Violences en Martinique: l'aéroport fermé, plus de 1.000 passagers déroutés en Guadeloupe
Pillages, incendies, aéroport envahi... La situation reste tendue en Martinique. Malgré le début d'un couvre-feu ce jeudi 10 octobre, les violences en marge du mouvement de protestation contre la vie chère, qui ont déjà fait 26 blessés chez les policiers et gendarmes, se poursuivent sur l'île.
L'aéroport international de Martinique-Aimé-Césaire, dans la commune du Lamentin, a été envahi par une cinquantaine de personnes, avant d'être fermé, a annoncé la préfecture. Ils entendaient empêcher l'arrivée de renforts de forces de l'ordre. Huit personnes ont été interpellées, annonce la police à l'AFP ce vendredi.
Des renforts de la métropole doivent être envoyés sur place dans les jours ou semaines à venir, a appris BFMTV de source policière.
"Des rumeurs ont circulé sur les réseaux sociaux cet après-midi, selon lesquelles 300 ou 350 CRS devaient arriver en Martinique par avion. Cette information totalement fausse est à l'origine de regroupements et de l'envahissement de la piste de l'aéroport, ayant conduit trois avions, soit plus de 1.000 passagers, à être déroutés vers la Guadeloupe. 500 passagers qui devaient repartir par ces avions sont bloqués à l'aéroport de Fort-de-France", explique la préfecture de Martinique.
La préfecture de Guadeloupe parle de son côté de trois vols avec "à leurs bords 1.117 passagers". Pour les personnes présentes dans l'aéroport, c'est la sidération face à une telle violence.
"J'étais paniquée, j'ai eu peur. Parce que c'était assez violent", raconte une témoin interrogée par BFMTV. "Il y avait de la fumée partout, des pierres par terre, des voitures qui brûlaient... C'est hallucinant !", ajoute un homme présent pendant les violences.
"On ira jusqu'au bout"
Mais pour les protagonistes des violences en marge des manifestations contre la vie chère, pas question de reculer.
"Depuis le début, on nous dit des choses. Mais il n'y a rien qui ressort de bien, donc au final, ça a craqué, ça a pété", explique l'un d'eux à BFMTV, avant de marteler: "Jusqu'au bout, on ira jusqu'au bout! Jusqu'au bout des choses. Ici, on est chez nous, d'accord?"
Un homme tué par balle au Robert
Un homme a par ailleurs été tué par balle dans des circonstances encore obscures: il a été retrouvé blessé par les gendarmes qui intervenaient contre le pillage d'un centre commercial au Robert (est) et est décédé à l'hôpital, selon la préfecture de Martinique. Une enquête a été ouverte, a ajouté la préfecture, en écartant l'implication des forces de l'ordre qui n'ont "pas fait usage de leurs armes au cours des émeutes". De source proche du dossier, l'homme aurait été victime d'un règlement de comptes entre émeutiers.
Depuis septembre, l'île antillaise est marquée par un mouvement contre la vie chère, thématique récurrente dans les Outre-mer, qui a dégénéré en violences urbaines. La situation s'était calmée ces dernières semaines mais des incidents ont éclaté lundi entre les CRS et des militants qui menaient une action de blocage au Lamentin.
Rassemblements et manifestations interdits
Depuis, des violences urbaines sont à nouveau recensées chaque nuit. Pas moins de 400 véhicules ont été brûlés, selon la même source, un immense parking abritant des voitures neuves importées en Martinique étant notamment parti en fumée.
Conséquence: le préfet de l'île, Jean-Christophe Bouvier, a signé jeudi deux arrêtés concernant "l'ensemble du territoire de la Martinique". Le premier instaure un couvre-feu de 21h à 5h, le second a interdit les rassemblements et les manifestations à partir de 18H00 jeudi. Les deux arrêtés courent jusqu'à lundi.
Les établissements scolaires resteront par ailleurs fermés pour le deuxième jour consécutif vendredi, a indiqué le rectorat de Martinique. Le CHU de la Martinique a annoncé jeudi le déclenchement d'un plan blanc au cours duquel des "déprogrammations d'actes opératoires ou de consultations sont organisées".
"Toutefois, une attention particulière est portée s'agissant des interventions urgentes ou liées à la cancérologie", a ajouté le CHU dans son communiqué, précisant que "les rendez-vous annulés feront l'objet d'une reprogrammation dans les meilleurs délais". En outre, les pharmacies de l'île ont déclaré le même jour "ne plus être en mesure d'assurer le service d'urgence".
Une sixième table ronde contre la vie chère est prévue vendredi à 15H avec les différents acteurs. Les cinq précédentes, réunissant le RPPRAC (Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens), mouvement en pointe de la mobilisation, et les acteurs économiques, élus, services de l'Etat et la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) n'ont pas donné de résultat jugé satisfaisant par les protestataires.