Arrestations en Turquie après un appel au dialogue avec le PKK

ANKARA (Reuters) - Les autorités turques ont arrêté 27 universitaires ayant signé une déclaration dénonçant les opérations militaires dans le sud-est de la Turquie à majorité kurde et appelant à la levée du couvre-feu dans cette région. Le texte a été signé par un millier de personnalités, dont le philosophe américain Noam Chomsky. "Le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité et en particulier l'interdiction de la torture et des mauvais traitements garanti par la constitution et par les conventions internationales a été violé", affirme la déclaration. "Nous demandons que l'Etat cesse son massacre délibéré". Selon des médias locaux, la plupart des arrestations de vendredi ont été effectuées dans la province de Kocaeli, proche d'Istanbul. Le ministère public de Kocaeli a refusé de faire le moindre commentaire. Plus de 2.000 avocats se sont engagés à défendre gratuitement les universitaires arrêtés. "La déclaration ne salue ni n'appelle à la violence ou à des actes criminels", a déclaré un professeur de droit qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat de peur d'être poursuivi à son tour. Une enquête judiciaire a été ouverte jeudi sur cet appel, que le président Recep Tayyip Erdogan et le Premier ministre Ahmet Davutoglu ont sévèrement dénoncé, parlant de soutien au terrorisme. Le journal Radikal, orienté à gauche, a publié vendredi des photos montrant des croix rouges peintes sur la porte des bureaux de deux universitaires signataires à Ankara, accompagnées de menaces écrites. Le parti républicain du peuple (CHP), principale formation de l'opposition, a qualifié les mises en détention "de totalement illégales, d'inacceptables et d'extrêmement dangereuses". "Nous continuerons à soutenir tous les citoyens qui exercent leur liberté de parole sans appeler à la violence", affirme le CHP dans un communiqué. Ankara a déclaré en juillet une "guerre synchronisée" aux djihadistes syriens de l'Etat islamique et aux séparatistes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Le cessez-le-feu qui était en vigueur depuis 2012 avec le PKK a volé en éclats et de nombreux affrontements se sont produits depuis dans le Sud-Est. Un attentat imputé aux séparatistes a encore fait six morts dans la nuit de mercredi à jeudi à Cinar, au sud de Diyarbakir, le chef lieu de la région. (Gulsen Solaker, Jean-Philippe Lefief pour le service français)