Antoine Petit, dirigeant du CNRS : "Nous avons vocation à appliquer la recherche que nous produisons"

Distinguer science fondamentale et appliquée est une erreur, affirme le patron du CNRS. Pour répondre aux défis des décennies à venir, il faut miser sur l'interdisciplinarité entre toutes les sciences, y compris humaines, et sur une coopération accrue avec les industriels.

Cet article est issu du magazine Les Indispensables de Sciences et Avenir n°216 daté janvier/ mars 2024.

Antoine Petit est le président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Agrégé de mathématiques et docteur en informatique, spécialiste des méthodes formelles, il a dirigé l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) de 2014 à sa nomination à la tête du CNRS, en janvier 2018.

Sciences et Avenir - Les Indispensable : Dans ce numéro, nous faisons un point sur les derniers progrès de la science. Quelles seraient selon vous les plus grandes découvertes de la décennie ?

Antoine Petit : Les grandes découvertes "ponctuelles", au fond, sont rares… Les ciseaux moléculaires Crispr-Cas9 sont l'exception. Certes, nous avons assisté à des événements spectaculaires : la première photo d'un trou noir, la confirmation de l'existence des ondes gravitationnelles… mais je ne suis pas sûr que ce soit les plus importants.

Le poids formidable pris par le deep learning, l'approche One Health sont à mon sens des faits majeurs. Mais ce n'est pas, pour prendre ce dernier exemple, parce que quelqu'un, un beau matin, s'est dit : "Tiens, au fait, il y a un lien entre la santé humaine et celle des animaux et des écosystèmes."

Vous croyez plus à la recherche collaborative qu'aux génies solitaires ?

La recherche est un curieux mélange de coopération et de compétition. Il ne faut pas nier cette double dimension, même si la souligner m'a plusieurs fois valu des remontrances. Le chercheur a envie d'être le premier - avec d'autres, peu importe, mais le premier. Et d'avoir les moyens d'y parvenir. Et un bon chercheur souhaitera toujours collaborer avec les meilleurs. Cela m'évoque un proverbe africain : tout seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin.

C'est une ode à la pluridisciplinarité…

On a besoin de disciplines fortes, il ne faut pas l'oublier. Mais il est vrai que les réponses aux grands enjeux sociétaux ou aux questions pos[...]

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