Publicité

Zemmour à Toulon: Pourquoi LR a de quoi s'inquiéter

Salle comble, attention médiatique, ralliement d'anciens électeurs et d'un conseiller de Nicolas Sarkozy... La conférence d'Éric Zemmour dans le Var avait tout de l'avertissement politique pour LR.

PRÉSIDENTIELLE 2022 - En politique, il y a les signaux faibles et les signaux forts. Le signal fort, vendredi soir à Toulon (Var), c’est le monde qui est venu acclamer le polémiste le plus en vue du moment au cri de “Zemmour président”, lors d’une rencontre présentée comme littéraire au palais des Congrès de la ville qui a fait salle comble. Si quelques militants repérés par Libération et L’Express ont accueilli le probable candidat avec des “facho”, le public à l’intérieur -qui avait payé sa place 20 euros- était conquis.

Le polémiste d’extrême droite qui entretient encore le suspense quant à sa déclaration de candidature mais qui s’est mis en retrait du Figaro pour effectuer un tour de France autour de la promotion de son livre La France n’a pas dit son dernier mot (Rubempré), a été écouté, acclamé et applaudi par les quelque 800 personnes présentes pour ce premier déplacement en forme de meeting. L’autre signal fort, c’est la présence de nombreux journalistes qui se sont précipités autour lui, comme au temps de Nicolas Sarkozy en Camargue en 2007.

“Mes amis les journalistes”

L’image revêt une charge symbolique. Le polémiste qui a longtemps chroniqué la vie politique, le sait parfaitement et ne s’est pas privé de la relayer avec ce message à peine ambigu “mes amis les journalistes”, assorti d’un émoji auréolé, laissant entendre qu’il n’aurait rien fait pour obtenir un tel succès et qu’il en serait surpris. “C’est mon intérêt de faire durer l’ambiguïté”, a-t-il redit à Toulon, comme sur RTL mardi dernier.

Après une semaine médiatique ultra-chargée, alors même qu’il n’est pas candidat, Éric Zemmour continue d’attirer la lumière et de se placer au centre du jeu, jusqu’à obtenir un article dans le très sérieuxNew York Times vendredi soir décrivant le presque candidat comme “dominant le débat public en France” et comme susceptible de venir “perturber le duel Macron-Le Pen”.

Il n'y a presque que des anciens SarkozystesOlivier Ubéda, recruté par Eric Zemmour pour sa communication

Il y a aussi les signaux faibles. D’abord, la présence dans l’assistance, repérée par un journaliste du Figaro, d’Olivier Ubéda, ancien communicant de Nicolas Sarkozy en 2007, recruté par Éric Zemmour selon une information de La Lettre A. Ensuite, la présence, dans la salle, d’anciens sympathisants sarkozystes. Comme Chloé, 73 ans, artiste peintre, interviewée par l’AFP sur place qui salue “un homme brillant qui parle cash et ringardise tous les autres politiques” et qui craint “le grand remplacement”.

Enfin, la galaxie politique qui entoure le possible candidat condamné deux fois pour “incitation à la haine raciale” est essentiellement composée de jeunes proches ou appartenant à LR, à commencer par le porte-parole des “Amis d’Éric Zemmour”, Antoine Diers.

“Il n’y a presque que des anciens Sarkozystes”, qui le suivent confie au HuffPost Olivier Ubéda qui dit ressentir “le même engouement populaire” que lorsqu’il accompagnait le presque candidat de l’époque, Nicolas Sarkozy, lors de ses tournées pour signer ses livres “dans les années 2005 et 2006”. ”Je vois les mêmes images”, poursuit le spécialiste de la communication, persuadé que c’est “chez Zemmour et Macron qu’il se passe quelque chose” et conscient que son recrutement dit aussi quelque chose des intentions de Zemmour vis-à-vis de l’électorat de droite traditionnel: ”Evidemment que prendre celui qui a fait les meetings de Sarko et de Bruno Le Maire est un symbole, je ne suis pas dupe”, nous explique-t-il.

Silence radio chez LR

Chez LR, on n’était pas nombreux ce samedi 18 septembre à vouloir commenter les scènes d’hier soir. ”Je ne vais pas remettre une pièce dans le jukebox”, a décliné l’un des députés du parti. “Je suis ultra-booké”, a répondu un autre, une fois le thème de l’article connu. Empêtré dans des divisions et un mode de départage toujours inconnu, le parti a de quoi redouter une candidature de Zemmour à la présidentielle.

En début de semaine, nombreux sont ceux qui ont dénoncé les positions de l’auteur. “Un grand diviseur” pour Xavier Bertrand - qui a quitté LR- et qui prévenait au même moment d’un risque de “guerre civile” dans le pays, thème cher à l’auteur du Suicide français. “Ils parlent tous comme moi, j’ai envie de mettre des guillemets”, se gargarisait ce dernier sur la scène du palais des Congrès.

Les derniers sondages démontrent que le polémiste identitaire peut disposer d’un électorat potentiel au sein des sympathisants LR. “La majeure partie de ses soutiens se trouve parmi les anciens électeurs de Marine Le Pen et François Fillon en 2017”, notait lundi Jérôme Fourquet, de l’Ifop, soit en droite ligne de l’union des droites plaidée par Éric Zemmour depuis plusieurs années. Cela fait plusieurs années qu’une moitié des sympathisants LR se prononcent dans les sondages pour un rapprochement avec l’extrême droite.

Mercredi, Harris Interactive venait relativiser cette possible fuite de l’électorat de la droite traditionnelle vers une candidature Zemmour en notant que Xavier Bertrand ne perdait qu’un point, passant de 15% d’intentions de vote à 14%, en cas de présence de l’ex-journaliste au premier tour. Peut-être en raison de son retrait du parti. L’institut reconnaissait tout de même “une dynamique” en faveur du trublion de la campagne qui a pris trois points en une semaine pour arriver à 10% d’intentions de vote dans cette enquête d’opinion.

À voir également sur Le HuffPost: Éric Zemmour à la primaire? Ces jeunes LR ne ferment pas tous la porte

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

Ce contenu peut également vous intéresser :