Après un 1er-mai réussi, l’intersyndicale entre en zone de turbulence

Après le 1er mai, l’intersyndicale entre en zone de turbulence
Après le 1er mai, l’intersyndicale entre en zone de turbulence

POLITIQUE - Qui va descendre en premier de l’appareil ? L’intersyndicale, unie dans la contestation depuis le premier jour de la réforme des retraites s’apprête à rentrer dans une zone de turbulences, sans doute la plus délicate à gérer du mouvement social.

La treizième journée de mobilisation contre le projet phare d’Emmanuel Macron, a accordé un nouveau succès aux syndicats même s’il n’y a pas eu de raz-de-marée. En réunissant des centaines de milliers de personnes (2,3 millions selon la CGT, 782 000 selon le ministère de l’Intérieur), ils ont battu un record pour un 1er mai et acté un rebond de la mobilisation.

Désormais, les huit numéros 1 doivent penser l’après. C’est l’objet de leur réunion au sommet ce mardi 2 mai au matin. « La mobilisaiton massive et déterminée du jour nous oblige demain à continuer dans l’unité syndicale à combattre cette loi », résumait ainsi le leader de Force Ouvrière Frédéric Souillot sur RTL, quelques heures après la manifestation.

Problème : dans ce contexte incertain, deux questions au moins, pourraient créer des lignes de fractures plus ou moins profondes entre les différentes organisations. Faut-il, d’un côté, continuer les manifestations avec la même fréquence ? Et de l’autre se rendre à Matignon à l’invitation d’Élisabeth Borne ?

Stop ou encore ?

Laurent Berger a surpris son monde, dimanche, sur LCI, en expliquant qu’il accepterait le rendez-vous proposé par la Première ministre. Ce qu’il répète depuis. Au même moment, Sophie Binet, son homologue à la tête de la CGT se montrait bien plus prudente sur France 3, expliquant que l’intersyndicale souhaitait prendre une décision commune mardi. Un premier coup de canif ?

Le secrétaire général de la CFDT a bien précisé les choses, le lendemain, sur franceinfo, en posant certaines conditions drastiques à un retour au dialogue. Mais si le mal n’est pas encore fait, la division ne semble plus très loin. « On ne peut pas indéfiniment sécher les réunions à Matignon », n’hésite plus à expliquer François Hommeril, le leader de la CFE-CGC, pour qui « il faut un rapport de force rénové » pour « l’écriture d’un nouveau chapitre. »

En réalité, la question centrale des négociations Matignon, n’est pas la seule à être propice aux remous. Les différentes organisations pourraient effectivement se diviser sur la suite des actions à mener. Si la CGT ou Solidaires sont très déterminés à continuer la mobilisation, certains dirigeants émettent effectivement de sérieux doutes quant à l’opportunité de poursuivre un rythme aussi soutenu que depuis la fin janvier. « Je pense que ce ne sera pas possible de continuer des manifestations aussi fréquentes », soufflait par exemple François Hommeril, le 1er mai sur LCI.

De quoi faire apparaître, en creux, la résurgence des dissensions entre les syndicats dits « réformistes » et les autres, qualifiés de plus radicaux ? Force est de constater que Laurent Berger n’a plus le même allant pour les cortèges à répétition… Ni le même espoir de voir la réforme défaite par la rue. « On ne peut pas manifester pendant six mois », expliquait-il, dimanche dans Le Grand Jury, car « on ne peut pas faire croire aux travailleurs qu’avec une manifestation toutes les semaines, on fera retirer la réforme ».

« Pas un gravier entre nous »

Un propos quelque peu résigné qui tranche avec les expressions de la nouvelle dirigeante de la CGT, Sophie Binet, par exemple. « Nous ne passerons pas à autre chose tant que cette réforme ne sera pas retirée », martelait-elle encore, lundi, dans la matinale de France 2, en appelant Emmanuel Macron à « revenir à la raison. » « La mobilisation n’est pas finie. Une mobilisation c’est quelque chose qui est vivant, qui continue… », assurait de son côté le co-délégué de l’organisation Solidaires Simon Duteil, samedi dernier sur BFMTV.

Vraie différence ou simple nuance ? Tous s’accordent en tout cas sur un point : l’impérieuse nécessité de rester unis dans la contestation, la principale force de l’intersyndicale depuis le début de la réforme des retraites.

« L’intersyndicale n’est pas du tout en train de se fissurer. Je n’aime pas le mensonge, mentir aux travailleurs en disant que l’on est d’accord sur tout. Il faut que l’on assume nos divergences et que l’on porte des propositions communes », assurait en ce sens Laurent Berger en tête de cortège lundi, pendant que son homologue de Force Ouvrière Frédéric Souillot ne voyait « pas un gravier » entre les différents numéros 1. Vraiment ?

Même attention pour Cyril Chabanier, le président de la CFTC, lequel appelle à prolonger l’union sacrée jusqu’au 8 juin et l’examen d’une proposition de loi déposée par le groupe Liot pour revenir sur la réforme. « Jusque-là, au moins, il faut continuer les actions en intersyndicale. Je pense qu’elle restera soudée… », a-t-il prophétisé sur BFMTV. Il reste cinq semaines à tenir.

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