vendredi.

Selon une source proche du dossier, ces Indiens, probablement des travailleurs aux Émirats arabes unis, pourraient avoir planifié de se rendre en Amérique centrale afin de tenter ensuite d’entrer illégalement aux États-Unis ou au Canada. Parmi eux figurent onze mineurs non accompagnés, selon le parquet de Paris, et douze demandes d’asile ont par ailleurs été déposées, a indiqué une source proche du dossier dimanche soir.

Deux personnes en garde à vue

L’enquête, menée par la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco), vise à « vérifier si des éléments viendraient corroborer » les soupçons de traite d’êtres humains, selon le parquet. Deux gardes à vue commencées vendredi étaient toujours en cours dimanche. Elles visent à « vérifier » si le rôle de ces deux personnes « a pu être différent de celui des autres ».

« On est dans une affaire qui peut être très grave mais, à l’heure qu’il est, on est encore un peu dans l’incertitude », a souligné sur BFMTV Patrick Baudouin, président de la LDH. « Est-ce que c’est une erreur monumentale qui a été commise, une dénonciation qui finalement s’avérerait totalement inappropriée, ou est-ce que derrière tout cela il y a un vrai délit, un crime ? », s’est-il interrogé.

La préfecture de la Marne précise que des lits individuels, des toilettes et des douches ont été installés dans la zone d’attente de l’aéroport et qu’une « zone “famille”, pour assurer l’intimité parent-enfant », a été mise en place. Mais le bâtonnier François Procureur s’est ému de « problèmes d’exiguïté et de mauvaises conditions de vie » dans cette zone créée par arrêté préfectoral jeudi soir.

« Est-ce qu’on est prêt pour ce type d’affaires ? »

La France doit « passer à la vitesse supérieure » dans le repérage et l’accompagnement des victimes de traite d’êtres humains, a estimé dimanche un collectif d’associations. « On a essayé de mettre de grands moyens, mais ils n’étaient peut-être pas adaptés, avec ce tribunal dans l’aéroport. On peut se poser la question : est-ce qu’on est prêt » pour ce type d’affaires ?, s’est interrogée auprès de l’AFP Geneviève Colas, coordinatrice pour le Secours catholique-Caritas du Collectif contre la traite des êtres humains.

« On ne sait pas si c’est de la traite d’êtres humains, du trafic de migrants ou ni l’un, ni l’autre… Mais on a quand même gardé dans un aéroport, pendant trois nuits et trois jours, 303 personnes qui étaient en escale, des hommes, des femmes et des enfants. C’est surprenant », a-t-elle observé.

La France, qui vient de publier un nouveau plan national de lutte contre la traite des êtres humains (prostitution, travail ou mendicité forcés…), « n’a pas de mécanisme national pour l’identification et l’accompagnement des victimes », a regretté Geneviève Colas.

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