Les dessous du red carpet

De la Grèce antique à la Croisette, retour sur le parcours de la fameuse moquette vermillon.

A Cannes

Le tapis, long de 60 mètres, est renouvelé avant chaque projection officielle, soit en moyenne trois fois par jour. Au total, c’est 1,8 kilomètre de moquette, commandée en Italie, qui est utilisé pendant dix jours. Et intégralement recyclé ensuite (depuis 2008), en paillassons de voitures ou en composants plastique. Selon nos estimations (le festival ne communiquant pas sur cette question tarifaire), le red carpet cannois pourrait coûter jusqu’à 15 840 euros – un rouleau de moquette rouge « spécial protocole » coûte environ 215 euros, d’après un fabricant, et il en faudrait 72.

Photo Romain Bernardie-James

1 La première apparition

En 458 avant Jésus-Christ, dans Agamemnon d’Eschyle, le héros, à son retour de la guerre de Troie, est accueilli par son épouse vengeresse Clytemnestre qui dépose au sol des étoffes de pourpre devant le palais. Agamemnon juge l’hommage un peu excessif et coûteux car d’ordinaire réservé à honorer les dieux, mais il finit par fouler le tapis vermillon. Sa femme le tuera peu après.

2 La couleur pourpre

«La pourpre était issue d’un matériau précieux et rare (la macération de mollusques, ndlr), et donc réservée aux personnages importants, à Rome, ou à Byzance», explique Annie Mollard-Desfour, chercheuse au CNRS, spécialiste de la couleur. Pour Anne Varrichon, anthropologue spécialiste du fait coloré, cette utilisation du tapis rouge comme «signal d’un privilège» vient de l’Occident, s’est exportée avec la colonisation, puis a gagné les pays musulmans: «Cette couleur fait appel à des repères collectifs qui outrepassent les clivages culturels et temporels. Elle évoque le fluide vital qu’est le sang : la mort par blessure, la nubilité, la fécondité.»

3 La parenthèse bleue

Pendant une courte période, le tapis disposé devant le théâtre Debussy, où sont projetés les films de la sélection Un certain regard, fut bleu. Le rouge est de nouveau de mise.

4 (...)

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