À l’Eurovision 2024, la guerre entre Israël et le Hamas s’est invitée au premier rang de la compétition

Des manifestants, ici devant la mairie de Malmö, pour dénoncer la présence d’Israël à l’Eurovision, en avril 2024.
JOHAN NILSSON / TT News Agency/AFP via Getty Ima Des manifestants, ici devant la mairie de Malmö, pour dénoncer la présence d’Israël à l’Eurovision, en avril 2024.

INTERNATIONAL - United by music, vraiment ? Alors que doit se tenir, ce samedi 11 mai, la grande finale de l’Eurovision en direct sur France 2 depuis Malmö et à laquelle chantera Slimane, le slogan de l’édition 2023 repris cette année par la Suède semble un poil compromis, au regard de l’ombre de la guerre à Gaza qui plane sur le concours.

À l’Eurovision 2024, un symbole pro palestinien interdit porté par le chanteur suédois Eric Saade

En cause, la présence d’Israël à l’Eurovision. Le pays figure parmi les 37 États à s’affronter en chanson, comme depuis 1973, date à laquelle il a rejoint la compétition en tant que membre de l’Union européenne de radiotélévision, l’organe qui chapeaute le concours. Il l’a, depuis, remportée à quatre reprises (1978, 1979, 1998 et 2018).

La participation israélienne interroge certains, notamment après l’exclusion des sociétés russes de radiodiffusion de l’UER, dans le sillage de la guerre en Ukraine. Des pétitions se sont multipliées au cours des précédents mois pour exiger l’éviction du pays.

En Irlande, par exemple, plus de 400 artistes ont exhorté, en décembre dernier, le candidat irlandais à l’Eurovision, Bambie Thug, à se ranger du « bon côté de l’histoire » en boycottant le concours de chansons en raison de la présence d’Israël. Et fin mars, les candidats de neuf pays ont appelé à un cessez-le-feu durable.

De l’autre côté, l’actrice britannique Helen Mirren, mais aussi le musicien Boy George ou encore Gene Simmons, un des fondateurs des géants du hard-rock Kiss, et plus de 400 autres célébrités ont publié une lettre ouverte, en février, pour dénoncer les appels au boycott d’Israël et apporter leur soutien à la décision prise par les organisateurs.

Eden Golan « confiante »

La présence d’Eden Golan, représentante d’Israël à l’Eurovision, a pendant un temps été compromise. Les organisateurs n’avaient pas validé sa première chanson Pluie d’octobre, largement perçue comme une référence aux victimes de l’attaque menée par le Hamas, le 7 octobre, la trouvant trop chargée politiquement.

Selon certains commentateurs, les paroles comme « il n’y a plus d’air à respirer » et « c’étaient tous de bons enfants, chacun d’entre eux » évoquaient les victimes. D’autres, telles que « Je suis toujours brisée par cet ouragan », n’ont guère contribué à dissiper les spéculations. Bien que d’abord récalcitrante, la délégation israélienne a finalement accepté de modifier la chanson, condition sine qua non pour se présenter sur scène. À l’AFP, la chanteuse de 20 ans s’est dite « confiante », malgré la polémique et les menaces dont elle a fait l’objet.

La compétition se veut « apolitique »

Depuis, l’UER a tenté de calmer le jeu, en rappelant certaines règles de « bonne conduite » à l’intérieur de la Malmö Arena, où se tient la compétition. Parmi elles : l’interdiction de brandir tout drapeau autre que ceux des participants et du drapeau arc-en-ciel, ainsi que toute bannière à message politique, ou tout symbole faisant référence à la Palestine.

Des règles en vigueur de longue date mais que n’a pas respecté par exemple le chanteur suédois Eric Saade le mardi 7 mai sur scène à l’occasion de la première demi-finale. Le chanteur, dont le père est d’origine palestinienne, portait en effet un keffieh autour du bras pendant l’interprétation de sa chanson Popular, la chanson avec laquelle il avait fini troisième à l’Eurovision en 2011.

La représentante de l’Irlande Bambie Thug a également tenté d’apporter son soutien sur scène, elle avait inscrit sur son corps les mots « cessez-le-feu » et « liberté pour la Palestine » en alphabet ogham irlandais, avant d’essuyer un refus des organisateurs.

Plus fort encore, lors de la seconde demi-finale durant laquelle la candidate israélienne s’est qualifiée, la télévision belge VRT a choisi d’interrompre la diffusion de sa prestation, diffusant un message de soutien à la Palestine à la place.

« Il s’agit d’une action syndicale. Nous condamnons la violation des droits humains commise par Israël. De plus, le pays détruit la liberté de la presse. C’est pourquoi nous avons décidé d’interrompre la diffusion momentanément.

Malmö sous les manifestations

Pendant ce temps dans le reste de la ville décorée de fanions multicolores, plusieurs milliers de personnes ont manifesté lors de rassemblements pour la Palestine, parmi lesquels Greta Thunberg. Avec 362 133 habitants - et 186 nationalités -, « tous les conflits se retrouvent sur une toute petite superficie », résume à l’AFP Andreas Önnerfors, professeur d’histoire des idées et spécialiste de l’Eurovision.

La sécurité est passée au cœur des préoccupations, d’autant que la Suède a relevé l’été dernier son niveau d’alerte après des actes de profanation du Coran. Les contrôles pour accéder aux sites ont été renforcés et l’immense salle de spectacles a été entourée d’agents de sécurité. Enfin, des policiers de Norvège et du Danemark ont été missionnés pour aider leurs collègues suédois, plus lourdement armés que d’habitude.

De son côté, Israël a déconseillé à ses citoyens de se rendre dans la ville suédoise, évoquant les projets de « manifestations anti-israéliennes » et des « appels à s’en prendre à des Juifs et des Israéliens ». Plus que jamais, la géopolitique semble avoir pris les devants sur les strass, les paillettes et la légèreté à l’Eurovision.

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