Israël libère une vingtaine de prisonniers palestiniens

par Ali Sawafta RAMALLAH, Cisjordanie (Reuters) - Israël a libéré mardi 26 prisonniers palestiniens dans le cadre de ses négociations avec l'Autorité palestinienne, à la veille de l'arrivée dans la région du secrétaire d'Etat américain John Kerry, et après avoir annoncé son intention de construire 1.400 nouveaux logements dans les colonies juives de Cisjordanie. Le chef de la diplomatie américaine, à l'origine de la relance des pourparlers israélo-palestiniens en juillet dernier après trois ans de pause, doit entamer mercredi son dixième voyage au Proche-Orient depuis sa nomination, fin janvier. Il se rendra à Jérusalem et Ramallah. Pour faciliter les discussions, Israël a accepté de libérer 104 prisonniers palestiniens de longue durée en quatre étapes. Les 26 détenus libérés mardi, qui se trouvaient dans la prison d'Ofer en Cisjordanie, constituent le troisième groupe. La plupart d'entre eux ont été condamnés pour le meurtre d'Israéliens et emprisonnés avant ou juste après la signature des accords de paix intérimaires d'Oslo en 1993. Les Palestiniens ont accueilli dans la liesse ces détenus considérés comme des héros nationaux. "Nous vous promettons que ce n'est pas la dernière fois et que d'autres groupes de héros reviendront vers nous dans un avenir proche, si Dieu le veut", a dit le président palestinien Mahmoud Abbas en accueillant les anciens détenus au siège de l'Autorité palestinienne à Ramallah. L'un des prisonniers libérés, Djamal Abou Moussine, condamné pour meurtre, a expliqué qu'ils souhaitaient transmettre le message que "les gens ne les oublient pas, ils espèrent être libérés et ils vivent dans l'espoir". Trois prisonniers ont été conduits dans la bande de Gaza, dont le Fatah de Mahmoud Abbas a perdu le contrôle au profit des islamistes du Hamas. "Les héros sont de retour", ont scandé des centaines de personnes qui les ont portés à travers les rues de l'enclave palestinienne. "HUILE SUR LE FEU" Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a condamné ces célébrations palestiniennes. "Les meurtriers ne sont pas des héros. Ce n'est pas ainsi que l'on fait la paix", a-t-il dit. Les familles des Israéliens tués ou blessés par ces prisonniers ont déposé en vain des recours en justice pour empêcher leur libération, et des dizaines d'entre eux ont manifesté à Jérusalem-Est contre l'amnistie, en portant des parapluies noirs et en tenant des photographies de leurs proches blessés ou tués. "Libérer des terroristes au nom de la paix, c'est comme verser de l'huile sur le feu pour l'éteindre", a dit Yonah, l'un des manifestants. "Il nous explosera au visage." A Dahiyat al Zira, un village de Cisjordanie, des vandales juifs présumés ont incendié trois voitures palestiniennes et inscrit le message "Salutations à John Kerry, à suivre" sur une maison. La police israélienne a ouvert une enquête sur ces incidents. Aux Etats-Unis, Marie Harf, porte-parole du département d'Etat, a en revanche salué un "pas en avant". L'objectif des Américains est de définir d'ici avril le cadre d'un accord intérimaire portant sur toutes les questions au coeur du conflit israélo-palestinien, notamment la sécurité, le statut de Jérusalem et le sort des réfugiés palestiniens. Il s'agirait ensuite d'ouvrir une nouvelle année de négociations censées déboucher sur un accord définitif permettant la création d'un Etat palestinien coexistant pacifiquement avec Israël. La construction de 1.400 nouveaux logements risque cependant de compliquer les discussions entre les deux parties, de même que la décision du gouvernement d'approuver, dimanche, un projet d'annexion de la rive occidentale du Jourdain, en Cisjordanie occupée, alors que les Palestiniens veulent en faire la frontière orientale d'un futur Etat. La négociatrice en chef d'Israël, la ministre centriste de la Justice Tzipi Livni, a toutefois fait savoir qu'elle userait de toutes ses prérogatives pour empêcher l'adoption par la Knesset de ce projet issu de la frange la plus à droite du Likoud, le parti du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Avec Nidal al Mughrabi à Gaza, Ori Lewis à Jérusalem, Lesley Wroughton à Washington et Noah Browning à Dahiyat al Zira; Jean-Stéphane Brosse, Julien Dury et Bertrand Boucey pour le service français