Après le meurtre d'un éleveur au Mali, sa famille accuse la chaîne de télé France 24

La région du Gourma, au Mali, est en proie depuis plusieurs années aux attaques de groupes terroristes. (Photo credit : DAPHNE BENOIT/AFP via Getty Images)

Quelques jours après avoir témoigné à visage découvert dans un reportage sur France 24 à propos du racket dont il était victime de la part de terroristes, Sadou Yehia, un éleveur malien, a été enlevé et tué par un groupe djihadiste.

Pour sa famille, le lien de cause à effet ne fait aucun doute : la négligence dont a fait preuve la chaîne de télévision France 24 est à l’origine du drame. Quelques jours après être apparu dans un reportage de la chaîne d’informations, où il dénonçait le racket généralisé perpétré dans la région malienne du Gourma par des groupes djihadistes, Sadou Yehia, éleveur de son état, a été enlevé par des terroristes.

Le 8 février, Sedou Yehia a ensuite été “sauvagement assassiné”, selon France 24, qui a réagi à la nouvelle ce mercredi. La chaîne est cependant au coeur d’une polémique, puisque les proches de Sedou Yehia, relayés par de nombreux internautes sur les réseaux sociaux, considèrent que la chaîne est à l’origine de l’enlèvement et du meurtre de l’éleveur.

France 24 accusée sur les réseaux sociaux

Lors de la diffusion du reportage de France 24, le 13 janvier dernier, le visage de Sadou Yehia n’avait en effet pas été flouté. Nombreux sont ceux qui pensent que cette absence d’anonymat a permis aux terroristes de retrouver facilement l’éleveur et de lui faire payer le fait d’avoir pris la parole.

Du côté de la chaîne, on se défend de ces graves accusations. “Ce dimanche 9 février, quand des échanges sur les réseaux sociaux nous ont appris sa mort, toutes les équipes qui avaient contribué à ce reportage, à Bamako ou à Paris, ont été profondément bouleversées, explique le communiqué publié par France 24. Sur ces mêmes réseaux sociaux, certains semblaient établir un lien entre le reportage et son décès. Voire nous en tenir pour responsables. C’est ajouter une accusation terrible et injuste à l’horreur.”

“Rien ne permet d’affirmer que le floutage lui aurait garanti une quelconque sécurité”

Plus loin, le communiqué aborde la question du floutage des visages, au coeur de la polémique. “Avant la diffusion du reportage, tant pour les équipes qui le montent à Bamako que pour celles qui le reçoivent à Paris, s’est posée la question du floutage. Faut-il flouter les civils ? La réponse est oui, quand cette mère de famille sort de sa case sous la contrainte des soldats avec ses deux enfants, découvre la caméra et est donc filmée à son insu. La réponse est non, concernant les soldats de Barkhane dont aucun membre n’est flouté.”

”Non, quand, dans une assemblée publique, un notable exprime librement son ressentiment devant notre caméra”, poursuit le communiqué. “Dans une zone où les terroristes savent tout et sur tous, sans délai, de la présence des militaires dans les villages, à l’identité des habitants qui leur parlent, rien ne permet d’affirmer que le floutage de Sadou Yehia lui aurait garanti une quelconque sécurité. Dans ce contexte, l’anonymisation est illusoire. Les groupes terroristes qui prospèrent de divers trafics, et d’un racket systématique des populations, n’ont d’ailleurs nul besoin d’images pour désigner leurs victimes.”