Wegovy, Ozempic, Mounjaro : efficacité, effets secondaires... Appel à la prudence avec les médicaments anti-obésité
Ces médicaments de la classe des aGLP-1 régulent l'appétit et augmentent la sensation de satiété. Ils sont parfois utilisés pour perdre du poids à des fins esthétiques et non de santé.
C'est l'un des marchés les plus porteurs pour l'industrie pharmaceutique : celui de la lutte contre l'obésité. Avec plus d'un milliard de personnes dans le monde atteintes d'obésité dont 890 millions d'adultes, le marché pourrait peser 1 120 milliards de dollars d'ici à 2031.
En France, la moitié de la population française présente un surpoids et 8,5 millions d'adultes souffrent d'obésité. Le marché est de la lutte contre l'obésité en France vient de se voir renforcer avec l'arrivée de Wegovy, médicament vedette du laboratoire danois Novo Nordisk qui va être commercialisé dans l'Hexagone, et alors que l'Ozempic, initialement utilisé contre le diabète, est détourné comme un moyen efficace pour perdre du poids. Des médicaments contre lesquels l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) met toutefois en garde.
Entre 270 et 330 euros pour un mois de traitement
Le Wegovy fait partie d'une nouvelle génération de médicament, les analogues du GLP-1 (aGLP-1), qui mime une hormone intestinale qui stimule la sécrétion d'insuline et procure une sensation de satiété. Un médicament qui sera disponible sur ordonnance mais sans remboursement.
La filiale française de Novo Nordisk a estimé le prix du traitement Wegovy "entre 9 et 12 euros par jour", alors que le prix sera fixé librement. "Les pharmaciens vont l’acheter entre 208 et 220 euros pour une boîte de quatre injections, ce qui correspond à un traitement pour un mois", indique Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). "On ne sait pas encore précisément à combien vont les vendre les officines, mais probablement entre 270 et 330 euros la boîte, TVA de 10 % comprise", estime-t-il auprès du Parisien.
Sur ordonnance, pour les patients avec un IMC supérieur à 35
Une utilisation dans un cadre restreint par l'ANSM. Pour obtenir le médicament, l'Agence nationale de sécurité du médicament prévoit que l'ordonnance initiale soit rédigée par des spécialistes en endocrinologie-diabétologie-nutrition. Les renouvellements peuvent en revanche être réalisés par des généralistes.
Autre restriction de l'ANSM, qui demande aux médecins de suivre les recommandations de la Haute autorité de santé pour ce type de médicament et de prescrire aux patients ayant un indice de masse corporelle (IMC) initial supérieur ou égal à 35, âgés de moins de 65 ans". Pour obtenir son IMC : Poids (kg) / Taille x Taille (m).
La crainte de "détournement à des fins esthétiques"
Dans le cadre d'une prescription, l'ANSM appelle à ce que le Wegovy ne soit prescrit qu'après l'échec d'une prise en charge nutritionnelle et en association à un régime hypocalorique et à une activité physique.
Objectif d'une telle recommandation, "sécuriser l'utilisation des aGLP-1 indiqués dans le traitement de l'obésité, dans un contexte de mésusage potentiel de ces produits", notamment "le détournement à des fins esthétiques" par des personnes qui n'ont pas de problèmes de santé liés au poids. Avec une perte de poids autour de 17% selon la HAS, le risque d'usage comme un simple amaigrissant est réel.
Des effets indésirables importants
Mais la prise d'un tel médicament n'est pas anodine : parmi les effets indésirables recensés, des nausées, des diarrhées ou encore des vomissements. Car sa substance active, la sémaglutide, est la même que celle de l'antidiabétique Ozempic, fabriqué aussi par Novo Nordisk.
L'Ozempic, antidiabétique autorisé depuis 2019 en France, fait aussi partie des analogues du GLP-1. À l'origine, il devait uniquement stimuler la libération d’insuline chez les diabétiques, mais il a une autre propriété : il ralentit la vidange de l’estomac, diminuant de fait l’appétit, rappelle Le Monde.
