Athlétisme: pourquoi la possible disparition de la planche d’appel au saut en longueur suscite un tollé

Révolution dans le monde du saut en longueur. Jon Ridgeon, le directeur général de la fédération internationale d’athlétisme a déclaré dans le podcast Anything but Footy vouloir supprimer la planche d’appel. Mais pourquoi World Athletics cherche-t-elle a réformer les règles d’un sport vieux de 150 ans? Pour limiter le nombre d’essais mordus.

"Si vous prenez le saut en longueur aux championnats du monde 2023 à Budapest, un tiers de tous les essais n’ont pas été mesurés. Ils ont été annoncés mordus. Cela ne fonctionne pas. C’est une perte de temps", explique Ridgeon. Et surtout, cela limite le spectacle. "C’est une idée qui sert à la télévision, celui qui saute le plus loin a gagné", déclare Patrice Gerges, ancien directeur technique national de la fédération française d’athlétisme. A la place de la planche d’appel, la fédération voudrait instaurer une zone de saut. Finis les mordus: "Nous mesurerons depuis l’endroit où l’athlète décolle jusqu’à l’endroit où il atterrit dans le bac à sable", ajoute le directeur.

"Je trouve ça fou"

A la suite de cette déclaration, les réactions n’ont pas tardé à pleuvoir. "Vous êtes censés attendre le 1er avril pour les poissons d'avril", a ironisé le quadruple champion olympique de la longueur Carl Lewis sur X. "La longueur est l'épreuve la plus difficile de l'athlétisme, et cette réforme en ferait disparaître l'élément technique le plus délicat. Est-ce qu'on agrandit le panier de basket parce que beaucoup de joueurs ratent leurs lancers francs?"

Côté français, la championne du monde de la longueur en salle, Eloyse Lesueur, partage cet avis. "Je trouve ça fou. On perd l’essence même du saut en longueur avec la contrainte de la planche. C’est la consigne: il ne faut pas mordre la planche pour avoir un saut validé. C’est comme si on enlevait la barre aux perchistes et qu’on prenait juste la hauteur du saut", s’insurge la Française.

"Me concernant, je ne devrais pas dire ça parce que j’aurais fait un bien meilleur concours la semaine dernière s’il n’y avait plus de mordus. Mais c’est à moi de travailler pour ne plus en faire. C’est la contrainte de notre sport."

Le champion olympique de saut à la perche, Renaud Lavillenie, a lui aussi tenu à réagir. "Les changements de règlement, des fois c'est un peu particulier. Après on ne peut plus rien comparer. On oublie tout ce qui a été fait." Des critiques que comprend Jon Ridgeon. "Vous ne pouvez pas apporter de changement dans un sport qui a été inventé il y a 150 ans sans susciter une certaine polémique. Si vous avez consacré votre vie d'athlète à perfectionner votre technique pour sauter avec une planche d'appel et qu'elle est soudainement remplacée par une zone d'appel, je comprends tout à fait qu'il puisse y avoir une résistance initiale."

A ce stade, rien n’est encore acté. World Athletics envisage une série de tests pendant deux ans. S’ils s’avèrent concluants, la réforme pourrait entrer en vigueur en compétition Elite dès 2026.

Article original publié sur RMC Sport