Xavier Bertrand et le Rassemblement national, une longue histoire d'"hostilité, voire de haine"

Le message est clair: alors que le nom de Xavier Bertrand semble l'hypothèse privilégiée par Emmanuel Macron pour le poste de Premier ministre, le Rassemblement national a fait savoir qu'il voterait une motion de censure à l'Assemblée nationale contre l'actuel président des Hauts-de-France.

Une intention confirmée par Marine Le Pen lors d'un échange téléphonique avec le président de la République ce mercredi 4 septembre. C'est "le premier sur la liste à pouvoir être censuré", a même affirmé le député RN Sébastien Chenu ce mardi sur France Info.

Xavier Bertrand se qualifie lui-même d'"ennemi numéro 1 du Front national (sic) depuis des années". En effet, il y a entre lui et le Rassemblement national un long passif de détestation mutuelle.

"Une hostilité, voire de la haine"

"Le RN jamais", "ce sont des bons à rien", "la seule compétence du RN c'est de savoir capter la colère des Français", "menteurs", "charlots"... Envers le parti d'extrême droite, Xavier Bertrand n'est pas en reste et multiplie les critiques, dénonçant notamment ses "rétropédalages permanents".

"Je ne vous cache pas que j'ai toutes les réserves, humainement, sur Xavier Bertrand, mais au-delà de ma satisfaction personnelle, c'est politiquement intéressant, parce que Xavier Bertrand est le seul des candidats qui a toujours exprimé une hostilité, voire de la haine, à l'égard du Rassemblement national, et de moi-même d’ailleurs", affirmait en 2021 Marine Le Pen, lors de la défaite de Xavier Bertrand au congrès des Républicains.

Ce mercredi, interrogé sur une potentielle nomination à Matignon de Xavier Bertrand, Sébastien Chenu a accusé le président de la région Hauts-de-France de "mythomane".

Vive opposition dans les Hauts-de-France

Comme le rappelle Le Figaro, dès 2012, tout juste éliminée du premier tour de la présidentielle, Marine Le Pen avait inscrit Xavier Bertrand sur une "liste noire" où étaient répertoriés les noms de personnalités PS ou UMP qui ont eu à l'égard des "électeurs FN un comportement particulièrement méprisant, haineux, insultant et antidémocratique" et qu'elle avait appelé à faire battre aux législatives.

Mais le contentieux entre les deux protagonistes s'ancre surtout à partir de 2015, lorsque Xavier Bertrand remporte la région des Hauts-de-France face à Marine Le Pen, à la faveur d'un "front républicain" et d'un retrait du candidat de gauche. Au soir du premier tour pourtant, Marine Le Pen était en tête avec plus de 40% des voix contre 25% pour son concurrent.

Durant son mandat, Xavier Bertrand se revendique alors d'une droite "sociale", cherchant à empêcher les électeurs, notamment de classe populaire, de voter pour ses rivaux du Rassemblement national. De son côté, les élus d'extrême droite reprochent régulièrement à Xavier Bertrand sa, disent-ils, proximité avec Emmanuel Macron et la macronie en général.

"Brisé les mâchoires" du RN

Selon Le Figaro, cette opposition donne lieu à des séances électriques entre la majorité et la seule opposition au Conseil régional des Hauts-de-France.

En 2021, Xavier Bertrand est reconduit à la tête de la région, cette fois face à Sébastien Chenu, Marine Le Pen étant concentrée sur la course à l'Élysée. Le soir des résultats du second tour, Xavier Bertrand se félicite alors d'avoir "brisé les mâchoires" du Rassemblement national.

"On ne peut pas parler comme une racaille de banlieue, ou alors après il ne faut pas se plaindre des violences que subissent les élus", avait commenté quelques jours plus tard Marine Le Pen.

Xavier Bertrand immédiatement censuré?

Dans l'épineuse équation politique à laquelle Emmanuel Macron fait face pour choisir un Premier ministre, le RN ne cherche pas à gouverner et concentre ses efforts et ses forces sur l'Assemblée nationale.

Fort de 126 députés, le groupe d'extrême droite dans l'hémicycle pèsera lourd en cas d'éventuelle motion de censure et pourrait ainsi jouer le rôle d'arbitre. Le choix de nommer Xavier Bertrand semble donc assez périlleux, la gauche ayant également évoqué la censure, d'autant qu'Emmanuel Macron a écarté l'hypothèse Lucie Castets, candidate du Nouveau Front populaire, car elle aurait été, selon lui, "immédiatement censurée".

Jordan Bardella a fait savoir que son parti était prêt à accepter un gouvernement technique sous certaines conditions. Selon son entourage, Marine Le Pen a rappelé à Emmanuel Macron ses exigences pour ne pas censurer le futur locataire de Matignon: un Premier ministre respectueux des élus et électeurs du RN, la construction d'un scrutin basé sur la proportionnelle et un engagement à travailler sur l'immigration, sécurité et le pouvoir d'achat.

Article original publié sur BFMTV.com