Après l’attaque à Paris, le profil de l’assaillant entre « fiche S » et suivi psychiatrique interroge la classe politique

Photo prise le 3 décembre à proximité de la station de métro Bir Hakeim où une attaque au couteau et au marteau a fait un mort et deux blessés.
DIMITAR DILKOFF / AFP Photo prise le 3 décembre à proximité de la station de métro Bir Hakeim où une attaque au couteau et au marteau a fait un mort et deux blessés.

POLITIQUE - Connu des services de justice pour islamisme radical et suivi pour des troubles psychiatriques. Le profil d’Armand Rajabpour-Miyandoab, l’auteur de l’attaque qui a fait un mort et deux blessés dans le XVe arrondissement de Paris dans la soirée du 2 décembre, interroge la classe politique ce dimanche, mais pas toujours pour la même raison.

Attaque à Paris : qui est Armand Rajabpour-Miyandoab, l’homme interpellé qui a revendiqué l’acte ?

Armand Rajabpour-Miyandoab avait déjà été interpellé en 2016 par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) pour un projet d’action violente à La Défense, à l’ouest de Paris et condamné à cinq ans d’emprisonnement dont un avec sursis. Après sa sortie de prison en 2020, il était « suivi à la DGSI comme personne ayant des troubles psychiatriques très importants. Il était d’ailleurs sous traitement psychiatrique et neurologique », a précisé le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin samedi soir.

Au vu des premiers éléments de l’enquête, le parquet national antiterroriste a été saisi. Mais les enquêteurs vont aussi se pencher sur l’aspect médical : « Est-ce qu’il était suivi médicalement comme il aurait dû l’être et comme il l’a été un temps, c’est une question qui se posera », a dit une source policière à l’AFP.

C’est cet aspect qui a particulièrement retenu l’attention des élus écologistes. « Sans nier le fondement politique de cet acte, il y a aussi un sujet psychiatrique et, derrière, la question de la manière dont les personnes avec des affections psy sont suivies », a réagi la députée de Paris Sandrine Rousseau. « Assurer la sécurité des Français, c’est aussi se préoccuper de santé mentale et donner des moyens suffisants à la psychiatrie », abonde sa collègue et présidente du groupe Cyrielle Chatelain.

Le fondateur de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon a lui aussi alerté sur « les conséquences de l’effondrement du système psychiatrique. » « Soins, suivis et enfermement médicalisé sont urgents pour réaliser la mise hors d’état de nuire pour ce type de personnes », écrit-il sur X. Manuel Bompard, a lui appelé à « ne pas donner de signification générale » à l’attaque, y voyant d’abord l’acte « d’une personne qui est manifestement déséquilibrée ». « Comment ça se fait qu’une personne qui a été fichée S a manifestement échappé à la surveillance, quel était l’état de son suivi psychiatrique ? », s’est-il interrogé sur LCI dimanche.

20 % des personnes suivies pour radicalisation présentent des troubles psychiatriques

Environ 5 200 personnes sont connues pour radicalisation en France, dont 1 600 sont particulièrement surveillées par la DGSI, selon une source au sein du renseignement, qui précise que 20 % de ces 5 000 personnes ont des troubles psychiatriques.

« Comme souvent dans ces affaires, s’entremêlent une idéologie et une personnalité influençable », a souligné le ministre de la Santé Aurélien Rousseau sur le plateau de Dimanche en Politique sur France 3. « Malheureusement, même si on a largement renforcé les liens entre les psychiatres et les autorités qui suivent ces personnes radicalisées, cela ne nous permet pas de savoir quels sont le jour et l’heure du passage à l’acte », ajoute-t-il, précisant que l’enquête en cours doit permettre de vérifier si l’assaillant a bien respecté le suivi médical imposé.

Invité sur franceinfo, le porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP) Mathieu Valet a lui aussi souligné la difficulté à détecter et arrêter ce type de profil. Il a néanmoins pointé du doigt un manque de moyens dans le domaine psychiatrique « pour accueillir toutes les personnes qui devraient être suivies avec un traitement et un suivi digne de ce nom ». Critique que le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a balayée, tout en promettant de tirer toutes « les leçons » nécessaires à l’issue des investigations.

LR et RN réclament un tour de vis sécuritaire

À droite et à l’extrême droite, les remarques se sont concentrées sur le passif judiciaire de l’homme en garde à vue. « L’assaillant qui a causé la mort d’un touriste et qui a fait deux blessés à Paris est un individu radicalisé, fiché S et déjà condamné pour des faits liés au terrorisme. Une nouvelle fois, cet islamiste était connu ! », a réagi le président des Républicains Éric Ciotti. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez en a lui profité pour demander une réponse législative, afin de « permettre de maintenir en rétention ceux qui nous menacent et de les expulser systématiquement quand ils sont étrangers. » « Le fichage S n’est plus à la hauteur de la menace terroriste islamiste. Comment faire encore semblant ? » écrit également le député du Lot Aurélien Pradié.

Même son de cloche à l’extrême droite, où le président du Rassemblement national Jordan Bardella a fustigé la « faiblesse » du gouvernement et la politique qu’il mène. « Je déplore que les drames se répètent les uns après les autres avec systématiquement les mêmes situations, les mêmes individus, les mêmes profils », a réagi sur BFMTV l’eurodéputé depuis Florence en Italie, où il doit participer à un meeting du groupe parlementaire européen Identité et démocratie.

« Je pense qu’il faut aujourd’hui un tournant sécuritaire pénal et migratoire dans notre société, au risque de courir à de graves troubles dans les mois qui viennent », a-t-il ajouté, plaidant pour des expulsions systématiques des étrangers suivis pour radicalisation et pour « rouvrir le débat sur la rétention de sûreté ». « À partir du moment où vous êtes incarcéré pour des faits liés au terrorisme ou à des projets d’attentat et que vous êtes islamiste, par définition, je pense qu’à l’issue de votre peine, on doit réévaluer votre dangerosité et si vous représentez encore une menace pour la sécurité nationale, alors vous restez en prison », a-t-il ajouté, souhaitant que cette mesure soit « systématique pour les faits liés au terrorisme ».

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