Est-ce utile de manifester contre Éric Zemmour ?

Manifestation contre la présence d'Éric Zemmour pour un meeting à Nantes (Sebastien SALOM-GOMIS / AFP)

Nantes, Ajaccio, Biarritz... Les meetings d'Éric Zemmour s'accompagnent souvent de manifestation d'opposants. Dernière en date à Nantes, où des heurts ont opposé des manifestants aux forces de l'ordre.

Nantes, Ajaccio, Biarritz... Les meetings d'Éric Zemmour s'accompagnent souvent de manifestation d'opposants. Dernière en date et la plus marquante, à Nantes samedi 30 octobre, où des heurts ont opposé des manifestants aux forces de l'ordre, chargées d'empêcher les manifestants d'approcher la salle où se tenait le meeting.

Ces manifestations "donnent de l'audience" à Zemmour

"Ces manifestations font indirectement le jeu de Zemmour. Cela évènementialise le moindre de ses déplacements, crée une dynamique de campagne et donne l'audience qu'il n'y aurait pas eu sans ces manifestations. Car les meetings réunissent peu de monde comparé à l'audience des chaines infos qui vont parler des manifestations, et qui n'auraient pas autant parlé d'un simple meeting", analyse Philippe Moreau-Chevrolet, expert en communication.

Des évènements suivis en direct sur les chaînes d'informations comme BFMTV, mais aussi relayés par les journaux télévisés de 20h de TF1 et France 2 le soir même, qui ont évoqué les heurts en marge du meeting. De quoi toucher plusieurs millions de téléspectateurs, quand le meeting de Nantes n'a réuni que 1500 personnes selon les organisateurs.

Zemmour dans les pas de Trump

Avant Nantes, à Ajaccio, des échauffourées avaient éclaté entre les partisans de l'ex-chroniqueur et des militants de Core in Fronte quelques minutes avant une réunion publique. Quelques jours plus tard à Biarritz, la maire LR Maider Arosteguy refuse de le recevoir dans le centre-ville en raison de "risque de troubles à l'ordre public" et le contraint à se déplacer en périphérie de la ville.

"Ces manifestations permettent à Zemmour de faire comme Trump, qui a fait face à des manifestations antifa durant sa campagne, et faisait mine d'interroger 'où sont les vrais fascistes ?'", rappelle le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite.

"Le débat sur la façon de s'opposer à un candidat d'extrême droite remonte à des années, avec Jean-Marie Le Pen, puis Marine Le Pen. Les associations, les syndicats manifestent parfois, certains candidats refusent de débattre comme Anne Hidalgo", resitue Jean-Yves Camus.

Le risque ? "Que des électeurs pensent qu'il est une victime"

Pour l'instant, aucun candidat ni aucun parti n'ont appelé à manifester ou soutenu une manifestation anti-Zemmour. Seuls des associations et syndicats comme Solidaires ou Attac ont pour l'instant organisé localement ces manifestations, au gré des déplacements du candidat encore non-déclaré. "Le risque c'est qu'une partie des électeurs pense que l'intolérance est du côté des manifestants anti-Zemmour, et estime qu'il est une victime", estime le politologue. Une opposition dont se sert Éric Zemmour pour revêtir ses habits de victime.

Les manifestations anti-Zemmour, contreproductives ?

"Certains politiques et syndicats organisent la diabolisation de Zemmour comme face au FN dans les années 80. Cela a fonctionné en marginalisant Jean-Marie Le Pen puis Marine Le Pen. Mais les recettes qui marchaient dans les années 80 pourraient ne pas fonctionner dans la France d'aujourd'hui", estime Philippe Moreau-Chevrolet.

Pour l'expert en communication, "les Français ont été marqué par les gilets jaunes et peuvent avoir peur de la gauche et de l'extrême gauche. Avec leur mobilisation contre Zemmour, le risque c'est que certains électeurs se disent "Zemmour les dérange c'est peut être qu'il est la bonne solution" ou bien "je suis de droite, et Zemmour dérange la gauche. N'est-il pas le meilleur candidat ?", s'interroge le spécialiste en communication. Prochaines étapes pour Éric Zemmour : Lyon, Dijon et Bordeaux.

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