Adele a-t-elle bloqué la production de vinyles avec son nouvel album?

876450610001_6282728256001

Est-ce la faute d'Adele, si l'industrie du vinyle est débordée, les chaînes de production submergées et si certains artistes ne peuvent pas presser leurs disques? "Il faut blâmer Ed Sheeran et Adele, et puis ABBA tant qu'on y est", avançait ainsi carrément le Times, le 9 novembre dernier, ajoutant que "non content d'encombrer les charts, les superstars de la pop ont accaparé la capacité des usines de pressage de vinyles, déjà surchargées à l'approche de Noël".

Car si l'impressionnante quantité de galettes pressées à l'occasion de la sortie de son dernier album 30, ce vendredi - 500.000 selon les informations de Variety - a monopolisé les ressources, la diva Britannique est loin d'être la seule responsable de la situation.

Adele, Coldplay, Taylor Swift

Ed Sheeran en a parlé avec beaucoup de franchise fin octobre au moment de la sortie de son album =, relevant, au micro d'une radio australienne qu'il n'y avait que "3 usines de vinyles dans le monde", et qu'il fallait donc largement anticiper la sortie d'un album. Ajoutant en riant: "Adele a réservé toutes les usines de vinyles" avant de préciser que plusieurs grosses sorties d'albums en cette fin d'année, avaient contribué à créer un embouteillage.

"Il y avait moi, Coldplay, Adele, Taylor [Swift], ABBA, Elton [John]! Tout le monde voulait faire presser ses vinyles au même moment".

Résultat, les artistes qui pèsent moins dans l'industrie musicale, ou ne sont pas dans le giron d'une grosse maison de disque, ont toutes les peines du monde à se frayer un chemin jusqu'aux chaînes de productions de vinyles.

La chanteuse américaine Laura Jane Grace, s'en alarmait début novembre sur Twitter: "Si vous n'êtes pas dans un groupe, et que vous ne finissez pas votre album dans les trois mois qui viennent, le vinyle ne sortira pas avant 2023".

Main basse sur les filières de production

Laurent Didailler, directeur général de Pias France, maison de disques distribuant des labels indépendants, pointait déjà en septembre dernier, dans Télérama, la responsabilité des majors, qui "ont fait main basse sur toutes les filières de production".

Le phénomène n'a rien de nouveau, mais il a été amplifié par la pandémie. La pénurie de polymères, liée à des difficultés d'approvisionnement dès mars 2021, a ainsi ralenti la production, et fait grimper les prix.

Avant cela, l'incendie, en février 2020, d'Apollo Masters Corp, une des deux seules entreprises au monde à produire la laque utilisée pour les masters audio qui permettent de créer les disques vinyles, a porté un premier coup à l'industrie de pressage de vinyles.

A l'autre bout du marché, la demande de vinyle, en pleine explosion depuis maintenant une dizaine d'années, poursuit son irrésistible ascension. Aux Etats-Unis, comme en Grande-Bretagne, le marché du vinyle a dépassé celui du CD, générant plus de 619 millions de dollars outre-Atlantique et. En France, 4,5 millions de vinyles se sont vendus en 2020, soit 500.000 de plus qu'en 2019, selon le Snep.

Inflation d'albums

Enfin, si la demande est en plein boom, l'offre est également florissante. Pour Josh Cohen, qui dirige le label indépendant américain Memorials of Distinction, cité par le magazine spécialisé NME, il y a ainsi une véritable inflation d'albums, entre ceux ui ont été repoussés en raison de la pandémie et ceux qui ont été écrits pendant ce hiatus loin de la scène.

"A peu près tous les artistes du monde ont sorti un album entre septembre 2021 et septembre 2022", ironise-t-il.

Tous se bousculent pour produire des vinyles, devenus un véritable nerf de la guerre. Le format se révèle en effet bien plus rentable que le streaming. Ainsi, pour Josh Cohen, la racine du problème, c'est la monétisation de la musique, plus que crise du vinyle. "Rien de tout cela ne serait un problème, si les artistes pouvaient gagner de l'argent avec la musique dématérialisée", avance-t-il ainsi.

Adele a annoncé le 13 novembre dernier, qu'elle ne ferait pas de tournée pour cet album, en raison de la pandémie. Une importante source de revenus en moins et une raison de plus de presser le plus de disques possible.

Article original publié sur BFMTV.com