Aileen Cannon, cette juge qui pourrait aider Donald Trump (et fait hurler les démocrates)

Aileen Cannon, ici répondant aux questions lors de son audition de nomination par le Comité sénatorial américain sur la magistrature au Dirksen Senator Office Building à Washington, aux États-Unis, le 29 juillet 2020.
Aileen Cannon, ici répondant aux questions lors de son audition de nomination par le Comité sénatorial américain sur la magistrature au Dirksen Senator Office Building à Washington, aux États-Unis, le 29 juillet 2020.

ÉTATS-UNIS - Après avoir plaidé non coupable des charges à son encontre, pour sa gestion négligente de secrets d’État après son départ de la Maison Blanche, Donald Trump a ouvert la voie à un procès historique. Celui-ci pourrait être organisé rapidement, ce qui permettrait de minimiser les interférences avec la campagne de 2024.

C’est la première fois qu’un ancien président américain est inculpé au niveau fédéral, un événement qui fait l’objet d’une attention médiatique vertigineuse.

Le républicain est accusé d’avoir mis la sécurité des États-Unis en péril en conservant des documents confidentiels, dont des plans militaires ou des informations sur des armes nucléaires, dans des toilettes ou des débarras de sa résidence de luxe de Mar-a-Lago, en Floride. Le dossier judiciaire a été attribué au hasard parmi un groupe de cinq juges disponibles, dans les comtés de Miami-Dade et de Palm Beach, à Aileen Cannon, une magistrate conservatrice que Donald Trump avait nommée à vie en novembre 2020. Cette juge de 42 ans pourrait donc devenir une alliée de poids pour lui.

Une expérience cumulée de 14 jours de procès présidés

Elle est surtout devenue immédiatement une cible des démocrates du Congrès. Ils ont ainsi demandé à Aileen Cannon de se récuser de la supervision de ce procès médiatique, car soupçonnée de partialité et très peu expérimentée. « Je suis très préoccupé par ses décisions antérieures et par l’attitude qu’elle pourrait adopter dans cette affaire. Dans l’intérêt de la justice, elle pourrait envisager de se récuser », a ainsi déclaré le sénateur Richard Blumenthal, membre de la commission judiciaire du Sénat.

« Pour une affaire aussi importante que celle-ci, il est essentiel d’avoir un juge expérimenté, intelligent et impartial, a lui tweeté Michael Bromwich, ancien inspecteur général du ministère de la Justice. La juge Cannon échoue sur chacun de ces points. Si elle a une quelconque conscience de soi, elle devrait se récuser ».

Avant d’être nommée par Donald Trump, Aileen Cannon n’avait jamais exercé de fonctions judiciaires et, étant donné qu’environ 98 % des affaires pénales fédérales sont résolues par des accords de plaidoyer aux États-Unis, elle n’a eu qu’une occasion limitée d’apprendre à présider un procès.

Une base de données de Bloomberg Law répertorie ainsi 224 affaires pénales qui lui ont été confiées, et un examen de ces affaires par le New York Times a permis d’en identifier quatre qui ont fait l’objet d’un procès. Il s’agissait dans chaque cas d’une affaire relativement banale, comme un criminel accusé de possession illégale d’arme à feu. Au total, ces quatre affaires ont représenté seulement 14 jours de procès.

Quand Cannon rendait une décision favorable à Trump

La partialité d’Aileen Cannon a par ailleurs déjà été largement mise à mal en septembre dernier. Selon la presse américaine, il est ainsi largement admis qu’elle en a fait preuve en faveur de Donald Trump lorsqu’elle a supervisé une action en justice intentée par celui-ci pour contester la perquisition, approuvée par le tribunal, de sa demeure de Mar-a-Lago.

Elle avait alors rendu un avis suspendant temporairement l’enquête après cette perquisition. Celui-ci ordonnait ainsi aux enquêteurs de ne pas utiliser les documents classifiés saisis jusqu’à ce qu’un expert spécial nommé par ses soins ne les examine, comme l’avaient demandé les avocats de Donald Trump.

La juge avait déclaré que Donald Trump, en tant qu’ancien président, était confronté à une « atteinte à sa réputation » d’un « ordre de grandeur nettement différent » de celui d’une autre personne confrontée à une perquisition, une saisie et une mise en accusation potentielle similaires. Un argument sur lequel l’expert spécial avait lui-même exprimé ensuite son scepticisme.

Un groupe composé de deux personnes nommées par Donald Trump et d’une personne nommée par Barack Obama au sein de la cour d’appel du 11e district des États-Unis avait ensuite infirmé l’avis d’Aileen Cannon en des termes très clairs. En soulignant à plusieurs reprises les multiples erreurs et omissions de la juge, la cour avait déclaré que « le tribunal de district a abusé de son pouvoir discrétionnaire en exerçant sa compétence sur la requête [de Donald Trump] en ce qui concerne les documents classifiés ».

La juge a le pouvoir de faire dérailler les poursuites

L’un des grands enjeux du futur procès de Donald Trump sera de savoir quelles preuves peuvent être admises et quels témoignages peuvent être entendus, par la seule décision d’Aileen Cannon. Une marge de manœuvre importante, qui pourrait faire retarder ou même dérailler les poursuites si elle le souhaite.

Elle peut également jouer de son influence au moment de la procédure de sélection du jury. Les juges de première instance disposant d’une grande marge de manœuvre pour dénoncer la partialité potentielle des jurés, Aileen Cannon pourrait potentiellement remplir le jury de personnes favorables à Donald Trump. Le jury devant rendre un verdict unanime, un seul juré partial pourrait entraîner l’annulation du procès.

Le républicain jouit aussi en Floride d’une image nettement plus favorable qu’à Washington, ce qui devrait jouer en sa faveur au moment de cette sélection des jurés.

Toutes ces décisions pourraient par ailleurs faire l’objet d’un appel de la part de l’accusation. Ce qui aurait pour conséquence de faire traîner la procédure en longueur. Un scénario qui serait favorable à Donald Trump, qui a tout intérêt à ce qu’un verdict soit rendu le plus tardivement possible. Son inculpation bloque en effet désormais toutes les autres enquêtes en cours. Mais surtout, il espère pouvoir remporter la présidentielle de 2024 et, une fois de retour à la Maison Blanche, être protégé de la prison en cas de condamnation, et pouvoir même tenter de se gracier lui-même.

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