Après le 1er-Mai, les prochaines étapes pour les opposants à la réforme des retraites

Après le succès du 1er-Mai avec 2,3 millions de manifestants dans toute la France d'après la CGT et 782.000 pour la police, la lutte contre la réforme des retraites, promulguée mi-avril, n'est pas terminée. Certains y croient toujours, à l'instar de Jean-Luc Mélenchon qui a appelé depuis le cortège parisien à "ne rien céder" et "à ne pas se laisser domestiquer".

Une nouvelle réunion de l'intersyndicale s'est tenue ce mardi, ouvrant la voie à d'autres étapes dans les jours et les semaines à venir.

• Le 3 mai: la validation ou non du référendum d'initiative partagée

Le Conseil constitutionnel rendra ce mercredi sa réponse concernant la seconde demande de référendum d'initiative partagée (RIP) déposée par la gauche à la veille de la validation partielle de la réforme.

Une première mouture avait déjà été rejetée au motif qu'elle ne répondait aux critères fixés par la Constitution. Consciente de la faiblesse juridique de sa précédente demande, les sénateurs de gauche avaient déposé, avant même son rejet, une seconde proposition. Mais, rares sont ceux à croire que ce texte sera validé cette fois-ci par le Conseil constitutionnel.

Même en cas de validation, un parcours semé d'embûches s'ouvrirait, à commencer par la nécessité de récolter les signatures d'au moins un "dixième des électeurs" favorables au référendum, soit 4,87 millions de personnes, dans un délai de 9 mois.

Pendant ce temps, "le RIP ne gèle pas l'application de la loi", rappelle le constitutionnaliste Paul Cassia - un avis partagé par l'immense majorité de ses collègues. Très concrètement, Emmanuel Macron pourrait donc bien faire appliquer la réforme des retraites "à l'été" tandis que la collecte des signatures serait en cours. Le calcul serait cependant très délicat d'un point de vue politique.

• Dans les jours à venir: une rencontre entre Borne et la CFDT (et d'autres syndicats?)

Après des semaines de tensions entre l'exécutif et les syndicats, Élisabeth Borne tente de renouer le dialogue. Matignon a fait savoir l'envoi d'invitations aux syndicats dans les prochains jours.

De quoi espérer mettre de l'huile dans les rouages après le refus catégorique de l'Élysée de recevoir les syndicats avant que la réforme ne soit promulguée et l'échec de la dernière réunion. Le 5 avril dernier, les centrales avaient accepté une rencontre avec la Première ministre mais avaient quitté rapidement la table, après avoir acté le refus du retrait de la réforme de sa part.

Après un "délai de décence", la CFDT "ira" désormais discuter", a fait savoir Laurent Berger sur BFMTV ce lundi, tout en reconnaissant "des questions de méthode".

"Je ne connais pas d'autre façon de faire que d'alterner la mobilisation et la discussion", a ajouté le syndicaliste.

Dans un communiqué de l'intersyndicale diffusé ce mardi, les organisations syndicales dans leur ensemble laissent entendre qu'elles participeront à ce "cycle de concertations", mais en rappelant "leur refus de la réforme des retraites".

Si l'ordre du jour de ces discussions n'est pas encore connu précisement, il a toutes les chances de tourner autour du futur projet de loi plein emploi qui veut mettre fin à Pôle emploi pour le remplacer par France travail, loin donc de la retraite à 64 ans.

Les organisations syndicales précisent qu'elles travailleront à "des propositions communes mettant à contribution les employeurs (...) en matière de salaires, conditions de travail, démocratie sociale, d'égalité femmes-hommes et d'environnement".

• Le 6 juin: une nouvelle journée de mobilisation

Au lendemain du 1er-Mai, l'intersyndicale a appelé à une quatorzième journée d'action le mardi 6 juin pour "se faire entendre" des députés qui examineront deux jours plus tard une proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites tout juste promulguée.

"Nous appelons unitairement nos organisations à aller rencontrer les députés partout pour les appeler à voter cette proposition de loi", écrivent les syndicats. "Dans ce cadre, l'intersyndicale appelle à multiplier les initiatives avec notamment une nouvelle journée d'action commune, de grèves et de manifestions le 6 juin."

• Le 8 juin: une proposition de loi pour abroger la réforme des retraites

À l'Assemblée nationale, le groupe Liot qui avait déjà déposé une motion de censure transpartisane défendra sa proposition de loi pour abroger le report de l'âge légal à 64 ans. Le texte sera présenté le 8 juin prochain, à l'occasion de la niche parlementaire du groupe.

Sur le papier, la proposition de loi a des chances d'être votée si des députés LR joignent leurs voix à celles de la Nupes et de la RN. Son adoption reste néanmoins très hypothétique.

Les députés Liot défendront leur texte de 9h à minuit. Autant dire que la majorité présidentielle pourrait multiplier le dépôt d'amendements pour faire traîner les débats en longueur et empêcher les députés de voter dans les délais impartis.

Mais même en cas d'adoption à l'Assemblée nationale, le texte devrait ensuite être voté au Sénat qui a dit oui à 2 reprises à la réforme des retraites, ce qui prend peu probable son adoption.

• Dans les prochaines semaines: des recours devant le Conseil d'État

Les syndicats ont déjà annoncé vouloir attaqué les décrets de la réforme des retraites dès leur publication devant le Conseil d'État. La méthode avait fonctionné en 2021 pour la réforme de l'assurance chômage.

"C'est une possibilité que nous offre le droit français et nous comptons bien l'utiliser", a ainsi expliqué Dominique Corona, secrétaire général adjoint de l'Unsa, sur BFM Business fin avril.

De quoi potentiellement ralentir l'application de la réforme. Quoi qu'il en soit, les centrales - et de nombreux spécialistes - doutent que la loi puisse véritablement s'appliquer en septembre, compte tenu du temps nécessaire à la rédaction des décrets et à la mise à jour des logiciels des caisses de retraite.

Du côté du gouvernement, l'heure n'est pas du tout à envisager le retrait de la réforme. En dépit de déplacements ministériels très compliqués, entre concerts de casseroles et vives interpellations, l'exécutif affiche ces derniers jours sa volonté d'aller au bout, tout en se projettant dans l'après. Emmanuel Macron a ainsi mis le cap sur "100 jours d'apaisement", appelant à un bilan le 14 juillet prochain.

Article original publié sur BFMTV.com