Affaire Delphine Jubillar: les éléments qui ont motivé le renvoi de Cédric Jubillar devant une cour d'assises
Cédric Jubillar sera bien jugé par une cour d'assises pour le meurtre de son épouse Delphine, une infirmière de 33 ans disparue dans le Tarn en 2020. Ce mardi 21 novembre, deux juges d'instruction ont communiqué aux parties leur ordonnance de mise en accusation estimant qu'il existe des charges suffisantes pour renvoyer Cédric Jubillar devant la cour d'assises d'Albi.
Dans ce document, long de 61 pages et que BFMTV a pu consulter, les magistrates reviennent sur les "investigations minutieuses et exhaustives qui ont permis non seulement d'exclure l'ensemble des autres hypothèses, mais également de réunir de nombreux éléments constituant des charges suffisantes à l'encontre du mis en examen".
Près de trois ans d'instruction qui permettent donc de mettre en évidence suffisamment d'éléments à charge contre Cédric Jubillar.
Difficile d'"accepter la séparation"
Malgré l'absence de corps ou d'éléments matériels pouvant mettre en cause Cédric Jubillar, il réside un contexte. Delphine Jubillar, 33 ans, avait rencontré un autre homme et comptait refaire sa vie avec lui.
Plusieurs semaines avant sa disparition, elle avait entamé des démarches en ce sens. Les magistrats relèvent que Cédric Jubillar était parfaitement conscient de cette situation, et mettent en avant "la difficulté majeure" de ce dernier "à accepter la séparation voulue par sa femme".
Pour les juges d'instruction, ce contexte constitue un mobile, d'autant que Cédric Jubillar avait intensifié le "flicage" de la mère de ses deux enfants et que sa jalousie en était "décuplée", proférant des menaces de morts devant plusieurs de ses proches.
Le père de famille était également "très préoccupé par le devenir de la maison conjugale dans le cadre de la procédure de divorce". Selon le document, Cédric Jubillar était attaché à cette maison qu'il avait lui-même construite mais savait que sa situation professionnelle et financière ne lui permettrait pas de racheter la part de Delphine lors du divorce.
La "certitude" d'une dispute
Les juges d'instruction, pour motiver ce renvoi devant la cour d'assises du Tarn, reprennent point par point les éléments qui établissent "avec certitude qu'une dispute a éclaté le soir de la disparition de Delphine Assaguel".
À commencer par le témoignage du petit garçon du couple, qui a évoqué de manière constante des échanges verbaux mais aussi une dispute physique. L'enfant a déclaré avoir vu ses parents se disputer dans un espace, entre le canapé et le sapin, correspondant à l'endroit où une branche des lunettes de vue de Delphine Jubillar a été retrouvée trois semaines après la disparition de la mère de famille.
Les expertises ont établi que les cassures sont dues à "des efforts dynamiques appliqués de l'extérieur vers l'intérieur", c'est-à-dire un coup ou une pression mais pas par une chute.
Par ailleurs, des voisines ont entendu des cris de femmes apeurées provenant de la maison. "Si des cris, dont la réalité ne fait aucun doute (...) ne proviennent pas de Delphine Aussaguel (nom de jeune fille de Delphine Jubillar, NDLR), la question se pose alors de leur provenance, dans la mesure où aucun autre événement n'a été signalé cette nuit-là", notent les juges, procédant par élimination.
Les pistes écartées
L'enquête a également permis d'évacuer les autres thèses comme le suicide, un accident ou un départ volontaire. "Elle n'avait en outre aucune raison de partir sans en informer personne", notent les magistrates du tribunal de Toulouse qui rappellent que Delphine Aussaguel serait alors partie volontairement "en pyjama" avec seulement son téléphone, ce qui "paraît impossible".
"La disparition ne peut être que le résultat de l'action d'un tiers", poursuivent-elles, rappelant qu'aucun ravisseur ne s'est manifesté et qu'aucun élément ne démontre qu'elle a été enlevée.
Cédric Jubillar est le seul à dire que Delphine était sortie promener les chiens, alors que c'est lui, selon plusieurs témoignages, qui s'en occupait au quotidien. Il est également le dernier à l'avoir vue vivante.
D'autres éléments à charge
La personnalité mais aussi le comportement de Cédric Jubillar finissent de compléter les éléments à charge contre lui. Au moment de la disparition de sa femme, il n'a entrepris que peu de recherches pour la retrouver, en témoigne son podomètre. Par la suite, il a "éludé les questions gênantes (...) modifié ses versions en s'adaptant aux éléments d'investigation (...) et en rejetant la faute sur les autres".
"Force est de constater que Cédric Jubillar n'a cessé de mentir lors de l'information judiciaire", ont déploré les juges d'instruction.
Elles ont enfin relevé des éléments suspects, comme le haut de pyjama porté par Cédric Jubillar, sur lequel les enquêteurs ont retrouvé une trace de sang de Delphine, attestant d'un "contact" entre les deux époux "alors qu'il clame qu'ils ne se regardaient même plus depuis longtemps".
Quelques instants après la disparition de sa femme, Cédric Jubillar s'est empressé de remplir une machine à laver, sachant qu'une couette et une housse de couette présentaient toutes deux des traces de sang, tout comme les eaux de vidange du lave-linge - mais le profil génétique n'a jamais pu être identifié.
Les juges sont revenus sur le mystérieux sens du véhicule de Delphine Jubillar, qui a changé pendant la nuit. À chaque fois, les explications de l'accusé ont été "confuses et peu convaincantes".
Les avocats du père de famille ont désormais la possibilité de faire appel de cette ordonnance de mise en accusation.