Au moins 89 Russes tués en Ukraine: à quelle réplique s'attendre de la part de Moscou?

Une déclaration rare de la part de la Russie. Moscou a reconnu lundi ses plus lourdes pertes militaires en une seule attaque en Ukraine avec la mort d'au moins 89 soldats à la suite d'une frappe de l'armée de Kiev.

Ce bombardement s'est produit sur Makiïvka, une ville située en territoire occupé de longue date par Moscou, à l'est de celle de Donetsk, l'un des bastions aux mains des séparatistes prorusses depuis leur conflit avec Kiev débuté en 2014. Selon le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, qui n'a pas donné de date pour cette frappe, quatre missiles ont visé "un centre de déploiement provisoire" de l'armée. Deux autres roquettes ont été abattues, selon lui.

Cette annonce est exceptionnelle: il s'agit non seulement du plus lourd bilan en une seule attaque admis par Moscou depuis le début de son invasion en février, mais elle représente aussi la première communication sur des pertes militaires depuis septembre, lorsque le ministre de la Défense Sergueï Choïgou avait évoqué 5937 morts dans les rangs de l'armée russe.

Chiffres différents côté ukrainien

L'Ukraine, qui a reconnu avoir mené cette frappe en donnant la date du 31 décembre, avant le Nouvel An, a de son côté avancé des informations contradictoires sur les pertes de l'armée russe à Makiïvka.

Le département des communications stratégiques de l'armée ukrainienne a évoqué dimanche sur Telegram un bilan de 400 morts et de 300 blessés. L'état-major a quant à lui indiqué ne pas avoir d'informations définitives sur le nombre de victimes russes. Par ailleurs "jusqu'à 10" le nombre de véhicules militaires "de tous types" ont été détruits dans ce bombardement selon Kiev.

"Les pertes en termes de personnel pour les occupants est en train d'être précisé", a-t-il ajouté dans un message sur Facebook lundi.

Des critiques sur le commandement militaire russe

Dans une note publiée ce lundi, l'Institut américain pour l'étude de la guerre, un groupe de réflexion, rapporte que la "vague reconnaissance de l'attaque" par le ministère russe de la Défense a "suscité des critiques à l'égard du commandement militaire russe", notamment parmi des blogueurs militaires.

"Malgré plusieurs mois de guerre, certaines conclusions n'ont toujours pas été tirées", constate ainsi le blogueur Boris Rojine, proche des milieux séparatistes ukrainiens, fustigeant "l'incompétence" des hauts gradés de l'armée russe. Il estime notamment que le personnel militaire russe, proche de la ligne de front, n'était pas assez dispersé à Makiïvka.

"La meilleure réaction à la tragédie de Makiïvka sera non seulement la recherche des responsables, mais surtout des frappes de représailles efficaces et systématiques", ajoute le blogueur sur sa chaîne Telegram.

Vers des représailles russes?

De telles pertes peuvent-elles faire craindre aux Ukrainiens d'importantes représailles? Selon le ministère britannique de la Défense, "à la mi-décembre, les forces militaires russes et les forces mandataires de Wagner ont probablement augmenté la fréquence de leurs assauts d'infanterie autour de la ville de Bakhmout, dans l'oblast de Donetsk", un peu au-dessus de Makiïvka.

Le ministère britannique de la Défense estime dans sa note de renseignement de ce mardi que beaucoup des opérations engagées par la Russie autour de Bakhmout ces dernières semaines "ont été mal soutenues", faisant face à "d'importants renforts" ukrainiens.

"Les deux parties ont subi de lourdes pertes" et "il est peu probable que la Russie réalise une percée significative près de Bakhmout dans les semaines à venir", affirme-t-il.

Pour autant, l'Ukraine redoute une montée en puissance, au moins numérique, des forces russes dans les semaines ou les mois à venir. Le Centre pour la résistance ukrainienne, créé par les forces spéciales de l'armée ukrainienne, affirme dans une publication du 2 janvier qu'"au début de 2023, l'ennemi prévoit une nouvelle vague de mobilisation, qui touchera les habitants du Sud occupé temporairement". En septembre, le président russe, Vladimir Poutine, a décrété la mobilisation d'environ 300.000 réservistes.

Le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, prévoyait aussi dimanche sur LCI une "contre-attaque plutôt terrestre" à horizon "février-mars", s'appuyant sur les forces mobilisées en septembre. "Il est clair qu'on va aller dans un moment de massification, où les Russes vont jeter toutes leurs forces dans la bataille", affirmait le ministre, ajoutant que "le premier trimestre 2023 va être assez déterminant".

Article original publié sur BFMTV.com