Après le viol et le suicide d'Océane, son père dénonce la lenteur de la justice

Après le viol et le suicide d'Océane, son père dénonce la lenteur de la justice

"Si l’enquête était allée plus vite, on aurait pu éviter son suicide." Yvan Bourdin, le père d’Océane, dénonce la lenteur de la justice après la plainte pour viol déposée par sa fille le 16 mai dernier à Besançon. Une enquête "tombée aux oubliettes", une "négligence" qui a fait "sombrer" l’étudiante de 21 ans, dénonce son père auprès de BFMTV.com.

Ce jeudi, lors d’une conférence de presse, le procureur de la République de Besançon a réagi aux accusations de la famille d’Océane affirmant que le parquet "avance au rythme de la réception des pièces" récoltées lors des investigations.

Éric Manteaux fait notamment référence à la mèche de cheveux prélevée sur la jeune femme pour analyse, Océane affirmant avoir été droguée avant le viol. Après plus de trois mois d’attente, le rapport toxicologique ne fait finalement état "d'aucune trace de soumission chimique", indique le magistrat, justifiant ce délai par la "complexité" des analyses.

"Et pourquoi ne pas avoir, au moins, entendu le suspect pendant ce laps de temps?", lâche Yvan Bourdin. "Pendant que la justice traînait, ma fille voyait son agresseur sur les réseaux sociaux, il continuait sa vie tranquillement, alors qu’elle, elle était au fond du trou, anéantie."

Passé douloureux

Car celui qu'elle accuse était un ami, étudiant comme elle en licence d'oenologie à Beaune. Le jeune homme, qui lui avait déclaré sa flamme à plusieurs reprises, était devenu son confident. Une épaule sur laquelle s'épancher pour cette étudiante au passé douloureux.

À 17 ans, Océane avait déposé plainte pour agression sexuelle lors d’une soirée du Nouvel An. Une affaire classée sans suite, selon le procureur de Besançon. Puis, en janvier dernier, elle avait déposé plainte, là encore pour agression sexuelle, contre son maître de stage, patron du bar à vins qui l’employait. L’enquête est toujours en cours, menée par le parquet de Dijon.

Le camarade de classe d’Océane passe donc de longs moments chez elle, tentant de lui apporter son soutien moral. Jusqu’à cette soirée du 10 février 2022. Ensemble dans un bar de Beaune, ils discutent, boivent de l’alcool et prennent de la cocaïne avant de rentrer chez Océane.

"Le déroulement de la soirée a commencé à devenir flou (...) je suis tombée dans les vapes", expliquera-t-elle en mai aux policiers dans une plainte que nous avons pu consulter.

Quand Océane se réveille, son ami est train de la violer, affirme-t-elle. Elle le "supplie" d’arrêter avant de retomber inconsciente, poursuit-elle:

"Je me suis réveillée plusieurs fois mais je ne pouvais pas bouger, c’est comme si j’étais prisonnière de mon corps." C'est cette sensation qui lui laisse penser qu'elle a été droguée, souligne son père.

"Je suis morte de l'intérieur"

"En état de choc", elle rentre chez ses parents à Besançon et leur raconte l’événement. "Elle nous a dit: 'je suis morte de l’intérieur'", souffle Yvan Bourdin. Océane sombre dans la dépression, les crises de boulimie, elle tente de mettre fin à ses jours à deux reprises et enchaîne les périodes d’internement en hôpital psychiatrique.

"C’était un zombie", décrit son père.

Le 4 juin dernier, alors que ses parents s'absentent de la maison, Océane met finalement un terme à sa vie en ingérant une importante dose de médicaments dans sa chambre.

Sur elle, un mot est retrouvé: "Je suis morte depuis le 10 février. Vous n’auriez rien pu faire pour moi."

Ses parents restent toutefois persuadés que si la justice était allée plus vite, "en menant des auditions, des gardes-à-vue, Océane aurait pu s'accrocher à l'espoir que justice lui soit rendue", confie son père. Avec son épouse Sandra, Yvan Bourdin affirme qu’il continuera "à se battre pour sa mémoire et pour que le coupable soit condamné".

Le procureur de Besançon a annoncé ce jeudi qu’il se dessaisissait de l’enquête au profit du parquet de Dijon. "Il refile la patate chaude à un autre parquet. Encore une étape qui va retarder l'avancée de l'enquête et profiter au suspect", tance Yvan Bourdin.

Article original publié sur BFMTV.com