Au Sénégal, le report de la présidentielle entraîne des manifestations et une grande confusion

Des policiers sénégalais se tiennent en formation sur une route bloquée par des barricades enflammées lors de manifestations appelées par les partis d’opposition à Dakar, le 4 février 2024.
SEYLLOU / AFP Des policiers sénégalais se tiennent en formation sur une route bloquée par des barricades enflammées lors de manifestations appelées par les partis d’opposition à Dakar, le 4 février 2024.

INTERNATIONAL - De vives tensions à Dakar. Après que le président sénégalais Macky Sall a annoncé ce samedi avoir signé un décret ajournant la présidentielle du 25 février, la colère s’est exprimée dans les rues. Un tollé qui fait craindre une période de troubles dans un pays réputé être un îlot de stabilité en Afrique de l’Ouest. C’est la première fois depuis 1963 qu’une présidentielle au suffrage universel direct est reportée au Sénégal, un pays qui n’a jamais connu de coup d’État, une rareté sur le continent.

Ce lundi 5 février, les manifestations ne faiblissent pas dans à Dakar à l’appel de l’opposition, tandis que les députés ont commencé l’examen d’une loi pour tenter d’encadrer l’annonce présidentielle par des règles strictes. Le HuffPost fait le point sur la situation.

• Violents affrontements entre force de l’ordre et opposition

Une nuée de gaz lacrymogène s’est élevée ce lundi matin devant l’Assemblée nationale à Dakar. Les forces de sécurité ont lancé deux grenades pour faire partir un groupe de quelques dizaines de personnes qui refusaient d’obéir à leurs injonctions et qui se sont repliées plus loin en scandant « Macky Sall dictateur ».

Cette scène fait suite aux heurts qui ont éclaté dimanche dans la capitale, au cours desquels les gendarmes ont déclenché plusieurs grenades lacrymogènes contre des centaines d’hommes et de femmes de tous âges qui étaient venus manifester. Les gendarmes se sont ensuite déployés à pied ou en pick-up dans les quartiers adjacents, à la poursuite des manifestants en fuite. Ils ont alors essuyé des jets de pierres.

Parmi les nombreuses arrestations recensées, l’opposante et ancienne Première ministre Aminata Touré, farouche adversaire de l’ajournement, a été retenue lors d’un de ces rassemblements, a indiqué à l’AFP le député d’opposition Guy Marius Sagna. Un autre candidat, Daouda Ndiaye, a posté sur les réseaux sociaux un message où il assure avoir été « brutalisé » par les forces de l’ordre.

• Internet coupé, la télévision suspendue

Les autorités sénégalaises ont suspendu dimanche le signal d’une télévision privée, coupable selon elles d’« incitation à la violence » à travers ses images sur les protestations contre le report de la présidentielle, a dit à l’AFP un responsable du ministère de la Communication.

L’accès à l’Internet mobile était coupé ce lundi matin dans plusieurs quartiers de Dakar lundi. Le gouvernement avait déjà suspendu l’accès en juin 2023, dans un contexte de crise politique. La mesure est devenue ailleurs un moyen de riposte courant pour endiguer la mobilisation et la communication via les réseaux sociaux.

• L’Union Africaine appelle à la « concertation » et au « dialogue »

Face à ces événements, l’Union africaine a appelé ce lundi 5 février les Sénégalais à régler leur « différend politique par la concertation, l’entente et le dialogue ». Dans un communiqué publié sur X (ex-Twitter), le président de la Commission de l’Union Africaine Moussa Faki affirme avoir « appris le report des élections présidentielles en République du Sénégal avec préoccupation tant la situation politique dans ce pays où le modèle démocratique a toujours été salué avec haute appréciation ne saurait laisser aucun Africain indifférent ».

En conséquence, Moussa Faki appelle « les autorités nationales compétentes à organiser dans les meilleurs délais les élections, dans la transparence, la paix et la concorde nationale ».

• Projet de loi

Pour tenter d’éviter une dérive totalitaire, les députés ont commencé ce lundi l’examen d’une proposition de loi constitutionnelle déposée en urgence par les partisans de Karim Wade, figure de l’opposition et fils de l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012). Le texte propose reporter la présidentielle de « six mois maximum ».

L’approbation requiert une majorité des trois cinquièmes des 165 députés. Elle n’est pas acquise. Le vote est prévu dans la journée. Adoption ou rejet, la situation demeurera hautement volatile.

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