Malgré sa victoire, Merkel est contrainte de nouer une alliance

par Noah Barkin BERLIN (Reuters) - La victoire écrasante des conservateurs allemands aux élections législatives de dimanche aura un goût d'inachevé dans la bouche d'Angela Merkel qui se retrouve contrainte de trouver des partenaires pour gouverner la première économie européenne. Ne souffrant d'aucun conteste, le raz-de-marée de la CDU et de son allié bavarois, la CSU, ne permet pas au centre-droit allemand de former seul un gouvernement et avec seulement 4,8%, le parti qui fut son partenaire au cours de la précédente législature, le FDP, n'a pas réuni suffisamment de suffrages pour rester au Bundestag. Alors que la quasi-intégralité des bulletins de vote ont été dépouillés, le score de la CDU-CSU reste à 41,5% des voix, son score le plus élevé depuis 1990, un niveau insuffisant pour décrocher la majorité absolue des sièges à la chambre basse du Parlement allemand. Les sociaux-démocrates du SPD ont quant à eux recueilli 25,7% des voix, Die Linke en a obtenu 8,6% devant les Verts, crédités de 8,4%. La chancelière elle-même a reconnu que sa tâche s'annonce difficile. Priée de dire si elle avait prévu de contacter un parti, elle a répondu "Peut-être ne trouverons-nous personne qui accepte de faire quelque chose avec nous." Elle devrait se tourner en premier lieu vers le SPD, avec lesquels elle a gouverné lors de son premier mandat, de 2005 à 2009. Le SPD pourrait de son côté être tenté de repousser les avances d'Angela Merkel à moins qu'elle ne paraisse disposée à en payer chèrement le prix, que ce soit en termes de portefeuilles ministériels ou d'orientations politiques. Au cours de la campagne électorale, le chef de file des sociaux-démocrates, Peer Steinbrück, a défendu la création d'un salaire minimum et une hausse des taxes sur les hauts revenus, deux idées farouchement combattues par Angela Merkel. Le SPD pourrait également exiger d'obtenir le ministère des Finances, ce qui pousserait Wolfgang Schäuble vers la sortie. Le président du SPD Sigmar Gabriel n'a pas totalement exclu l'hypothèse de négociations avec Angela Merkel, tout en prévenant que rien n'était encore gravé dans le marbre. Les sociaux-démocrates se souviennent que leur participation au premier gouvernement Merkel leur avait coûté très cher aux élections suivantes. Une réunion doit être organisée vendredi par les dirigeants du SPD qui devront se prononcer sur les options qui sont à leur disposition. S'ils décident d'ouvrir des négociations avec la chancelière, ces discussions pourraient, d'après un certain nombre d'experts, être les plus longues et les plus âpres depuis 1945. "Les divergences sont plus fortes qu'en 2005", a reconnu un conseiller d'Angela Merkel qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat. "Si vous regardez le programme du SPD, il est bien plus ancré à gauche qu'il ne l'était alors", a-t-il ajouté. Les études d'opinion soulignent toutefois que le principe d'une coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates et largement plébiscité en Allemagne. Elle serait également vue d'un bon oeil par ses partenaires européens qui espèrent qu'une présence du SPD au gouvernement soit de nature à infléchir la ligne pro-austérité prônée par Angela Merkel. Si le SPD refusait de s'allier à la CDU-CSU, la chancelière pourrait se tourner vers les Verts, même si un tel partenariat pourrait s'avérer plus compliqué encore à mettre sur pieds. Nicolas Delame pour le service français