Alstom devrait donner plus de temps à Siemens pour son offre

PARIS (Reuters) - Alstom devrait donner mardi deux à trois semaines de plus au groupe allemand Siemens pour finaliser une proposition plus détaillée de rachat de ses activités d'énergie, a-t-on appris de sources proches du dossier. Le conseil d'administration du français, surveillé de près par le gouvernement, doit se réunir mardi en fin de journée pour examiner des propositions de rachat de ses activités énergie émanant de l'américain General Electric et de Siemens. Siemens, qui réunissait son conseil de surveillance mardi sur le sujet, n'a pas encore détaillé son offre. Selon certaines sources, elle valoriserait la branche énergie Alstom à 14,5 milliards de dollars (10,5 milliards d'euros) en incluant du cash et des transferts d'actifs ferroviaires au groupe français. D'autres sources évoquaient ces derniers jours une offre de General Electric (GE) de 13 milliards de dollars en numéraire (9,4 milliards d'euros) pour la branche énergie d'Alstom, qui regroupe des activités telles que les turbines pour centrales électriques, l'éolien et les systèmes de transmission de l'électricité. Siemens et GE n'ont pas souhaité commenter ces informations et personne n'était disponible dans l'immédiat chez Alstom. La branche énergie d'Alstom, pour laquelle le groupe semblait sur le point d'engager des négociations exclusives avec GE avant une déclaration d'intention de Siemens survenue dimanche, représente 70% du chiffre d'affaires total du groupe français. Suspendu en Bourse depuis vendredi, Alstom avait annoncé dimanche qu'il poursuivrait sa réflexion stratégique et qu'il informerait le marché d'ici mercredi matin, sans plus de précisions. Alors que sa branche énergie emploie près de 9.000 personnes en France, le gouvernement a de nouveau tenté mardi de peser sur le dossier en recevant les syndicats et en annonçant avoir saisi l'Autorité des marchés financiers (AMF) pour demander au conseil d'Alstom "une égalité de traitement stricte" entre l'offre de Siemens et de GE. ALSTOM FINALISE LE PLUS GROS CONTRAT DE SON HISTOIRE Bercy, qui pilote le dossier pour l'Etat mais dispose de moyens limités pour contrer un rachat, a cependant dû préciser que le gouvernement n'avait jamais eu l'intention de céder des titres EDF pour financer une prise de participation dans Alstom, comme le rapportait le Nouvel Observateur. L'Etat s'inquiète en particulier du sort de la branche transport d'Alstom, qui fabrique les trains à grande vitesse (TGV), que ni GE ni Siemens ne semblent à ce stade envisager de reprendre mais que le groupe allemand proposerait de renforcer en lui transférant ses propres trains à grande vitesse et ses locomotives. Le pôle Transport, pour lequel Alstom a envisagé une introduction en Bourse qui ne serait plus d'actualité si la société était réduite à ses seules activités ferroviaires, a en outre annoncé mardi la finalisation d'un contrat de 4 milliards d'euros, le plus gros de l'histoire du groupe, pour la fourniture de trains de banlieue en Afrique du Sud. François Hollande s'était efforcé lundi de se poser en arbitre en recevant tour à tour le président de GE, Jeff Immelt, le patron de Siemens, Joe Kaeser, et Martin Bouygues, PDG du groupe du même nom et premier actionnaire d'Alstom avec 29% du capital LE "COEUR DE L'IDENTITÉ DE LA FRANCE INDUSTRIELLE" Les réactions politiques à une éventuelle vente de la branche énergie d'Alstom se sont multipliées depuis jeudi, jour où la presse a dévoilé le projet d'Alstom et de GE, l'Etat cherchant avant tout à préserver l'emploi au sein d'un groupe qu'il a largement contribué à sauver de la faillite il y a dix ans. L'ex-Premier ministre François Fillon, a souligné mardi sur France Inter que GE et Siemens étaient des entreprises "pas des prédateurs", tout en jugeant "insupportable dans cette affaire (...) d'apprendre un vendredi qu'une entreprise va être vendue dimanche". "Il faut aujourd'hui qu'Alstom accepte de repousser les délais pour que toutes les solutions soient envisagées et en particulier qu'on puisse réellement regarder entre GE et le projet européen avec Siemens ce qui est le plus avantageux (...), en particulier pour l'emploi", a-t-il estimé. Pour un autre ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, qui s'exprimait sur RTL, "l'Etat doit avoir une stratégie franco allemande mais ça ne se fait pas dans la précipitation, dans l'improvisation, week-end après week-end". Le coprésident du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a de son côté dit sur France 2 : "Je mets en garde François Hollande (...) Il s'agit du coeur de l’identité de la France industrielle." (Sophie Sassard à Londres, Arno Schuetze et Maria Sheahan à Francfort, Benjamin Mallet, Natalie Huet, Emmanuel Jarry et Yann Le Guernigou à Paris, édité par Jean-Michel Bélot)