YMCA : pourquoi cet hymne gay est devenu celui de Donald Trump ?

Donald Trump vient d’être élu à nouveau président des États-Unis. Durant sa campagne, l’homme d’affaires s’est déchaîné au son du célèbre "YMCA" des Village People, un groupe dont plusieurs membres appartiennent à la communauté gay.

Réélu président, Donald Trump a adoré se déhancher sur l'hymne gay des Village People... qui ont refusé qu'ils utilisent leur chanson. (Photo by Ed JONES / AFP)
Réélu président, Donald Trump a adoré se déhancher sur l'hymne gay des Village People... qui ont refusé qu'ils utilisent leur chanson. (Photo by Ed JONES / AFP)

Assez étrangement, Donald Trump a choisi un hymne gay pour accompagner ses campagnes électorales – celle de 2020 et bien entendu 2024, qui vient de le consacrer 47e président des États-Unis. Tout au long de son précédent mandat, le milliardaire conservateur a pourtant pris plusieurs décisions qui ont attiré les foudres de la communauté LGBT, mais qu’importe, c’est "Y.M.C.A" qui a rythmé ses meetings, un tube disco des années 1970 composé par les Village People, un groupe dont plusieurs membres appartiennent eux-mêmes à la communauté gay. À croire que le nouveau président américain en ignore jusqu’à la signification des paroles.

"Y.M.C.A", un manifeste de fierté homosexuelle

Sortie en 1978 sur l’album "Cruisin’" des Village People, la chanson "Y.M.C.A" a été écrite par le chanteur, Victor Willis, aussi connu pour son costume de policier, et les deux producteurs français du groupe. Le titre fait référence à la Young Men’s Christian Association (l’"Union Chrétienne des Jeunes Hommes"), un mouvement de jeunesse chrétien, mais évoque en sous-texte les lieux de rencontres pour homosexuels, dont la YMCA ferait partie.

"Y.M.C.A" est aussi perçue aux yeux du producteur Jacques Morali comme un manifeste de fierté homosexuelle. Les Village People, eux-mêmes issus de la culture gay, ont par ailleurs popularisé le clip de leur chanson grâce à leurs costumes : un cow-boy, un natif Indien, un policier, un ouvrier, un motard et un soldat.

"They have everything for young men to enjoy, you can hang out with all the boys" ("Ils ont tout ce qui plaît aux jeunes hommes, vous pouvez passer du temps avec tous les mecs") scandent les paroles.

Oui, mais voilà, comme de nombreux autres Américains, Donald Trump adore cette chanson. Déjà utilisée dans des rassemblements pro-Trump avant l'été 2020, voilà donc "Y.M.C.A" qui fait son retour en octobre 2020.

Donald Trump, à peine sorti du Covid-19 et reparti pour une nouvelle campagne, voit dans la chanson disco un moyen de donner de l’énergie à ses meetings. En Floride, en Pennsylvanie puis dans le Michigan, à quelques jours d’écart, on le voit pour la première fois se dandiner et remuer ses poings, son mouvement de danse signature.

"Pour Donald Trump, ça n’a pas de valeur symbolique. Pour lui, c’est avant tout : "Voici ma bande sonore, c’est moi. Je vais la faire écouter aux gens qui sont là"" expliquait récemment Dana Gorzelany-Mostak, professeure de musique à l’université de Géorgie, à Ici Radio Canada. "Les études montrent que les électeurs prennent souvent leur décision en fonction de ce que les candidats leur font ressentir et non en raison (…) de leur programme."

Un choix musical à la fois nostalgique et festif, donc, sûr de remporter l’adhésion du public. Mais aussi une réaction ironique à la controverse LGBT. Il n’en fallait pas plus pour que Donald Trump réemploie "Y.M.C.A" pour clôturer ses rassemblements en octobre 2024, notamment en Géorgie, en Floride et en Pennsylvanie. Ce dernier meeting fera d’ailleurs beaucoup parler de lui ; l’homme d’affaires écourte son discours et débute une danse lunaire de 39 minutes sur scène, au lieu de répondre aux questions.

Mais qu’en pensent les premiers concernés ? En 2021, les Village People racontent à TMZ qu’ils ont demandé depuis longtemps à Donald Trump de ne pas utiliser leurs musiques. "Mais comme c’est un tyran, nos requêtes ont été ignorées". Le groupe envoie des courriers officiels puis fait une parodie de leur propre chanson dans le Saturday Night Live en s’adressant à Trump : "You must pay us to use our song !" ("Tu dois nous payer pour utiliser nos chansons").

En vain. Alors que les résultats sont encore en cours de dépouillement, le républicain conservateur est à nouveau sûr de réaccéder à la Maison blanche. Et ses partisans fêtent déjà en grandes pompes l’élection… à coups de « Y.M.C.A ».