Des effets secondaires parfois graves
Et depuis plusieurs mois, il est l'objet de toutes les attentions de l'ANSM en raison du détournement de son usage. Sur les réseaux sociaux, des vidéos de jeunes femmes s'injectant une dose d’Ozempic se sont multipliées ces dernier mois, poussant l'ANSM, le 1er mars dernier à indiquer que l’Ozempic allait faire l’objet d’une "surveillance renforcée".
Car des études mettent en garde sur les effets de l'Ozempic sur le système gastro-intestinal. L'une d'elles, publiée par des chercheurs de l’université de Colombie-Britannique (Canada) dans le JAMA met en avant un lien entre les médicaments amaigrissants dont les principes actifs sont le sémaglutide (comme Ozempic et Wegovy) et le liraglutide (Rybelsus et Saxenda), et des affections gastro-intestinales sévères : pancréatite, obstruction intestinale, pathologies biliaires et gastroparésie, un retard dans le passage des aliments de l’estomac vers l’intestin grêle.
Des doutes sur un lien avec des idées suicidaires et des automutilations
Au fur et à mesure de l'utilisation, des effets indésirables sont remontés : la société américaine d'anesthésistes met en garde : "Nous craignons que le retard de la vidange gastrique et donc les résidus persistant dans l’estomac ne puissent augmenter le risque de régurgitation et d’aspiration pulmonaire du contenu gastrique pendant une anesthésie générale et une sédation profonde". Autre risque, rare mais grave, une étude menée par Jean-Luc Faillie et publiée dans Diabete Care en novembre 2022 a mis en évidence une suspicion de risque de cancer thyroïdien.
Depuis 2023, des signaux concernant des idées suicidaires et des automutilations chez des patients traités par des analogues du GLP- 1 sont surveillés par plusieurs agences de pharmacovigilance dans le monde. Une étude de l'Agence européenne du médicament n’a pas permis d’établir un lien de causalité entre la prise d’aGLP- 1 et des idées ou actes suicidaires ou d’automutilation, mais maintient la surveillance. En août dernier, une nouvelle étude publiée dans le Jama a remis en avant ce lien entre la prise d’aGLP- 1 et des idées ou actes suicidaires ou d’automutilation
"Bénéfice inexistant mis à part l'effet esthétique chez les personnes en léger surpoids"
"Si ces médicaments ont un bénéfice important dans le diabète et potentiellement dans l’obésité sévère et résistante en agissant sur la réduction des comorbidités associées, il est en revanche inexistant, mis à part l’effet esthétique, pour perdre quelques kilos chez les personnes en léger surpoids" met en garde auprès du Monde Jean-Luc Faillie, chef du service de pharmacologie médicale et de toxicologie du CHU de Montpellier.
Médicament concurrent mais moins connu, le Mounjaro, qui fait aussi partie de la classe de médicaments analogues du GLP-1, fonctionne de la même manière. Ces dernières semaines, la Haute Autorité de santé (HAS) a émis des avis favorables sous conditions au remboursement par l’Assurance-maladie du médicament Mounjaro du groupe pharmaceutique américain Eli Lilly.
Des effets bénéfiques sur le risque d'infarctus ?
Dans le traitement de l’obésité, le remboursement de Mounjaro est préconisé "uniquement en complément d’un régime hypocalorique et d’une augmentation de l’activité physique dans le contrôle du poids". Là aussi, la HAS recommande que le traitement "ne soit prescrit qu’après avis d’un spécialiste dans la prise en charge de l’obésité" chez l’adulte ayant un IMC initial supérieur ou égal à 35 kg/m² en cas d’échec d’une prise en charge nutritionnelle bien conduite.
Selon une étude publiée dans le New England Journal of Medicine, ces médicaments réduisent également de 20 % le risque d'infarctus du myocarde et d'AVC et protégeraient aussi les reins. Des résultats qui doivent être confirmés par de nouvelles études.