Alexandra Sojfer, victime d’une mère maltraitante : “Comment vivre lorsque vous avez été battue, dénigrée, humiliée ?"

Frappée, dévalorisée, dénigrée, isolée : pendant 45 ans, Alexandra Sojfer a vécu l’enfer. Sous l’emprise de sa mère, elle a été victime de maltraitances psychologiques et physiques, de l’enfance à l’âge adulte. Pour Yahoo, elle a accepté de se livrer sur son histoire, de lever le voile sur l’ignominie, revenant sur ses plus sombres années et sur la manière dont elle s’est reconstruite. Un témoignage poignant.

Viols, agressions, deuils insurmontables, accidents de la vie : dans "Trauma", anonymes et célébrités reviennent pour Yahoo sur un traumatisme qui a bouleversé leur vie.

Comment réussir à être mère soi-même lorsque la nôtre a été défaillante et malveillante ? Cette question, Alexandra Sojfer se l’est posée des milliers de fois. Victime de maltraitance psychologique et physique, de l’enfance à l’âge adulte, elle a grandi sans amour, une situation compliquée et destructrice qu’elle ne souhaite à personne. Pour Yahoo, la quadragénaire, autrice de l'ouvrage “Verticale”, s’est livrée sur son histoire, expliquant la manière dont elle est parvenue, malgré ses fondations si fragiles, à s’épanouir personnellement et professionnellement.

Dès son plus jeune âge, Alexandra subit les foudres de sa mère. Elle n’est visiblement pas la bienvenue. “J’ai à peine trois semaines, je pleure comme un bébé normal. Elle me frappe pour me faire pleurer réellement pour quelque chose”. À son grand désarroi, toute son enfance suit le même schéma. Les claques, le martinet et les coups de ceinture font partie de son quotidien. La jeune fille est fustigée, dénigrée, humiliée. Considérée comme une “inculte” et “une bonne à rien”, elle n’a aucun repère, aucune liberté et seulement un droit, “celui de se taire”. “Peut-être que c’est mérité”, se demande-t-elle, se murant dans le silence.

“Non seulement, je n’en parlais pas mais je faisais tout pour que ça ne se voit pas. Donc je lui volais son maquillage, il fallait que je paraisse parfaite”, se remémore-t-elle. Finalement, ce n’est que plus tard, alors qu’elle se trouve toujours dans cette quête de l’amour inconditionnel qu’elle finit par ouvrir les yeux sur la folie de sa mère. Comme elle l’explique, elle découvre, par le biais d’échanges de messages et de mails, qu’elle incite son ex-mari à l’attaquer en justice. “Elle disait que j’étais une perverse narcissique et l’utilisait pour me terrasser”.

Des mots qui trouvent écho en lui et qui le conduisent à commettre l’irréparable. ”Quelques mois après, mon ex-mari verse en plein jour un jerrican d'essence sur ma boutique. Il y met le feu”, explique-t-elle tout en précisant avoir été sur les lieux 20 minutes plus tôt avec leur fille. “Nous aurions pu brûler vivantes toutes les deux” (Retrouvez l'intégralité de l'interview en fin d'article).

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Si les plaies se sont, depuis, refermées, les cicatrices, elles, sont toujours présentes. Comme elle l’explique, le manque d’amour maternel et son besoin irrépressible d’être aimée a eu de nombreuses répercussions sur sa vie, notamment “la soumission envers les hommes”. Un cercle vicieux et sans fin. “Lorsque vous êtes habituée à ces relations toxiques, les conséquences sont dévastatrices”. Baisse de l’estime de soi, manque de confiance, sentiment d’abandon, de trahison, d’humiliation : la vie d’Alexandra est ponctuée de bas, de désillusions. “Ma mère m’a donné la vie mais, pendant 45 ans, elle a tout fait pour me l’ôter”.

Et dans sa malchance, personne n’a jamais parlé mise à part sa sœur qui a récemment confirmé les violences subies tout en lui remémorant des souvenirs enfouis. “Je souhaiterais qu’il y ait un détonateur pour les gens témoins de ces maltraitances”, confie-t-elle tout en expliquant n’avoir jamais pu pardonner à sa mère. “L’idée du pardon n’est même pas envisageable”. “Vivre ce que j’ai vécu, c’est juste de la destruction. Mon combat aujourd’hui, c’est de dire à toutes ces femmes que l’on peut s’en sortir”, explique-t-elle.

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Pendant toutes ces années d’emprise, Alexandra ne parvient pas à penser à elle, à se recentrer et à se focaliser sur ses besoins. “On s’oublie, on met une armure de guerrière qui étouffe les sentiments”. Et lorsqu’elle croit enfin être délivrée de tous ses maux après avoir coupé les ponts avec sa mère, elle rechute, d’une manière qu’elle n’aurait jamais imaginée. Lorsque son ex-mari décède en janvier 2018, Alexandra tombe dans une sortie de dépression. “Il ne se passe plus rien dans ma vie, j’ai mon travail mais il n’y a plus rien de toxique autour de moi”, explique-t-elle tout en confiant avoir eu “des idées noires”. "J’étais dans une souffrance extrême. Je croyais que j'étais une merde et c’est là où j’ai décidé d’entamer une psychothérapie”.

Finalement, Alexandra a fait preuve d’une force de caractère incomparable, une force héritée de son père. Elle a accepté l’inacceptable, de ne pas être aimée par sa propre mère. Elle a également réalisé et mis le doigt sur ses véritables aspirations et a compris qu’il fallait fuir à tout prix, s’échapper afin de pouvoir se reconstruire et apprendre à s’aimer.

Retrouvez l'intégralité de l'interview d'Alexandra Sojfer