« Avant que les flammes ne s’éteignent » avec Camélia Jordana, un drame fictif qui paraît tristement familier

Camélia Jordana, ici dans « Avant que les flammes ne s’éteignent » de Mehdi Fikri.
Bac Films Camélia Jordana, ici dans « Avant que les flammes ne s’éteignent » de Mehdi Fikri.

CINÉMA - Comme un air de déjà-vu. Et ce, pour une bonne raison. Camélia Jordana a fait son retour au cinéma avec l’arrivée sur grand écran du premier film de l’ex-journaliste et responsable des pages police justice de L’Humanité, Mehdi Fikri. Le titre du long-métrage sorti mercredi 15 novembre : Avant que les flammes ne s’éteignent.

L’actrice, ici, s’appelle Malika, une femme dans la trentaine dont le jeune frère est mort à la suite d’une violente interpellation. Dans le quartier où il vivait, la colère éclate sur fond de révoltes et de voitures brûlées. Malika le sait : il faut agir vite, avant que cet épisode dramatique ne retombe dans l’oubli.

Sur les conseils de militants contre les violences policières (l’un d’eux est campé par Samir Guesmi), Malika, entourée de son autre frère (Sofiane Zermani) et de sa sœur (Sonia Faïdi), se lance dans un combat judiciaire. Elle se bat pour qu’un procès ait lieu, au risque de mettre en péril l’équilibre au sein de sa famille alors en proie au deuil, son couple, l’éducation de son fils encore bébé, et son travail sur les marchés.

Découvrez ci-dessous la bande-annonce :

Si ces fragments de la vie de notre héroïne sont purement fictionnels, son combat, lui, rappelle forcément celui d’Assa Traoré et du collectif Justice pour Adama, lancé après la mort de ce dernier à l’âge de 24 ans à la gendarmerie de Persan, dans le Val-d’Oise, après son interpellation.

Une histoire, cinq drames de violences policières

Mehdi Fikri s’est bien inspiré de cette affaire très médiatisée, mais pas seulement. Il a pioché dans quatre autres dossiers, à savoir les morts de Lamine Dieng (Paris, 2007), d’Ali Ziri (Argenteuil, 2009), de Wissam El-Yamni (Clermont-Ferrand, 2012) et d’Amine Bentoussi (Paris, 2012). « Aucun élément du film n’est spécifique à une seule famille », nous précise le réalisateur.

Si son choix s’est porté sur ces cinq affaires, c’est parce qu’il a travaillé dessus à l’époque où il était encore journaliste. Il lui était inenvisageable de n’en garder qu’une seule. « Dans mon film, Karim (le jeune homme tué, ndlr) n’est pas un ange. Il était hors de question de raconter ça à partir d’une famille existante », explique, par exemple, le cinéaste.

Autre argument : ne pas mettre la lumière sur une seule affaire. « La starisation de certaines familles est légitime, tant le travail qu’elles ont mené pour dénoncer les violences policières a fait avancer les choses. En revanche, une poignée de familles dissimule les drames et tragédies de nombreuses autres », constate-t-il. Et de rappeler : « Beaucoup de familles ne créent pas de ’momentum politique’ quand il le faut. »

« Ne plus invisibiliser » les familles

Loin du journalisme, domaine « des mots et des faits », Mehdi Fikri, déjà à l’œuvre en tant que scénariste sur les séries Hippocrate, Miskina et Ourika, préfère désormais le cinéma, qui « permet de témoigner d’une réalité du monde profond et sentimental ».

Dans Avant que les flammes ne s’éteignent, la fiction ne lui permet pas seulement de « montrer l’aspect systémique large » des violences policières. Il espère qu’elle permet aussi de « faire rentrer ces familles - qui font partie de notre histoire peu importe notre avis sur la question - dans le roman national » et « de ne plus les invisibiliser ».

Avant d’ajouter : « C’est une histoire qui se répète. » Des mots qui font écho au générique de fin, un montage de vidéos d’actualité illustrant la lutte contre les violences policières menée par des familles de victimes. Elles vont des années 1980 jusqu’en 2023, comme en témoignent des images de la mère de Nahel Merzouk au milieu de la foule lors d’une mobilisation après la mort de son fils. Une manière, nous dit Mehdi Fikri, de « rendre hommage à la réalité et de ne pas se cacher derrière la fiction ».

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