À quoi sert le Sénat ?

Dimanche, la moitié du Sénat va être renouvelée. Quel rôle joue cette institution dans la vie publique ?

Le roi Charles III prononce un discours devant les membres du parlement au Sénat français à Paris, le 21 septembre 2023. (crédit : REUTERS/Benoit Tessier)
Le roi Charles III prononce un discours devant les membres du parlement au Sénat français à Paris, le 21 septembre 2023. (crédit : REUTERS/Benoit Tessier)

La droite part grande favorite des prochaines élections sénatoriales qui se tiendront dimanche 24 septembre. À cette occasion, 170 sièges du Palais du Luxembourg seront pourvus, soit la moitié du Sénat. Cette Haute assemblée, qui compose le Parlement avec l’Assemblée nationale, compte au total 348 sénateurs élus pour six ans au suffrage universel indirect. Seuls les grands électeurs, c’est-à-dire les députés, les conseillers généraux et régionaux ainsi que les délégués des conseils municipaux sont appelés aux urnes. Mais quel est le rôle du Sénat ?

Le vote des lois

Selon l’article 24 de la Constitution, “le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales” et défend ainsi ses intérêts auprès de l’Assemblée nationale et de l’exécutif. À ce titre, la seconde chambre examine et vote les textes législatifs au même titre que l’Assemblée nationale. En cas de désaccord cependant, le gouvernement peut donner le dernier mot aux députés, représentant tous les citoyens français et élus au suffrage universel direct.

“Le rôle des sénateurs n’est pas pour autant négligeable puisque 80% des amendements votés au Sénat restent dans les textes finaux et que cette configuration n’arrive pas souvent”, relève Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l’Université Panthéon Assas (Paris II).

Le Sénat pèse aussi dans les négociations, notamment lorsque des commissions mixtes paritaires (composées de sept députés et de sept sénateurs) sont réunies en cas de désaccord persistant entre les assemblées sur un projet ou une proposition de loi.

Un rôle de contre-pouvoir

“Du point de vue du fondement, la seconde chambre est pensée comme une force de modération, à la fois par rapport aux emportements de la chambre basse et à la domination de l’exécutif, étant donné que le gouvernement n’est pas responsable devant le Sénat, souligne le spécialiste des institutions. Lors du dernier quinquennat par exemple, les commissions d’enquête sur les affaires Benalla ou McKinsey venaient du Sénat.”

La “chambre haute” a aussi le pouvoir de déstabiliser la majorité présidentielle. “Elle peut imposer son point de vue en faisant gagner ou perdre du temps au gouvernement lors de l’examen des projets ou propositions de loi, ce qui permet à la contestation de monter dans la rue ou dans leur propre majorité”, souligne par ailleurs Benjamin Morel.

Autrefois vu comme un obstacle par le gouvernement actuel, le Sénat est revenu dans les bonnes grâces de l’exécutif. La majorité présidentielle, fragile à l’Assemblée nationale, ne lui permet plus de faire voter ses textes aussi facilement. “Sous le précédent quinquennat, les projets de loi étaient d’abord déposés à l’Assemblée, aujourd’hui ils le sont davantage au Sénat, détaille Benjamin Morel. La stratégie est de conduire Les Républicains, majoritaires au Sénat, à se positionner d’abord pour que le texte soit plus facilement voté par les députés du même bord ensuite.”

Une chambre en sursis ?

La question de la suppression du Sénat revient régulièrement sur le devant de la scène. D’abord parce que les électeurs se sentent mal représentés par les sénateurs, mais aussi parce que sa couleur politique, à droite, n’a pas beaucoup changé depuis 1958. “Les communes moyennes, rurales et semi-rurales et les communes les plus aisées, notamment dans l’Ouest de la France, sont surreprésentés de par le mode de scrutin”, souligne Benjamin Morel.

Malgré les critiques, réformer le Sénat se heurte à de nombreux obstacles juridiques. Pour le supprimer, une révision constitutionnelle est nécessaire. Or, elle doit être votée à la majorité des trois cinquièmes par le Parlement réuni en Congrès ou être soumise à un référendum. La probabilité que le Sénat vote en ce sens est assez faible. Le mode de scrutin dépend, lui, d’une loi organique qui ne peut pas être modifiée sans l’aval du Sénat. De plus, “la seconde chambre est moins fragile qu’il y a quelques années, estime Benjamin Morel. Son rôle de contre-pouvoir notamment a permis de réhabiliter l’institution auprès de l’opinion publique.”

VIDÉO - Sénateur : rôle, compétences et salaire