Éphéméride : le 30 mars 1894, Verlaine fête ses 50 ans en vers

Je ne crois plus au langage des fleurs
Et l’Oiseau bleu pour moi ne chante plus.
Mes yeux se sont fatigués des couleurs
Et me voici las d’appels superflus.

C’est en un mot, la triste cinquantaine.
Mon âge mûr, pour tous fruits tu ne portes
Que vue hésitante et marche incertaine
Et ta frondaison n’a que feuilles mortes !

Ainsi commence le poème Anniversaire, écrit moins de deux ans avant la mort du poète,
le jour même de ses 50 ans. Ce n’est pas le plus connu de Verlaine ; il ne fait pas partie des
grands recueils que sont les Poèmes saturniens, Romances sans paroles, les Fêtes galantes ou encore Sagesse. Il est de ces écrits discrets, au rayonnement peut-être plus craintif, mais empli d’une ardeur nouvelle, à la façon dont les crépuscules jettent leurs derniers feux.

S’y trouve la sobre élégance du poète, sa douce ironie et son autodérision : la mélancolie
légendaire qu’on lui attribue, en réalité, est souvent désamorcée par le rire. En l’occurrence, il est amusant de noter que ce poème, publié dans le recueil Dédicaces accompagné de la
mention « Et j’avais cinquante ans quand cela m’arriva », est dédié à un peintre ami de
l’écrivain, William Rothenstein, qui n’avait alors que 22 ans — l’histoire ne dit pas comment
le jeune homme reçut ce surprenant cadeau…

Mais ce poème n’est pas le seul écrit verlainien composé un 30 mars. Un autre, première
moitié du diptyque Le Charme du Vendredi Saint, a été rédigé l’année précédente, le 30
mars 1893. Curieuse façon de fêter son a...


Lire la suite sur LeJDD