Le président ukrainien prêt à abroger certaines lois controversées

par Richard Balmforth KIEV (Reuters) - Le président ukrainien Viktor Ianoukovitch s'est une nouvelle fois entretenu avec les dirigeants de l'opposition lundi et a accepté d'abroger certaines des lois restreignant la liberté de manifestation lors de la session extraordinaire du Parlement prévue mardi, lit-on sur le site de la présidence. Citant la ministre de la Justice, Olena Loukach, qui a assisté aux discussions, le site ajoute que les parlementaires examineront également la "responsabilité" du gouvernement dans la crise qui a déjà fait six morts. L'opposition réclame la démission du Premier ministre Mikola Azarov et une amnistie pour tous les manifestants arrêtés ces deux derniers mois. Le chef de l'Etat s'est dit prêt à accéder à cette dernière demande, selon son site internet, mais seulement à condition que les manifestants quittent les bâtiments gouvernementaux qu'ils occupent et démantèlent leurs barricades. Olena Loukach a par ailleurs indiqué qu'Arseni Iatseniouk, un des leaders de l'opposition, avait refusé le poste de Premier ministre que Viktor Ianoukovitch lui avait proposé pour tenter de sortir de la crise. Un autre chef de file des contestataires, l'ancien boxeur Vitali Klitschko, avait déjà décliné le poste de vice-Premier ministre en dénonçant une manoeuvre du pouvoir pour tenter de diviser les opposants. Pendant la rencontre entre Ianoukovitch et les opposants, parmi lesquels figurait aussi le nationaliste Oleh Tiahnibok, le parti du président avait pourtant annoncé que ses députés ne feraient aucune concession mardi. "Le Premier ministre ne partira pas. Le Parlement ne votera pas la démission du gouvernement", avait déclaré Mikhaïlo Tchetchetov, porte-parole du Parti des régions, à l'agence de presse russe Interfax. De même, avait-il dit, le groupe des Régions au Parlement entendait bloquer toute tentative d'abrogation des lois votées le 16 janvier. "Nous sommes catégoriquement contre la modification de ces lois. De quoi parlons-nous ici ? Les bandits doivent aller en prison", avait-il déclaré. NOUVELLE MANIFESTATION MARDI La Patrie, le parti de l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko, aujourd'hui dirigé par Arseni Iatseniouk, a appelé à un rassemblement mardi sur la place de l'Indépendance à Kiev pour soutenir les députés de l'opposition. "Venez à midi soutenir les députés qui sont prêts à prendre sur eux la responsabilité de se débarrasser de ces lois dictatoriales", lit-on dans un communiqué. Plusieurs centaines de personnes campent sur la place de l'Indépendance à Kiev et dans une rue adjacente, tandis que les manifestants les plus radicaux font face à la police devant le stade de football du Dynamo Kiev non loin de là. La tension s'est accrue lundi quand la ministre de la Justice a menacé de faire instaurer l'état d'urgence si les manifestants n'évacuaient pas le bâtiment de son ministère pris d'assaut dans la nuit de dimanche à lundi. Les manifestants ont fini par quitter les lieux, après avoir défié la police pendant plusieurs heures. Ils ont promis de revenir en l'absence de progrès à la séance du Parlement mardi. L'occupation du ministère de la Justice est la troisième action de ce genre en quatre jours. Vendredi, des manifestants ont occupé le ministère de l'Agriculture. Samedi, ils ont pris le ministère de l'Energie et ont seulement accepté de quitter les lieux lorsque le ministère a fait savoir que leur action pourrait perturber l'approvisionnement énergétique du pays. "Si le bâtiment du ministère de la Justice n'est pas libéré immédiatement, je serai contrainte d'en appeler (...) au Conseil de la sécurité et de la défense nationales pour lui demander un débat sur la mise en place de l'état d'urgence dans le pays", a déclaré Olena Loukach dans une déclaration vidéo. La Haute représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, s'est dite "préoccupée" par cette menace et a avancé à mardi un déplacement initialement programmé jeudi et vendredi à Kiev. Avec Natalia Zinets et Pavel Politiouk; Danielle Rouquié et Tangi Salaün pour le service français