"Appelle-moi quand tu arrives", un message maternel devenu slogan des Grecs en colère après l'accident ferroviaire

La Grèce est encore sous le choc. Plus d'une semaine après le terrible accident ferroviaire qui a fait 57 morts, dont de nombreux jeunes, la colère se fait entendre dans les nombreuses manifestations organisées mercredi à travers le pays. Dans les cortèges, des dizaines de milliers de Grecs ont fait état de leur douleur, mais réclament également des comptes aux autorités.

"Nous allons te venger, petit"

Depuis la tragique collision, un message est devenu le slogan des manifestants en colère: "Appelle-moi quand tu arrives". Ce message envoyé par de nombreuses mères grecques à leurs enfants lorsque ceux-ci voyagent avait également été envoyé par l'une des victimes, âgée de 23 ans, qui avait contacté sa mère peu avant l'accident.

"Maman, il y a trop de monde dans le train. Je n'ai jamais vu un train aussi bondé. Je t'appelle quand on arrive, viens me chercher", avait dit ce jeune homme selon le site d'informations LIFO.

Dans les cortèges qui ont défilé dans tout le pays mercredi, des banderoles affichaient cette phrase qui s'est répandue comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux. À Athènes, des jeunes en colère ont également scandé: "Envoie-moi un message quand tu arrives. Tu n'es jamais arrivé. Nous allons te venger, petit".

En raison de la rapidité de la diffusion du message "Appelle-moi quand tu arrives", certains tentaient la comparaison avec "I can't breathe", le slogan apparu aux Etats-Unis après la mort en mai 2020 de l'Afro-Américain George Floyd, étouffé sous le genou d'un policier blanc.

Particularité grecque

Dans un pays où la famille est un marqueur fort de la société, "Appelle-moi quand tu arrives" résume "la mentalité des parents en Grèce, en particulier de la mère qui s'inquiète de savoir si son enfant va bien", explique à l'AFP Pinelopi Horianopoulou, une employée municipale, mère de deux enfants, rencontrée mercredi dans la manifestation athénienne.

"C'est le message que toutes les mères de Grèce envoient", renchérit Giota Tavoulari, 58 ans, du syndicat des pharmaciens.

Ce slogan est "repris partout car il est assez significatif: ces enfants ne reverront pas leurs familles parce que des gouvernements, des entreprises n'ont pas pris soin" des systèmes de sécurité ferroviaire.

Dans de nombreux établissements scolaires ces derniers jours, des élèves du primaire, des collégiens et des lycéens ont disposé sur le sol des dizaines de sacs à dos de manière à former ce message "pare me otan phtasis", "appelle-moi quand tu arrives" parfois décliné aussi en "envoie-moi un message quand tu arrives".

De nombreuses victimes de cette "tragédie nationale", comme l'ont qualifiée les autorités grecques, étaient des étudiants rentrant à Thessalonique, la grande ville universitaire du nord du pays, après un week-end prolongé.

"Transparence" et colère

La tragédie a ravivé la colère des Grecs, dont beaucoup se sentent humiliés par le déclassement social brutal qu'ils ont subi durant la crise financière de 2008.

Ce mercredi, des violences entre policiers et manifestants ont de nouveau éclaté en marge des manifestations. Devant le parlement à Athènes, des cocktails Molotov et des pierres ont été lancés par des manifestants en colère à l'issue d'un rassemblement de plus de 40.000 personnes, dont de nombreux jeunes, qui demandent des comptes.

Ce jeudi, le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis a promis la "transparence absolue" dans l'enquête sur la catastrophe afin de "déceler les failles" dans le système des transports.

Sans qu'aucune alerte ne soit déclenchée, deux trains, l'un de voyageurs, l'autre de marchandises, ont circulé sur plusieurs kilomètres sur la même voie avant de se percuter frontalement, à Tempé, près de la ville de Larissa, à 350 km au nord de la capitale.

Or les syndicats de cheminots ont rappelé avec colère qu'ils avaient tiré la sonnette d'alarme sur les graves défaillances techniques sur cette ligne bien avant le drame, sans avoir été entendus.

Article original publié sur BFMTV.com