Au meeting de Jordan Bardella, la fête de fin campagne interrompue par une intrusion des Femens

Jordan Bardella photographié durant son discours au Dôme de Paris dimanche 2 juin.
STEPHANE DE SAKUTIN / AFP Jordan Bardella photographié durant son discours au Dôme de Paris dimanche 2 juin.

POLITIQUE - Tout est millimétré ce dimanche 2 juin, à une semaine des élections européennes. La longue file de militants devant le Dôme de Paris se prolonge dans le sourire des cadres du Rassemblement national qui défilent dans les allées. Dans la salle, une marée de drapeaux tricolores s’agite dans une ambiance de boîte de nuit. La salle est bondée.

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De la musique à fort volume avec, pour décor, le portrait de Jordan Bardella illuminé sur la scène, derrière deux DJ qui triturent les boutons de leur table de mixage. Fournies aux chaînes d’information en continu, les images tournées par le RN donneront à coup sûr l’image d’une fin de campagne des élections européennes en fanfare.

Les jeunes dans la fosse façon concert, pendant que l’état-major savoure au premier rang. À 15 heures, Marine Le Pen succède à Laure Lavalette, pour un discours d’une longue demi-heure destiné à flinguer le fonctionnement de l’UE et taper très fort sur Emmanuel Macron.

« Pour une Europe féministe, pas fasciste »

Arrive ensuite Jordan Bardella. Comme la députée du Pas-de-Calais, il fend la foule avant d’arriver sur scène. Le discours commence. La mise en scène, balayée par les spots, semble impeccable. Fort de son avance insolente dans les sondages, l’eurodéputé déroule. Quand soudain, le raout est perturbé. Deux militantes féministes se lèvent, seins nus.

« Pour une Europe féministe, pas fasciste », scandent-elles. Les militants RN huent. Le chouchou des sondages s’interrompt, pendant que le service de sécurité du RN évacue les deux perturbatrices manu militari. Naturellement, une partie des journalistes suit ce convoi improvisé. Non sans provoquer la colère du DPS, le service d’ordre du parti lepéniste.

Alors qu’il filmait l’évacuation musclée des deux militantes, un journaliste de Mediapart ne passe pas loin d’en prendre une. Sur les images qu’il publie sur X, on peut voir un membre de la sécurité frontiste tenter de prendre son téléphone.

Pendant ce temps, le reste de la presse est tenu à distance. La tension monte. Plusieurs journalistes font remarquer qu’ils ne font que leur travail. Ce qui déplaît au DPS, qui redouble d’ingéniosité pour entraver la tâche de la presse, à coups de drapeaux tricolores devant les objectifs. Pas vraiment subtile comme manœuvre.

Cruelle réalité

Reconnaissons-le, la scène était succinte. Elle n’a pas duré au total plus de 10 minutes sur les deux heures meeting. Mais l’essentiel de l’action de ces militantes n’est pas là. En quelques secondes, elles ont mis le doigt sur une cruelle réalité : les votes du RN au Parlement européen, systématiquement hostile au droit des femmes.

Et, sans le vouloir, sur une autre réalité qui accompagne l’histoire du parti d’extrême droite, une vision particulière de la liberté de la presse, qui l’a souvent conduit à refuser l’accréditation de certains journalistes. En quête de « normalisation » dans l’hexagone comme au Parlement européen, le RN voit son dernier meeting de campagne terminer sur cette piqûre de rappel. Auprès du HuffPost, un membre du service d’ordre justifie la rugosité du dispositif autour des deux militantes : « C’est aussi parce qu’à l’intérieur, certains veulent les frapper ». On le croit volontiers.

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