Agression d’une élue à Saint-Denis : les enquêteurs suspectent un individu d’avoir payé pour frapper Oriane Filhol

Oriane Filhol, élue de Saint-Denis, a été tabassée en décembre 2023, suscitant une vague d’indignation.
Oriane Filhol / Getty images Oriane Filhol, élue de Saint-Denis, a été tabassée en décembre 2023, suscitant une vague d’indignation.

FAITS DIVERS - Petit à petit, les enquêteurs reconstituent le puzzle de l’agression d’Oriane Filhol. L’élue, adjointe au maire de Saint-Denis, en région parisienne, a été victime en décembre d’une attaque en pleine rue. Alors qu’elle sortait d’une réunion de travail et rentrait à son domicile, deux hommes l’ont frappée violemment au visage et sur le corps à coups de poing. De nouvelles informations sont apparues dans cette affaire, apprend-on ce samedi 16 mars.

L’affaire avait choqué l’opinion publique, mais avait également été pointée du doigt par les politiques comme un énième exemple de violence envers les élus. Une enquête avait alors été ouverte, et commence enfin à porter ses fruits. Selon les derniers éléments, l’agression d’Oriane Filhol aurait été commanditée.

Un chef d’entreprise bien connu de la commune est suspecté d’avoir ordonné cette attaque. Interpellé ce mercredi par la police, Mouloud B., 57 ans, a été présenté vendredi en comparution immédiate. Ayant demandé le renvoi de son procès, il sera jugé le 4 juin et a été placé entre-temps sous contrôle judiciaire, ont indiqué samedi 16 mars le parquet de Bobigny et la mairie de Saint-Denis, confirmant une information du Parisien.

Un « daron » propose 2 500 euros pour frapper l’élue

Son profil a été identifié suite à l’arrestation en janvier de trois jeunes hommes de Saint-Denis, âgé de 18 ans à 22 ans, dans le cadre de cette agression. À leur procès, ils expliquent s’être vu promettre 2 500 euros chacun par un mystérieux commanditaire pour frapper une personne qu’ils ne connaissaient pas.

Ils ne donnent pas son nom, évoque un « daron », un « blédard ». Or des images de vidéosurveillance de la ville montrent un homme, suspecté d’être Mouloud B., leur désigner du doigt Oriane Filhol au moment où elle sort de sa réunion. « Il fallait juste taper et rien dire, pas de vol, rien. Moi pour 2 500 euros je frappe, même si c’est une femme », raconte aux enquêteurs celui qui a frappé la victime trentenaire.

La justice a condamné les agresseurs à des peines allant de huit mois de prison avec sursis probatoire à 18 mois de prison dont six avec sursis probatoire. Le tribunal a estimé que deux d’entre eux ne connaissaient pas la qualité d’élue de la victime.

« Je l’avais croisé quelques jours après mon agression »

En découvrant les images de vidéosurveillance après son agression, Oriane Filhol croit reconnaître dans le donneur d’ordres Mouloud B., un entrepreneur de la ville qui a fait l’objet de plusieurs portraits dans la presse pour son engagement social. Cependant elle écarte aussitôt cette hypothèse car « cela semblait vraiment trop gros ».

« C’est le genre de mec qui est un peu copain avec tout le monde, cela me semblait complètement aberrant que ce soit lui », raconte-t-elle ce samedi. « Je l’avais croisé quelques jours après mon agression, il s’était inquiété de mon état de santé, etc. ».

« C’est un entrepreneur de Saint-Denis qui gravite autour de la sphère parapublique, aux confins des sphères publiques et économiques. Il a une boîte d’électricité qui posait des câbles de fibre optique et faisait de la formation de jeunes », développe le maire (PS) de Saint-Denis, Mathieu Hanotin.

Le mobile du passage à tabac reste un mystère

Mais début mars, le chef d’entreprise vient s’asseoir à côté de l’adjointe à un gala de boxe pour prendre de ses nouvelles. De but en blanc, son interlocuteur tente de justifier son absence le soir des faits au conseil d’administration du bailleur social de la ville, dont Oriane Filhol sortait lorsqu’elle a été attaquée.

« Au moment où il s’est assis à côté de moi, j’ai développé l’intime conviction que c’était lui », relate Oriane Filhol, s’apercevant qu’il porte les mêmes chaussures noires à semelle blanche que l’inconnu de la vidéosurveillance. Sur ses indications, l’enquête est alors relancée et, après des recoupements, Mouloud B. interpellé mercredi matin à son domicile. « Il reconnaît qu’il était présent le soir des faits sur les lieux tout en se disant complètement étranger à l’agression », indique à l’AFP le parquet de Bobigny.

Le mobile du passage à tabac reste encore nébuleux, la mairie et la victime disant ne pas avoir de litige avec l’entrepreneur. « Tout cela nous apparaît complètement flou et incompréhensible », indique Mathieu Hanotin, en espérant que l’audience de juin permettra de faire la lumière sur cette affaire.

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