Merkel prône la mobilisation contre les eurosceptiques allemands

Angela Merkel a prôné la mobilisation contre les eurosceptiques et tendu la main aux indécis encore nombreux, samedi lors de la dernière journée d'une campagne électorale marquée par une incertitude persistante chez les 62 millions d'Allemands appelés à voter dimanche. /Photo prise le 21 septembre 2013/REUTERS/Kai Pfaffenbach

par Erik Kirschbaum et Sakari Suoninen BERLIN/FRANCFORT (Reuters) - Angela Merkel a prôné la mobilisation contre les eurosceptiques et tendu la main aux indécis encore nombreux, samedi lors de la dernière journée d'une campagne électorale marquée par une incertitude persistante chez les 62 millions d'Allemands appelés à voter dimanche. La chancelière, qui brigue un troisième mandat de quatre années, sait qu'un tiers des électeurs n'ont pas encore fait leur choix à la veille du scrutin. Son parti, l'Union chrétienne démocrate (CDU) et son parti-frère de Bavière, l'Union chrétienne sociale (CSU) sont crédités ensemble d'environ 40% des intentions de vote, ce qui la met en place de remporter un troisième mandat. L'alliance entre l'Union chrétienne démocrate (CDU) de la chancelière et l'Union chrétienne sociale (CSU) est créditée de 40% des intentions de vote, en hausse d'un point, selon un sondage Forsa. Mais l'émergence d'Alternative pour l'Allemagne (AfD), qui réunit les eurosceptiques, pourrait priver les conservateurs d'un certain nombre de voix, d'autant que l'incertitude demeure sur le maintien au Bundestag des libéraux du FDP, partenaires de la CDU-CSU dans le gouvernement sortant. "Beaucoup de gens vont faire leur choix à la dernière minute. Le moment est venu de s'adresser à tous les électeurs indécis et d'obtenir leur soutien", a déclaré Angela Merkel devant 4.000 partisans réunis dans une salle de boxe à Berlin. La chancelière devait ensuite se rendre sur la côte baltique pour un dernier meeting de campagne. Angela Merkel n'a pas fait mention de l'AfD dans son discours mais cette petite formation apparue il y a sept mois n'a cessé de gagner en audience profitant du mécontentement lié à la crise de l'euro. L'AfD milite pour la sortie de la zone euro de la Grèce et des pays endettés du sud de l'Europe. RETOUR DU THÈME DE L'EUROPE Samedi, Merkel a consacré près de la moitié de son allocution à défendre l'Europe qui a été la grande absente de la campagne, la CDU et les sociaux-démocrates du SPD étant globalement d'accord sur les moyens de régler la crise actuelle. "L'Europe est économiquement importante, oui, mais il y a plus que ça. L'an prochain marquera le centième anniversaire de la Première Guerre mondiale", a déclaré la chancelière. "La plupart d'entre nous n'ont jamais eu à vivre la guerre". "Dans les années à venir, nous devons continuer à travailler au succès de ce continent magnifique", a-t-elle poursuivi. Si Angela Merkel n'a fait aucune mention de l'AfD, cela ne veut pas dire qu'elle n'y pense pas de manière fréquente, au point que son très respecté ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, est sorti de sa réserve cette semaine pour affirmer que les eurosceptiques étaient "dangereux" pour l'économie allemande. Les enquêtes d'opinion donnent à l'alliance CDU-CSU une avance d'environ 13 points sur le SPD, ce qui devrait être suffisant pour que Merkel soit le premier chef de gouvernement à accomplir trois mandats depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La perte d'audience des libéraux du FDP partenaires du cabinet sortant pose un problème à la chancelière d'autant que les résultats combinés des trois formations de l'opposition (SPD, Verts et Die Linke) placent les deux camps au coude à coude, sachant qu'une alliance rouge-rouge-verte SPD-Verts-Die Linke est pratiquement exclue. Deux scénarios s'affrontent à la veille du scrutin : une courte majorité avec l'appoint du FDP ou des négociations forcées avec le SPD qui obligeraient à des changements gouvernementaux majeurs dont le départ de Wolfgang Schäuble. L'AfD demeure juste en dessous du seuil des 5% nécessaires pour disposer d'élus au Bundestag, la chambre basse du parlement, mais le score des eurosceptiques pourrait être suffisant pour priver la droite d'une majorité. "DÉMAGOGUES" Si elle demeure la personnalité politique la plus populaire, Angela Merkel peine parfois à susciter une adhésion forte y compris au sein de son camp. "Je n'aime pas sa politique en matière énergétique, je n'aime pas la préférence fiscale accordée aux couples mariés et je voudrais l'instauration d'un salaire minimal", explique Ingrid Gauckler, actrice de 35 ans, qu'un ami a "traînée" au meeting, samedi. "Sa politique vise seulement à aider les riches", ajoute-t-elle. La chancelière peut pourtant se targuer d'avoir su guider l'Europe de manière prudente pendant la crise de la dette, d'avoir su maintenir la croissance dans son pays et un taux de chômage qui est au plus bas depuis la réunification. Face à elle, le candidat du SPD, Peer Steinbrück, n'a pas réussi à se démarquer autrement qu'en demandant une hausse de l'imposition des ménages les plus aisés et l'instauration d'un salaire horaire minimal de 8,5 euros. Steinbrück était ministre des Finances dans le gouvernement de "grande coalition" que dirigea Merkel entre 2005 et 2009 et il sait que cette expérience a coûté de très nombreux électeurs à son parti il y a quatre ans. Et lui aussi a le regard déjà tourné vers le résultat de l'AfD qu'il qualifie de parti de "démagogues". Pierre Sérisier pour le service français, édité par Danielle Rouquié