À Sainte-Soline, le Samu empêché d’intervenir ? La préfecture dément

Des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) lors d’une manifestation interdite contre les « bassines », le 25 mars.
Des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) lors d’une manifestation interdite contre les « bassines », le 25 mars.

SAINTE-SOLINE - La polémique est née samedi 25 mars, pendant les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres. La Ligue des droits de l’Homme (LDH), qui avait envoyé six équipes de trois observateurs sur le site du rassemblement interdit contre les « mégabassines », avait interpellé la préfète du département.

« Madame la préfète, laissez passer les secours d’urgence ! Nos observateurs ont constaté l’entrave par les forces de l’ordre à l’intervention des secours pour une situation d’urgence absolue », avait écrit la LDH dans un communiqué de presse. Selon elle, un blessé se trouvait dans une zone « parfaitement calme », où rien ne faisait « obstacle à l’intervention du Samu », et il aurait dû être pris en charge « sans délai » par les secours.

Selon Le Monde et franceinfo, la LDH et plusieurs associations disposent désormais d’un enregistrement téléphonique pour établir que les forces de l’ordre ont interdit au Samu 79 de se rendre sur le terrain de la manifestation.

« On n’enverra pas d’hélicoptère ou de moyen Smur sur place parce qu’on a ordre de ne pas en envoyer par les forces de l’ordre »
Un opérateur du Samu

Dans cet enregistrement, on peut notamment entendre un échange téléphonique entre un médecin et un opérateur du Samu. « On n’enverra pas d’hélicoptère ou de moyen Smur sur place parce qu’on a ordre de ne pas en envoyer par les forces de l’ordre », affirme l’opérateur du Samu dans l’enregistrement.

Le médecin lui répond alors que les observateurs de la LDH sur place affirment que la situation est « calme » et donc « qu’il est possible d’intervenir ». « Je suis d’accord avec vous, vous n’êtes pas le premier à nous le dire, le problème c’est que c’est à l’appréciation des forces de l’ordre », poursuit l’opérateur du Samu, qui lui explique dépendre « d’un commandement ».

Nouvelles précisions dans la foulée de l’opérateur du Samu : « Donc, pour l’instant, on attend de rassembler les victimes au niveau de l’église de Sainte-Soline, c’est ce qui est en train d’être fait, avec des moyens pompiers qui se déplacent sur site pour prendre en charge et ramener. Pour l’instant, pas de moyens de Smur ou d’hélico qui peuvent se pointer sur place. »

La mise au point de la préfecture des Deux-Sèvres

En réaction, la préfecture des Deux-Sèvres a publié un long communiqué dans la soirée de mardi intitulé « Droit de réponse à l’article du Monde en date du 28 mars 2023 qui prétend prouver que “le Samu n’a pas eu le droit d’intervenir” ». Elle a tenu à rappeler « le rôle essentiel joué par un médecin de la gendarmerie, qui a notamment porté secours à un participant blessé en urgence absolue, au milieu d’un groupe d’opposants agressifs. Il a été la cible de projectiles à son départ, alors qu’il a prodigué les premiers secours et attendu l’arrivée du Samu à ses côtés ».

La préfète Emmanuelle Dubée indique que « le principe fondamental d’intervention des secours dans un contexte hostile est de garantir au premier chef la sécurité des personnels des sapeurs-pompiers ou du Samu. Pour ce faire, il appartient aux forces de l’ordre, informées en temps réel de la situation, de définir si l’arrivée d’un véhicule de secours à un certain point est possible ou non de façon sûre pour lui ».

« Il n’est donc pas surprenant que, si ces conditions de sécurité n’étaient pas réunies, les forces de l’ordre aient pu, pour certaines géolocalisations et dans certaines périodes de temps, indiquer qu’un envoi d’ambulance n’était pas possible dans l’immédiat », estime la préfète dans son communiqué. « Ce n’est donc que pour éviter que le Samu ou les pompiers ne soient pris à partie ou victimes collatérales des affrontements violents que cette consigne a pu être passée, dans un contexte où les groupes violents se déplaçaient très rapidement. S’assurer de la sécurité des personnels de secours est une règle de base qui gouverne en toutes circonstances leur engagement auprès de victimes. »

Sur BFMTV ce mercredi matin, Emmanuelle Dubée a réaffirmé qu’il « n’y a pas eu de défaillance des services de secours, des pompiers et du Samu, ni de tout autre service de l’État dans la prise en charge des blessés ». « Je vais même dire que je trouve que c’est une insulte de dire qu’il y a eu un blocage fait sciemment des forces de l’ordre pour empêcher de porter secours », a-t-elle ajouté.

Après les affrontements du week-end à Sainte-Soline, deux manifestants étaient encore mardi dans le coma, dont un avec un pronostic vital engagé dont les parents ont porté plainte pour « tentative de meurtre ». Les organisateurs ont évoqué 200 blessés, dont 40 grièvement, et les autorités ont fait état de 47 gendarmes blessés.

Un bilan bien plus lourd que lors de la précédente manifestation contre les retenues d’eau dans les Deux-Sèvres, également interdite, en octobre dernier.

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