Au Royaume-Uni, chaos au Parlement lors d’un débat sur une motion concernant la guerre à Gaza

Mercredi 21 février, les discussions autour d’un amendement du parti travailliste concernant le conflit entre Israël et le Hamas ont provoqué de vifs débats au Parlement britannique.
Reuters Mercredi 21 février, les discussions autour d’un amendement du parti travailliste concernant le conflit entre Israël et le Hamas ont provoqué de vifs débats au Parlement britannique.

GAZA - Un énorme brouhaha. La Chambre des Communes britannique a connu des débats houleux et des scènes chaotiques, mercredi 21 février, autour d’une motion appelant à un cessez-le-feu à Gaza, fragilisant considérablement la position du président de la Chambre Lindsay Hoyle.

Vertement critiqué, le « speaker » fait l’objet d’appels à la démission après avoir permis, contrairement aux usages, à l’opposition travailliste de déposer un amendement sur une motion d’une autre formation d’opposition, le parti indépendantiste écossais SNP, alors que la séance était censée être dédiée à ce dernier.

La motion du Scottish national party appelait à un « cessez-le-feu immédiat » et exigeait la « fin de la punition collective contre le peuple palestinien », tandis qu’un amendement du Labour appelait à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat », et à un processus diplomatique pour parvenir à une solution à deux États et une paix durable.

Pour le parti travailliste de Keir Starmer, donné favori dans les sondages en vue des prochaines élections, cette démarche a été interprétée comme visant à éviter de raviver les divisions au sein du parti sur la question.

Le SNP dénonce du « mépris » pour son parti

Manifestement bouleversé et face à un Parlement extrêmement agité, le « speaker » Lindsay Hoyle a fini par présenter ses excuses pour la manière dont les choses avaient tourné, après avoir expliqué que sa démarche initiale visait à permettre un débat plus large.

En définitive, l’amendement du Labour a été adopté sans vote formel, dans des conditions là aussi contestées.

Le chef de file du SNP à Westminster, Stephen Flynn, a dénoncé le « mépris » dont son parti avait selon lui fait l’objet, tandis que des appels à la démission ont retenti des deux côtés de la Chambre des Communes à l’adresse du « speaker » Lindsay Hoyle, à ce poste depuis fin 2019.

Parmi les députés, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer le fait que cette affaire ait tourné au psychodrame à Westminster plutôt que de se consacrer à la crise au Moyen-Orient.

Un sujet sensible chez les travaillistes

Depuis son arrivée à la tête du parti travailliste en avril 2020, Keir Starmer s’est efforcé de lutter contre l’antisémitisme que son prédécesseur Jeremy Corbyn est accusé d’avoir laissé prospérer au sein du parti.

Plusieurs polémiques ont émergé depuis le début de la guerre entre le Hamas et Israël. Le 13 février, le parti travailliste avait suspendu l’ancien député et candidat Graham Jones en attendant l’issue d’une enquête sur des propos hostiles à Israël tenus lors d’une réunion à l’automne dernier. Il lui est notamment reproché d’avoir déclaré que les Britanniques qui rejoignent l’armée israélienne devraient être « enfermés ».

Un autre candidat, Azhar Ali, s’est vu retirer son investiture en vue d’une élection partielle le 29 février dans la circonscription de Rochdale, dans le Nord-Ouest de l’Angleterre. Lors de la même réunion, il avait accusé Israël d’avoir délibérément permis au Hamas de l’attaquer sur son sol le 7 octobre, afin de justifier ensuite une invasion de la bande de Gaza.

Il avait présenté des excuses mais avait perdu le soutien du parti travailliste après l’émergence d’autres propos, où il accusait « les médias et certaines personnes issues des quartiers juifs travaillant dans les médias » d’avoir agi en faveur de la suspension d’Andy McDonald, un ancien député pro palestinien du Labour.

« Le jour et la nuit » avec Jeremy Corbyn

Malgré les « progrès » effectués par le Labour dans la lutte contre l’antisémitisme, ces affaires « remettent dans l’esprit des électeurs une période particulièrement sombre dans l’histoire du Labour », observe Sophie Stowers, chercheuse au cercle de réflexion The UK in a changing Europe.

Elles mettent au premier plan l’« indécision » dont Keir Starmer est régulièrement accusé et altère son image pourtant par ailleurs « solide » dans la lutte contre l’antisémitisme, explique-t-elle à l’AFP.

« L’idée selon laquelle nous serions toujours dans les mauvais jours de l’ère Corbyn est vraiment ridicule », a jugé mercredi matin sur la BBC Mike Katz, président du Jewish Labour Movement. C’est « le jour et la nuit », a-t-il estimé, citant notamment la manière dont le mouvement et ses membres sont traités au sein du parti. « Nous devons redoubler d’efforts pour montrer qu’il faut toujours être vigilants », a-t-il toutefois ajouté : « l’antisémitisme a le sommeil léger ».

« Restaurer, maintenir la confiance de la communauté juive, de toute communauté, est un processus constant, Keir Starmer en est profondément conscient », a déclaré de son côté le porte-parole du parti pour les questions de défense, John Healey, sur la chaîne Sky News.

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