Législatives: retraites, TVA, voile... Ces promesses de campagne tempérées ou repoussées par le RN

Depuis le début de la campagne des élections législatives, le Rassemblement national (RN) semble modifier son programme au jour le jour. La faute a une situation budgétaire "catastrophique", justifient Jordan Bardella et Marine Le Pen, qui veulent aussi rassurer leurs nouveaux alliés et apparaître crédibles avant une possible prise de pouvoir.

Les électeurs de Jordan Bardella le 9 juin lors des élections européennes se mobiliseront-ils pour les candidats du Rassemblement national lors des élections législatives du 30 juin et 7 juillet? Plus que jamais aux portes du pouvoir, le parti d'extrême droite a largement modifié le programme qu'il compte mettre en œuvre en cas de victoire, depuis l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron.

Dernier revirement en date: la suppression de la TVA sur les produits de première necessité qui est renvoyée à un "second temps", sans préciser quand, tout comme l'interdiction du port du voile, renvoyée à "2027".

Des annonces faites par Jordan Bardella dans un entretien au Parisien publié ce lundi 17 juin. Le président du RN a aussi clarifié la position de son parti sur l'abrogation de la réforme des retraites, qui ces derniers jours n'était plus une "priorité" en cas de victoire. La retraite à 64 ans sera abrogée "à partir de l'automne", a assuré Jordan Bardella.

Dans la soirée pourtant, son nouvel allié Éric Ciotti avait estimé au 20 heures de France 2 qu'"il (n'était) pas dit que la réforme des retraites sera abrogée", en renvoyant aux "marges de manoeuvre qui seront données" par un audit des finances publiques.

"C'est le RN qui conduit cette coalition", lui a indirectement répondu Jordan Bardella, en prônant par ailleurs de permettre à "ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans de partir à la retraite avec 40 annuités à un âge légal de départ de 60 ans".

Le programme économique de cette alliance entre la droite d'Éric Ciotti et le parti à la flamme ne semble donc pas encore être finalisé... et pourrait ne pas l'être avant le premier tour des législatives.

"On va regarder l'état des finances et en fonction de ce que l'on va trouver, on va ajuster", affirmait le vendredi 14 juin Philippe Ballard, porte-parole du RN, sur BFMTV, évoquant alors une abrogation de la réforme des retraites... "en 2025 ou 2026".

Autre mesure phare du projet présidentiel de Marine Le Pen: la suppression de l'impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans. Elle n'est plus mentionnée dans la profession de foi de Jordan Bardella et des candidats du RN pour les législatives.

Deux jours seulement après l'annonce de la dissolution par Emmanuel Macron, Marine Le Pen annonçait la couleur sur le plateau du 20 heures de TF1: son programme pour la présidentielle ne sera pas appliqué en cas de victoire le 7 juillet.

D'abord parce que plusieurs mesures, relatives à l'immigration, dépendent du président de la République. Aussi parce que Jordan Bardella sera "contraint par la situation désastreuse budgétaire laissée par Emmanuel Macron", a affirmé Marine Le Pen, disant vouloir effectuer des "économies qui ne sont pas faites".

La précaution vise un double objectif. D'abord, prévenir un risque de déception et "rassurer" ses nouveaux alliés et au-delà de son propre électorat, les propositions du RN étant jugées "pas crédibles" par 68% des Français, selon un sondage OpinionWay paru ce week-end.

Dans sa conquête du pouvoir, le RN a-t-il abandonné ses mesures sur le pouvoir d'achat pour s'accorder avec la droite d'Éric Ciotti sur l'immigration et la sécurité? Au risque que des électeurs déplorent ces renoncements et se détournent des urnes. Selon une étude d'Elabe pour BFMTV, le pouvoir d'achat a été le sujet qui a compté le plus dans le choix des Français lors des élections européennes (45%)

Suivaient l'immigration (37%) et le dérèglement climatique et l'environnement (22%). Au pied du podium on retrouvait la sané et la sécurité des biens et des personnes, à 21%.

Mais l'immigration était aussi le sujet le plus important pour les électeurs du Rassemblement national, des Républicains et de Reconquête. Entre un programme "d'union nationale" et un programme "d'union des droites", Jordan Bardella semble donc avoir choisi pour la seconde option.

Invité sur France info ce mardi 18 juin, le Premier ministre Gabriel Attal a pointé "les reniements" de Jordan Bardella et du Rassemblement national, pointant un "refus d'obstacle."

Pour sa part, sur TF1, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a également taclé les reculs du RN. "Toutes les mesures qui ont été proposées pendant la campagne des européennes ont disparu", a-t-il pointé, ajoutant qu'il n'y avait "plus rien" dans le programme. "C'est le vide sidéral", a-t-il encore critiqué.

"Ils n’ont pas écrit leur programme avec un stylo mais avec une gomme", a fustigé le communiste Ian Brossat sur X. "Nouveau recul, nouveau mensonge. Ils vous mentent", tacle de son côté le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

"Le programme économique du RN, c’est comme une motte de beurre : plus tu le sors, plus il fond", ironise de son côté la macroniste Olivia Grégoire.

Signe que d'autres renoncements pourraient être actés dans les prochaines semaines, le candidat à Matignon a mis en garde les lecteurs du Parisien ce lundi 17 juin. "Le projet présidentiel demeure, mais je suis extrêmement réaliste sur l’état financier du pays. Je ne vendrai pas aux Français des mesures pour faire plaisir", a lancé l'eurodéputé de 28 ans.

Article original publié sur BFMTV.com