Avancées militaires, débats sur les aides... La Russie est-elle en train de gagner la guerre en Ukraine ?

Après l'échec de la contre-offensive de printemps, les forces ukrainiennes sont désormais dans une position défensive, tandis que Kiev attend des promesses d'aides occidentales. La Russie revendique, elle, des avancées, qui restent toutefois très limitées.

Les forces russes multiplient les attaques tout au long du front et revendiquent des gains territoriaux en Ukraine. Ces assauts interviennent au moment où la pérennité de l'aide militaire occidentale à l'Ukraine est en question, que ce soit aux États-Unis et au sein de l'Europe.

"Pour la première fois depuis qu'il a envahi l'Ukraine le 24 février 2022, Vladimir Poutine a l'air de pouvoir gagner la guerre", écrivait en première page de son édition du 2 décembre le magazine américain The Economist.

Après l'échec de la grande contre-offensive ukrainienne lancée au printemps dernier, les forces de Kiev semblent enlisées, tandis que Moscou cherche à saper la conviction des alliés occidentaux que l'Ukraine peut gagner.

Les bombardements se poursuivent, voire s'intensifient

Une attaque de missiles russes a ciblé Kiev tôt ce mercredi 13 décembre, blessant une cinquantaine de personnes, selon l'administration militaire locale. Il s'agit de la deuxième attaque contre la capitale ukrainienne en l'espace d'une semaine. Au sud, Odessa a aussi été la cible d'une attaque russe, a écrit sur Telegram le maire de la ville.

Le pays continue d'être massivement frappé par la Russie. "C'est même un peu plus intense que précédemment, c'est ce qui est inquiétant", exprime à BFMTV.com le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense.

Comme en témoignent les récentes attaques, les forces russes ne se contentent pas d'attaquer la ligne de front. "Moscou ne change pas de stratégie", explique le spécialiste.

En outre, alors que l'hiver est là, la menace plane à nouveau sur les infrastructures énergétiques. L'an dernier, la Russie avait multiplié les frappes, destinées à plonger dans le froid et dans le noir les populations civiles. Si l'Ukraine est mieux préparée, le danger reste majeur.

De plus, Moscou est aussi suspecté d'être à l'origine d'un "puissant" piratage informatique qui a paralysé le premier opérateur mobile ukrainien Kyivstar, selon les services de sécurité de Kiev. Les sirènes d'alerte aérienne ont aussi cessé de fonctionner dans une dizaine de localités.

Des avancées russes "limitées"

"La situation est compliquée sur le terrain : aujourd'hui, l'initiative est plutôt du côté russe quand les forces ukrainiennes sont plutôt sur la défensive", indique Jérôme Pellistrandi. "La contre-offensive est finie, désormais l'Ukraine s'oriente vers une stratégie défensive, l'objectif est de maintenir la ligne de front", complète-t-il.

Ces derniers jours, l'armée russe a revendiqué des avancées "significatives" dans la région de Zaporijia, notamment vers Novopokrovka, une localité prise en août par les forces ukrainiennes, qui espéraient une percée dans la zone pour pousser vers le Sud et la mer d'Azov.

Les Russes ont également lancé une "offensive massive" autour d'Avdïvka et Marïnka, points chauds du front oriental, a déclaré le commandant ukrainien de la zone, assurant que ses troupes "tenaient fermement" leurs positions.

Néanmoins, Jérôme Pellistrandi affirme qu'il ne s'agit pas là "d'évolutions majeures". "Ce sont des progrès très limités", précise-t-il.

Bakhmout, Koupiansk... De son côté, l'état-major de l'armée ukrainienne affirme que ses troupes repoussent des attaques sur une grande partie du front.

Un "narratif russe" contre le soutien occidental

Les avancées russes se font toutefois à un fort coût puisque, selon une évaluation des services de renseignements américains appuyée par le quai d'Orsay, 315 000 soldats russes ont été blessés ou tués depuis le 24 février 2022. L'actuelle poussée dans le sud et l'est de l'Ukraine depuis octobre a coûté à Moscou quelque 13 000 soldats et plus de 220 véhicules.

Moscou "semble croire qu'une impasse militaire pendant l'hiver va saper le soutien occidental à l'Ukraine", la Russie est donc "déterminée à pousser" sur tout le front, a averti la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Adrienne Watson.

"Il y a un narratif russe de démoraliser les Occidentaux en montrant qu'ils sont en train de gagner la guerre", analyse le général Jérôme Pellistrandi.

La question vitale des aides occidentales

À ce titre, Joe Biden a lancé, en présence de Volodymyr Zelensky aux États-Unis ce mardi, que Vladimir Poutine "comptait" sur le fait que l'aide américaine à l'Ukraine s'arrête. Le locataire de la Maison Blanche avait déjà estimé que couper le flux d'armement et d'aide financière serait faire à la Russie le "plus beau cadeau de Noël".

Le Kremlin a lui estimé le même jour que toute nouvelle aide américaine était vouée au "fiasco". De nouvelles enveloppes sont actuellement bloquées par des dissensions tant à Bruxelles qu'à Washington.

"Bien sûr, on ne peut pas gagner sans aide", a dit Volodymyr Zelensky ce mercredi. "Mais on ne peut pas perdre parce que la seule chose qu'on a, c'est son pays".

L'approbation d'une aide européenne de 50 milliards d'euros, sous forme de dons et de prêts, en faveur de l'Ukraine sera au menu d'un sommet européen jeudi et vendredi. "Une partie de l'avenir de l'Ukraine se joue à Bruxelles", confie Jérôme Pellistrandi.

En tout cas, selon le militaire, dans les conditions actuelles, les forces de Kiev ne seront pas en mesure de relancer une offensive majeure après l'hiver. "Le moral reste élevé car c'est pour eux un conflit existentiel", conclut-il.

Article original publié sur BFMTV.com

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